Dans le cadre de Transat en ville et de la soirée du 48e parallèle nord, dans le quartier des Plages de Baud-Chardonnet, le collectif de création sonore Ars Nomadis propose des balades thématisées, mardi 20 juillet. Ce cercle fictif relie tous les points d’une même latitude, à savoir ici des villes d’Europe, d’Asie et d’Amérique du Nord. Le collectif invitera donc les promeneurs au voyage et à la rêverie dans le cadre de cette soirée à la forte dimension mobile.

Ce mardi 20 juillet, le festival Transat en ville propose une carte blanche autour du voyage et de l’itinérance. L’association Ars Nomadis, qui développe des projets artistiques depuis 2016, invite les curieux à se promener dans le quartier de Baud-Chardonnet. La thématique de la mobilité semblait toute trouvée pour ce collectif de création sonore composé d’une équipe hétéroclite de professionnels de l’image et du son. Cinq personnes s’adonnent à ces réalisations : un compositeur Alexandre Rubin, une réalisatrice sonore Laure Chatrefou, un ingénieur du son et créateur sonore Antoine Pinçon, une coordinatrice et productrice Anne Lalaire, ainsi qu’Antoine Beaufort directeur artistique et auteur avec qui nous avons échangé. La particularité d’Ars Nomadis est de façonner des créations en immersion, et de travailler essentiellement dans l’espace public.

À l’initiative du projet, le festival Transat en ville bien sûr, ainsi que l’association Comptoir du doc, spécialisée dans le domaine cinématographique. Ce collectif de passionnés a proposé à Ars nomadis de participer à une soirée sur le thème du voyage et de l’itinérance, tout au long du 48è parallèle qui passe au sud de Rennes. « Notre association a tout de suite accepté, puisque nous-mêmes sommes axés sur la mobilité, et sur le parcours dans la ville », explique Antoine Beaufort.

La soirée s’ouvrira avec la balade sonore entre 19h et 21h. Les baroudeurs seront équipés d’écouteurs pour entrer de plain-pied et autrement dans le quartier de Baud-Chardonnet. À 21h, Sylvain Prunenec se produira dans le cadre de son projet « Danses métronomiques », repensant l’idée de rythme avec un accompagnement musical composé de deux métronomes dé-coordonnés. S’ensuivra une rencontre entre le danseur et le cinéaste Vincent Le Port à 22h. Et pour clôturer la soirée, à partir de 22h30, une projection de courts-métrages par Comptoir du Doc.

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©Franck Hamon

L’association développe ces projets artistiques depuis 2016. Antoine Beaufort souligne l’expertise longue dont disposent les responsables de l’association : « Cela fait cinq ans que nous créons des projets et que nous les écrivons pour l’espace public. » Il s’agit de parcours sonores, « avec une particularité : ce sont des créations in situ, en immersion dans un territoire. Nous exécutons ce travail à partir de la matière sonore que nous recueillons, des témoignages, des ambiances, des musiques… ». À chaque fois, donc, une imprégnation du lieu et une réalisation finale propre à la ligne directrice de l’association. Ces créations sonores ne sont pas seulement produites à partir de sons du quotidien (bruits de la nature, voix, etc.), mais aussi de manière mélodique. « Chaque production donne lieu à des créations musicales », précise Antoine Beaufort. « Nous utilisons souvent des instruments de musique classique et contemporaine. Nos créations se déroulent sur un temps assez long. » La lenteur du processus apparaît nécessaire pour organiser l’ensemble des productions et construire progressivement un véritable univers, singulier et pluriel.

Ar Nomadis s’est installée dans le quartier au début de l’année 2019. Elle a rapidement proposé à Territoires publics, société publique d’aménagement du quartier, de réaliser le projet à découvrir mardi. L’initiative des promenades sonores de Baud-chardonnet a été conçue cette année. Elle se divise en deux parties, deux facettes d’une même pièce, si l’on peut dire : « Sous les balcons la plage » et « Les Bas Sons de Baud« . À l’aide d’un casque, les marcheurs entendent une bande son en continu pendant toute la déambulation. Ils sont guidés par une voix qui les amène à entendre des histoires mêlant fiction et réalité, avec la ville pour décor. Ces « fictions sonores urbaines » apportent « deux points de vue très différents sur le quartier ». En effet, « Sous les Balcons la Plage » dévoile une vision poétique et onirique de ce site qui accueillait auparavant la principale plage de Rennes, tandis que « Les Bas Sons de Baud » est imprégnée par l’imaginaire plus inquiétant des sous-sols du quartier. 

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©Franck Hamon

La construction de ces fictions s’est faite en pleine coopération avec les habitants. Antoine Beaufort le met en valeur : « Ce quartier est en totale mutation, mais il a une histoire. Nous avons associé à notre réalisation des acteurs du quartier, avec plusieurs personnages comme Gros Ben de l’Elaboratoire, Christophe de la Mie Mobile… Le projet a aussi associé un groupe de quinze habitants qui a participé à l’ensemble du processus : ils ont avec nous défini le parcours, participé à l’écriture, interprété certains rôles. Au total, soixante intervenants sont intervenus dans ces deux créations : des professionnels et des amateurs, des musiciens et comédiens… ». La volonté de faire participer activement la population du lieu accompagne les membres de l’association, désireux d’ancrer leurs créations et d’associer des « spécialistes locaux ». L’inauguration finale le 12 juin a permis de constater l’importance d’une démarche collective.

« Avec ces deux parcours, les deux points de vue sont très différents sur le quartier. L’un, Sous les balcons la plage, est très lumineux et politique. L’autre, les Bas sons de Baud, porte une vision plus sombre, autour d’une enquête digne d’un polar. »

Antoine Beaufort.

« Sous les Balcons la Plage » se déroule sur un lieu autrefois important de Rennes, l’ancienne plage de Baud-Chardonnet sous l’Ancien régime, appelée à l’époque Le Gué-de-Baud. « Nous partons de cette histoire pour nous évader progressivement dans la rêverie et l’imaginaire. On croise différents personnages du quartier : une jeune femmes-sirène, un ancien gardien de phare, un couple d’amoureux… », explicite le directeur artistique. L’idée d’un espace liminal est central, avec toujours un travail à la limite entre fiction et réalité pour les deux histoires. « La crise sanitaire nous a aussi amené à réfléchir à cela : la réalité dépasse la fiction, c’est ce que beaucoup se sont dit quand tout cela est arrivé. Nous nous sommes ainsi beaucoup inspirés de l’histoire du quartier et de celles des habitants qu’on a interviewé. Nous nous sommes amusés de cette porosité entre fiction et réalité et nous avons joué à perdre l’auditeur. » En plus du récit, une chanson a aussi été écrite et composée pour cette promenade, et interprétée par sept habitantes, sous la direction du compositeur Alexandre Rubin. « Sous les Balcons la Plage » apparaît comme une expérience à vivre en famille, dans une découverte émerveillée du quartier.

ars nomadis

L’univers créé par Ars Nomadis apparaît pourtant en clair-obscur, avec une autre dimension plus sombre du quartier. « Les Bas sons de Baud est une enquête de style polar dans les mondes souterrains du quartier. Nous nous sommes inspirés du passé industriel et guerrier (la plaine de Baud fut bombardée en 1940) du quartier. L’histoire se révèle ainsi plus noire », soutient Antoine Beaufort. L’utilisation du géophone – une sonde utilisée par les géologues – a guidé cette enquête dans les mondes souterrains de Baud-Chardonnet. Planté dans différents endroits du quartier, le géophone parcourt la narration en quête d’un autre Rennes, plus noir, inquiétant et secret.

L’association mène de front plusieurs créations. Un autre projet au long cours mené en partenariat avec le Conservatoire de Rennes va aboutir en octobre prochain. « Les Chants du Blosne » s’intègre dans un projet de réaménagement de ce quartier du sud-est de Rennes, avec la création de portraits sonores d’habitants. Des portraits seront bientôt proposés à l’écoute le long d’un parcours composé de dix bornes pérennes, et dont la première borne sera inaugurée mardi 27 juillet. Il s’agira d’une « sorte de cabane dans laquelle on peut s’asseoir et écouter les portraits sonores », précise Antoine Beaufort. Une manière, tout comme avec les balades du 20 juillet, d’en appeler à une histoire collective, mais aussi singulière et de révéler, d’imaginer, un paysage caché, oublié.

INFOS PRATIQUES

Mardi 20 juillet de 19h à 21h sur les Plages de Baud.

Réservations obligatoires à l’adresse contact@arsnomadis.eu.

Plus d’informations sur le site du Comptoir du doc.

Sur le site d’Ars Nomadis

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