Rencontre avec Steven Prigent, musicien et musicothérapeute de la région brestoise. Fort d’un parcours artistique et professionnel dense, il vient d’accoucher d’un premier projet solo aux vertus thérapeutiques… Un sain départ…

Ralentissement du rythme cardiaque, baisse de la tension artérielle, diminution du niveaux d’hormones du stress… Les bienfaits de la musique ne sont aujourd’hui plus à prouver. Le fait d’en jouer, d’en écouter, provoque un afflux de dopamine au cerveau équivalent à celui d’un opiacé. Plus qu’un médicament, c’est un remède, un sérum universel qui nous aide à combattre les maux auxquels nous faisons face toute notre vie. L’histoire de Steven Prigent est une formidable illustration du potentiel offert par cette médecine à laquelle nous avons tous accès.

Né en musique, il grandit dans une famille d’artistes où quasiment tout le monde tâtait d’un instrument. Lui, c’est sur le piano de son petit frère qu’il commence à jouer autour de ses dix ans, en reproduisant à l’oreille ses mélodies préférées, avant d’intégrer l’école de musique de Guilers, près de Brest. Mais c’est durant ses années lycée que Steven Prigent fait ses premières armes, en tant que guitariste dans des ensembles de musique traditionnelle bretonne, et surtout accompagné par son frère Ludovic au sein du groupe de Reggae-Dub Yehed Mad. Un éveil musical naturel, presque instinctif, dans un terreau familial des plus propices, mais qui finit par prendre un tournant inattendu.

Ce tournant, il s’en souvient parfaitement. C’était le 25 mai 2000, lorsque scotché devant un reportage, il découvre la musicothérapie, une branche non-reconnue dans le domaine paramédical, où la musique est employée à des fins d’accompagnement et de de soin. Une révélation pour Steven qui trouve alors un moyen de conjuguer sa passion pour la musique et son désir de marcher sur les pas de sa famille en embrassant une carrière sociale. Il décide de commencer en 2002 un DEUG de musicothérapie à Montpellier, un cursus qui lui permet d’appréhender un tout autre versant de la musique.

Loin des concerts et autres boeufs endiablés, mais toujours dans une optique de communion, la musicothérapie entend utiliser le sonore comme un vecteur de communication et d’émotions auprès des personnes fragiles, précaires ou en situation de handicap. Aujourd’hui encore peu reconnue, si ce n’est parfois reléguée au rang de science occulte par le diktat médical, cette profession part pourtant d’un principe simple et irréfutable : la musique, celle que nous aimons et qui nous transporte, fait du bien. Son écoute procure une sensation de bien-être relaxant, capable d’apaiser les souffrances les plus pénibles. Mais surtout, le fait d’en jouer permet un échange au-delà des mots. Lorsque les paroles ne suffisent plus, qu’elles deviennent insuffisantes pour communiquer avec des populations qui ne disposent pas de nos codes sociaux, la musique intervient comme un relai intéressant.

« Il ne s’agit pas seulement d’avoir l’oreille musicale, il faut aussi avoir une oreille bienveillante »

Steven Prigent

À la fin de ses études, Steven Prigent retourne dans le Finistère, où il mène pendant trois ans des interventions ponctuelles dans des établissements sociaux, avant de s’installer enfin en tant que musicothérapeute en 2008. S’il est parvenu à se professionnaliser dans un domaine transversal, l’envie de devenir musicien ne l’a jamais quitté. Il recommence à travailler avec des groupes locaux, tels que e.Sens/ ou Too Soft, pour ensuite entrer en 2010 en collaboration avec Robin Foster. Arrivé dans notre région il y a 20 ans et considéré depuis comme pilier de la scène rock bretonne, le guitariste et compositeur anglais va devenir un personnage central dans l’histoire de Steven. Ce dernier l’accompagne sur plusieurs albums, mais aussi sur la scène des Transmusicales de Rennes, ou durant deux tournées en Allemagne où le groupe passe en première partie d’Archive. Parallèlement, Steven Prigent continue à enchaîner différents projets, en tant que compositeur sur un court-métrage par exemple, mais aussi avec différents collectifs d’artistes brestois, tels que Les Pieds Nus ou le Théâtre du Grain.

Un CV bien rempli et tout en couleur, qui a permis à Steven de se tailler une solide réputation dans la région, et que l’artiste a décidé de compléter en 2016 en montant SPS Project. Acronyme de Steven Prigent Solo, ce premier essai en solitaire aboutit cette année à l’éclosion d’un opus.

STEVEN PRIGENT

« J’aime bien l’idée de jouer en groupe, mais je voulais aussi décider de mes propres choix artistiques »

L’intitulé de ce premier jet : Le Départ. Un titre simple, mais aussi ambivalent, à la fois personnel et impersonnel, universel et singulier. Peu importe le sens qu’on choisit de lui conférer, qu’il s’agisse du notre ou celui d’un proche, Le Départ est porteur d’une charge émotionnelle qui laisse entrevoir une profondeur à la mesure de l’album.

STEVEN PRIGENT

Malgré un style néoclassique prégnant, Le Départ est un projet chatoyant, qui surprend même. On passe de morceaux empreints d’une mélancolie digne d’un Yann Tiersen, à des envolées plus légères et fantaisistes, non sans rappeler les saveurs oniriques d’un certain Erik Satie. Quelques passages sont également plus hybrides et progressistes, mêlant des interventions instrumentales et vocales presque exotiques et qui rappellent que l’héritage musical très métissé de Steven n’est pas bien loin. Prenez des parents amateurs de classique, une adolescence bercée au reggae et à la musique bretonne, ajoutez-y un soupçon de trip-hop et un trait de post-rock, et vous obtenez une coloration musicale singulière et enivrante.

Les onze pistes du projet se laissent dévorer généreusement, comme autant de tranches d’intimité que l’on a envie de partager, de pages d’un livre que l’on s’empresse de tourner. La musique de Steven est d’une finesse qui fait la force de cette œuvre où tout gravite autour de la mélodie. Le piano donne le ton, les paroles restent discrètes et légères (même sur le dernier titre qui pourtant accueille un slam), comme pour rappeler que la musique est un échange qui se passe de mots.

Un album intimiste, presque introspectif, qui fait évidemment écho à l’histoire personnelle de Steven, mais qui par sa simplicité et sa douceur, a aussi quelque chose d’universel. Il suffit de se taire, de se laisser porter, et de laisser les émotions parler d’elles mêmes…

Si vous sentez qu’une plongée dans cet univers musical chaleureux et réconfortant pourrait apaiser vos maux, le Départ est disponible en version CD ou Vinyle sur le site de Steven Prigent, où sont disponibles quelques extraits de l’album.

Steven présentera Le Départ en solo le 18 décembre 2020 au Vauban à Brest avec Quai Ouest Musiques.

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