baron gouverneur fils

Le livre Le Fils du Gouverneur (édit. Baker Street) offre un émouvant et grand salut d’un fils, Jean-Marie, à son père, François Baron (1900-1980), qui fût entre autres le dernier Gouverneur français de Pondichéry… et l’un des premiers à avoir répondu à l’Appel du 18 juin du Général de Gaulle.

Pondichéry fût un des cinq comptoirs de l’Inde gouvernés par la France entre 1668 et 1954, avec Chandernagor, Yanaon, Karikal et Mahé.

Belle-Île et alentours (La Trinité-sur-Mer, Saint-Pierre Quiberon) fûrent le berceau familial du père et du fils qui tous deux parcoururent le monde entier sous tant de latitudes et longitudes, et ce sous tellement de formes et de façons.

A vrai dire, l’évocation de leurs vies hors du commun résonne à la fois comme un roman, un carnet de voyages en tous genres, une navigation en terres inconnues.

« Il est mort dans mes bras et longtemps j’ai tenu sa main qui s’est ouverte puis figée peu à peu dans la mienne » (c’était en 1980). Ainsi commence cet hommage… à ce père qui « croyait à la grâce et savait parler de sa baraka ».

jean-marie baron

Un livre d’aventures envoûtant et parfois déroutant, plein d’enchantements, qui sait jongler, larguer les amarres, et où il beaucoup question de découvertes en tous genres, de vibrations, de mystères, de mantras, d’odeurs et de saveurs… Une navigation comme dans un autre monde!

À l’âge de 10 ans, en 1960, le fils part en avion à Pondichéry rejoindre son père. Ils sont accueillis sur un tapis rouge avec des colliers de jasmin piqués de rose et iront rejoindre dans une vieille Ambassador rutilante l’ashram de Sri Aurobindo, philosophe et leader indépendantiste indien, dont le concept de « force supramentale » est souvent mis en parallèle avec le surhomme de Nietzsche. Sa compagne spirituelle, baptisée « Mère », est aussi considérée comme un « grand sage » devant laquelle le gouverneur aime à se prosterner. « Quelle chaleur pour l’âme, quelle lumière pour l’esprit » écrira-t-il à propos de leur ashram en 1958.

Et donc, pour le jeune Baron, cette rencontre était comme si s’ouvraient à lui une passion pour l’étrange et l’infini…

Ainsi en 1980, à l’âge de 29 ans, il part seul découvrir les pyramides de l’Égypte, notamment celle de Kéops, avant d’arpenter les sables et recevoir un autre Appel, celui du désert car l’immensité des paysages le transporte corps et âme.

jean-marie baron

Puis ce sera encore l’Afrique avec le Sénégal et le merveilleux fleuve Niger, puis le Mexique où habite alors sa mère, haute en couleur là encore.
Avec de tels gènes, on comprendra que le fils du gouverneur n’ait jamais pu tenir en place. Ainsi il côtoiera la jet set parisienne, et un de ses proches est fils de maharadja. Mais il va aussi bourlinguer, façon clochard céleste, au Cachemire et au Pakistan, survoler les sommets enneigés de l’Himalaya avant de rejoindre le New York surchauffé de la fin des années 1980. Bref, cet homme aime les tableaux vivants !

Il est clair que c’est le père qui a transmis au fils la passion des territoires lointains, l’envie de se mettre à l’épreuve, de voguer vers les utopies… Mais c’est l’Inde « aux mille facettes » et notamment la communauté d’Auroville fondée en 1968 qui attira surtout le jeune Jean-Marie.

Ce qui ne l’empêchera pas à 24 ans de commencer à œuvrer à Paris dans la presse, mais toujours en naviguant. Ainsi il commence comme chef des infos à France Dimanche avant d’être critique d’art dans des magazines. Il le sera pendant 20 ans! À Vogue, Beaux Arts, L’œil ou Connaissance des Arts. En 1991, il conçoit l’émission de télévision, Plastic, le magazine des arts plastiques sur Antenne2.

Mais tout à la fois, il sera enseignant en histoire de l’art en Université, co-réalisera plusieurs films sur les artistes César, Tapiès, Garouste, dirigera un département de l’Agence Gamma en lien avec L’Unesco, écrira maints ouvrages sur Tapiès, Caillebotte, Rembrandt, les natures mortes de Cézanne…

Mais le livre auquel il demeure le plus attaché est Ami entends-tu (La Table Ronde, 2006) sur la vie extraordinaire de sa grande rencontre des années 70, Joseph Kessel, qui lui confiera ses plus belles et fortes histoires : entre autres son engagement précoce en 1918, son arrivée à Londres où il rejoint de Gaulle et où il écrira notamment Le Chant des partisans. Mais aussi, ses virées avec ses copains qui s’appelaient Cocteau, Radiguet, Poliakov, Humphrey Bogart, Gene Kelly ou Paul Reynaud. Et ce, aussi bien aux quatre coins du monde que dans les bars russes de Montmartre.

Quant à son plus récent livre, publié par Auroville, Un séjour sur les hauteurs avec Satprem, il sera comme un retour à l’Inde aimée.

Le Fils du Gouverneur, 252 pages agrémentées de belles photos d’époque, mai 2023, Éditions Baker Street. 20 euros

Bibliographie :

  • Ami, entends-tu… (La Table Ronde, 2006 – Par Joseph Kessel)
  • Caillebotte (Herscher, 1994)
  • Rembrandt et la Bible (Herscher, 1993)

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