Pour sa 21e édition, la Biennale Vern Volume de Vern-sur-Seiche se concentre sur le thème de la fête dans une exposition intitulée Et le plancton. À travers une sélection d’œuvres et d’artistes, Isabelle Henrion, commissaire d’exposition, révèle la complexité de ce « rituel social » et les antagonismes qui y sont à l’œuvre : bonheur/malheur, construction/déconstruction, beauté/laideur… Artistes invités : Julien Boucq, Martin Creed, Nicolas Daubanes, Aurélie Ferruel et Florentine Guedon, Anaïs Hay, Francis Raynaud, Johanna Rocard.

 

Isabelle Henrion
Isabelle Henrion

Le commissariat d’exposition s’apparente à une fête, explique Isabelle Henrion. Les œuvres accueillies comme des cadeaux, le temps des préparatifs qui est celui du montage de l’exposition ou encore le vernissage : moment de convivialité et d’échanges. L’exposition « et le plancton » témoigne d’un travail approfondi de documentation et de réflexion. Isabelle Henrion convoque en ce sens différentes approches – sociologiques, anthropologiques, historiques, politiques… – et des références précises. À commencer par le titre de l’exposition, tribut à demi-voilée au roman de Boris Vian, Vercoquin et le plancton où l’auteur y dresse des descriptions de surprises-parties en 1945.

Anaïs Hay aborde la fête dans sa dimension politique. Moment de catharsis, elle est aussi une porte ouverte à de possibles débordements et excès. C’est ce que laisse imaginer l’œuvre Sturzstrom ou quand la fête tourne mal… Le travail d’Anaïs Hay est intimement lié aux agitations du monde qui l’entoure. Les événements lors de la loi travail l’ont notamment marqué : des manifestations oscillant entre rassemblements et émeutes. Pourtant, un détail nous indique une autre voie : la base du poteau est creuse. Se pose alors la question du simulacre. Autre indice, Anaïs Hay est aussi metteur en scène et dirige la Kairos-Mênis Compagnie. Poteau électrique tombé sous la pression d’une marée humaine ou décor de théâtre égaré ?

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Autre excès, celui d’alcool provoquant l’ivresse. L’installation Prohibition de Nicolas Daubanes trouve son origine dans son expérience d’intervenant en milieu carcéral. Des bouteilles contenant divers ingrédients sont disposées sur des étagères. Une recette apprise au contact des détenus. La consommation d’alcool étant pour eux la possibilité de s’évader, un temps, à défaut physiquement, au moins par la pensée. L’artiste explique lui-même qu’« il y a une sorte de corrélation entre la “fermentation” du détenu dans sa cellule, et l’action de la fermentation des fruits, de la levure, du sucre et de l’eau en bouteille. Quelque part, c’est aussi lié au temps de “macération”. Que [Nicolas Daubanes] relie aussi au temps de l’exposition. »

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C’est aussi avec le résultat d’une fermentation, celle du raisin, que l’artiste rennais Francis Raynaud a arrosé sa sculpture de plâtre La charogne. Une sculpture entre séduction et monstruosité. Comme pour l’installation de Nicolas Daubanes, l’œuvre de Francis Raynaud s’inscrit sur le mode du devenir. Les tanins du vin entraînant une métamorphose. Un intérêt pour le changement d’état présent d’ailleurs dans la cuisine, formation initiale de Francis Raynaud. L’œuvre n’est pas sans rappeler l’importance du banquet, a fortiori du symposion, comme élément de sociabilité durant l’Antiquité. Savoir consommer le vin, n’est-ce pas alors une des caractéristiques de l’homme civilisé ? À l’inverse, dans l’Odyssée d’Homère, Ulysse ne pousse-t-il pas Polyphème, le Cyclope, à l’excès de boisson afin de lui échapper ? Stimulation des sens : la vue, puis l’odorat voire même le goût, l’œuvre engage un rapport au corps, corroboré par le dispositif de monstration.

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Ce corps-à-corps avec l’œuvre est exacerbé dans l’installation Half the Air in a Given Space de Martin Creed où le public est littéralement dans l’œuvre. L’excitation de départ face à cette œuvre aussi spectaculaire qu’immersive laisse rapidement place au malaise. Sous ce flot de ballons verts, les repères spatio-temporels se brouillent. Restent les bruits et la sensation du glissement des ballons et la résistance du corps à l’air qu’ils contiennent.

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L’exposition se poursuit également hors les murs avec une performance d’Aurélie Fuerruel et Florentine Guedon à ne pas manquer le soir du vernissage. Leurs travaux se nourrissent de traditions héritées de leurs familles ou de cultures plus lointaines : masque hemlout de Papaouasie-Nouvelle-Guinée, Fest Noz de Bretagne, danse Shangaan d’Afrique du Sud, chants de leurs grands-mères… Ces gestes et savoirs, Aurélie Fuerruel et Florentine Guedon les reprennent au profit de la création contemporaine en leur insufflant un nouveau sens, une nouvelle lecture. La performance créée pour l’occasion s’inspirera des fêtes des battages, une des fêtes liées aux activités agricoles. Johanna Rocard proposera quant à elle une performance s’inspirant des rituels réalisés lors de l’acheminement et de l’installation des mégalithes.

Julien Boucq s’approprie également l’espace public avec une installation en fer forgé. Reprenant une graphie proche de la spontanéité du graffiti, Julien Boucq opère un mouvement de l’expression anonyme dans l’espace public à une création individuelle.

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21e édition de la Biennale Vern Volume du 9 septembre au 18 octobre 2017. Vernissage le samedi 9 septembre à 18h. Centre culturel Le Volume – Vern-sur-Seiche.

Horaires d’ouverture du Volume
Mardi : 15h- 18h30
Mercredi : 10h30-12h30/ 13h30-18h30
Vendredi : 15h-18h30
Samedi : 10h30-12h30/ 14h-16h30
Entrée dans l’espace d’exposition libre et gratuite

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