D’après une histoire vraie est le nom de la toute nouvelle exposition de Théo Audoire aux Ateliers de la Ville en Bois, à Nantes. Revisitant l’histoire du lieu, l’artiste y décèle une part d’inconnu, des ombres furtives qui se glissent entre les caisses de l’ancien entrepôt, et des machines qui n’attendent que le sommeil des humains… Une exposition incongrue à découvrir jusqu’au 18 juin 2022.

Théo Audoire
Un tas de caisses en carton semble attendre seul dans l’ancien entrepôt des Ateliers de la Ville en Bois… Seul ?

Dans la rue de la ville en Bois, l’on dit que de petits habitants ont repris l’affaire. Que des souris se faufileraient entre les fissures des murs et sous les caisses des étagères pour espionner les humains travailler. Dans l’usine endormie, les petits rongeurs feraient encore tourner les machines. Et si ce ne sont pas elles, comment expliquer cette présence qui rôde dans l’entreprise ? Où les robots se réveillent au beau milieu de la nuit pour entonner les chansons qu’ils ont entendues la veille ? Il faut être attentif. Car tout est affaire de détail, ou de patience, dans les œuvres de Théo Audoire.

Théo Audoire expo
Apparemment un propriétaire quel que peu excentrique voulait faire voyager ses gerbilles dans tout l’entrepôt !

Méfiez-vous des petites peluches cernées à l’air morose sur les affiches de l’exposition de D’après une histoire vraie. Si vous cherchez ces souris, elles n’ont pas le temps, elles sont au fourneau. Ne reste plus que la structure industrielle de leurs activités. Témoins de leur présence, des tuyaux pour rongeurs zigzaguent entre les caisses entreposées d’un rack s’élevant jusqu’au plafond. À y regarder de plus près, de modestes lampes clignotent dans le vrombissement du système d’aération, tandis que de petites trappes laissent échapper des nuages de poudre dans la vie rythmée et bizarre des machineries.

Théo Audoire nantes
Dans le court-métrage de l’artiste, les employés n’occupent pas le devant de la scène mais plutôt ses marges.

Rien d’étonnant à cela puisque la plupart des matériaux présents dans l’exposition ont été exhumés de la cave de la résidence par l’artiste ! En effet, les Ateliers de la Ville en Bois étaient auparavant l’entrepôt d’une usine de poudre alimentaire, l’entreprise Plaisance Nature-Aliments. Théo Audoire découvre par la suite que cette usine existe toujours, mais que son site a été délocalisé à Rezé. Il décide donc de partir sur place à la rencontre des femmes, des hommes et des machines qui partagent leur vie quotidienne, et d’y faire un stage en entreprise d’une semaine. C’est à cette occasion qu’il filme les locaux habités par une présence indicible…

Théo Audoire nantes

Sous les rengaines des chansons pop diffusées à longueur de journée par les haut-parleurs de l’usine, engins et humains procèdent à des gestes répétitifs sans trop savoir qui imite qui. À l’instar des tutoriels que l’on trouve sur Youtube, les actions s’enchaînent sans finalités précises, mais au bout d’un moment peut survenir un accident. Un bug. Dans une forme de lassitude, on finit par voir des choses que l’on aurait pas aperçus naguère.

« J’essaye d’étirer des moments lents, répétitifs, quotidiens, pour voir à partir de quel instant ils peuvent s’ouvrir sur une brèche. Dans mes différents films, il y a toujours cette apparition, ce surgissement. »

À différents moments dans le film, des points de vue s’animent sans que l’on sache exactement où l’on se situe mais l’on comprend que quelque chose de bizarre est programmé. Peut-être est-ce plus la machine qui regarde l’homme travailler ? Attendant qu’il rentre chez lui, donnant l’opportunité de mener sa vie secrète ? Le robot alors s’active, comme ces flux de liquide circulant dans l’installation exposée. Nous ne sommes jamais très loin d’une pensée animiste, où il suffit de prêter attention à l’objet pour savoir ce qu’il dégage.

Théo Audoire
Portrait de l’artiste Théo Audoire, en chair et en pixels !

En faisant dialoguer le monde de l’industrie et celui, miniature, des animaleries, il n’y a plus qu’un pas à faire pour passer de l’usine à la cage pour hamster ! Se mélange d’univers tant industriel que domestique fait l’originalité du travail de Théo Audoire. Une exposition qui n’aurait pas été rendue possible sans le concours de Le Pépin Mû. Dirigée par les jeunes commissaires d’exposition Mathilde Moreau et Pauline Thoër, celles-ci ont été très sensibles à l’intérêt que porte l’artiste au lieu et à son histoire. Cette association lauréate du prix Alpha 4, décerné par MPVite, lui a permis d’être accompagnée par cette autre association culturelle d’envergure pour organiser la résidence du créateur. 

L’exposition D’après une histoire vraie de Théo Audoire est visible du 4 juin au 18 juin 2022 aux Ateliers de la Ville en Bois, au 21 rue de la ville en Bois, Nantes.

INFORMATIONS PRATIQUES

Ouvert du mercredi au dimanche de 15h à 19h et sur rendez-vous en appelant le 07 69 52 78 21

Entrée libre

Contact :

 mpvite@gmail.com

association@lepepinmu.com

Benjamin Julienne
Métal expérimental, littérature russe, art contemporain, Yu-Gi-Oh!, chant bulgare et septième art tourbillonnent dans ma tête. J’écris principalement pour faire connaître les lieux d’exposition indépendants de Nantes.

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