Rennes regorge d’illustrateurs et illustratrices aux univers multiples. Unidivers vous présente une série de portraits avec, aujourd’hui, Benjamin Rolland. En freelance depuis 4 ans, l’illustrateur a plusieurs cordes à son arc : le graphisme, l’illustration et le marketing. De ses formes épurées naît un univers minimaliste coloré. Entretien.

illustrateur benjamin rolland

Unidivers – Comment en êtes-vous arrivés à l’illustration ?

Benjamin Rolland – Je n’étais pas vraiment destiné à travailler dans la création. Avant de m’orienter dans l’illustration, je me dirigeais dans le secteur du marketing et le business. J’ai fais mes études à Digital Campus, une école de marketing web. Le graphisme était une des matières enseignées et cet univers créatif m’a attiré. Ma sœur, Johanna Olk, travaille dans le design de produit, j’ai rapidement été baigné dans ce milieu artistique.

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J’ai réalisé des stages en agence de publicité pendant mes études, mais j’avais besoin de plus de liberté créative donc je me suis mis en freelance, d’abord en tant que graphiste. La recherche de clients et la négociation de tarifs n’ont pas été facile au début. On a monté une agence avec un ami commercial, mais nos exigences étaient un peu trop prétentieuses, à vouloir les plus beaux projets. Au bout d’un an, on a arrêté et j’ai repris un master au Digital Campus dans le but de faire une alternance. Reprendre les études était plus une sécurité, donc j’ai arrêté à la fin de la première année…

Il faut savoir mettre son égo de côté en tant que graphiste. Le client peut avoir des idées qui ne te semblent pas en adéquation avec ton univers, mais c’est le jeu, du moins au début.

Je pratiquais l’illustration depuis deux ans déjà. Mon Instagram personnel a décollé quand j’étais en troisième année de licence et en 2017, on m’a contacté pour une exposition à Paris. Après quatre ans, j’ai pu allier les trois domaines qui m’intéressent : le graphisme, l’illustration et le marketing. Avec un ami, Glenn Vigouroux, nous avons monté une agence de stratégie social média, Tire-fesses. Le fait d’avoir les trois domaines qui fonctionnent me permet de sélectionner les projets sur lesquels je travaille… C’est un équilibre assez cool.

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Unidivers – Vous avez développé un style minimaliste. Le trait est épais et le travail du contour ne montre que l’essentiel des formes. Comment est né ce style ?

Benjamin Rolland – Mes compétences en graphisme web m’ont amené à réaliser des pictogrammes minimalistes et épurés. Mon style est certainement né de ces contraintes. Quand je me suis mis à l’illustration, je passais mes soirées à essayer plusieurs styles à l’aide de tutoriels, mais je n’avais pas envie d’un dessin détaillé.

Je suis aussi en pleine transition en ce moment. Je m’amuse à modéliser mes dessins en leur donnant du volume afin d’aller au-delà de la feuille de papier.

J’aime la rapidité du trait dans un dessin minimaliste et le côté représentatif d’un dessin, pouvoir faire passer une idée avec simplicité.

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Unidivers – Comment se traduit ce changement de cap dans votre travail ?

Benjamin Rolland – J’apprends à modéliser mes personnages en 3D afin de réaliser des moules qui serviront à la réalisation de figurines en plâtre. J’ai réalisé des vases en béton et j’ai essayé l’argile, mais la technique s’est avérée compliquée… L’utilisation des logiciels est plus naturel pour moi, donc autant se servir des outils à portée de main. Le travail de la matière me plaît beaucoup, mais cette évolution viendra peut-être plus tard, quand je maîtriserai ce genre de techniques.

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Unidivers – Vous êtes donc plus branché outils numériques que manuels dans votre processus créatif…

Benjamin Rolland – À la base, j’utilisais seulement le numérique, mais je me dirige progressivement vers le papier. La sensation que procure le dessin me plaît. J’ai toujours un carnet de croquis sur moi et quand j’ai envie de sortir un nouveau visuel, je remets le nez dedans et l’utilise comme source d’inspiration.

À force de dessiner à la craie et de faire des croquis, le geste est devenu plus naturel, je peux peindre ou dessiner sans avoir recours au numérique désormais. Cependant, j’aime travailler les grands formats et, comme je suis assez pointilleux, le numérique reste intéressant pour moi. Il me permet de traiter chaque petite imperfection.

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Unidivers – Quelles sont vos inspirations principales ?

Benjamin Rolland – Principalement ma sœur, Johanna Olk. Elle me pousse à dessiner depuis que je suis gamin. À chaque fois que je réalisais un dessin, elle m’orientait vers tel ou tel artiste pour m’aider à en savoir un peu plus.

Sinon, je m’intéresse plus aux personnes qui ont une façon de voir les choses plutôt qu’à des pratiques. Par exemple, le youtubeur Casey Neistat avait une méthodologie stricte et réalisé une vidéo par jour. Je m’inspire de ce type de personnes qui, même si leur projet ne fonctionne pas dès le début, se forcent à créer du contenu. Je suis vraiment resté dans cette dynamique.

Avant, j’étais inspiré par des illustrateurs comme Castel Bajac, il travaille la craie et le dessin minimaliste. Mais j’avais du mal à sortir de ces inspirations, jusqu’au jour où je suis revenu aux bases dans le but de créer ce qui me correspond vraiment.

Beaucoup trouve que mon travail rappelle celui de Keith Haring, le trait minimaliste et la forme ronde du visage. On ne peut pas nier le lien entre les deux pratiques, mais je ne m’en suis pas pour autant inspiré. C’est après avoir vu la similitude entre nos deux univers que son travail m’a inspiré, notamment la diversité des supports employés. J’ai appris récemment que Picasso travaillait également sur plexiglas d’ailleurs, ce qui m’a donné envie d’essayer de nouvelles techniques.

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Unidivers – Tout en gardant l’illustration comme corps de métier principal, souhaitez-vous orienter votre travail dans une dimension plus artistique à l’avenir ?

Benjamin Rolland – C’est ce vers quoi je veux tendre, en effet. Je me suis demandé si devenir illustrateur dans le commercial me convenait, mais les besoins des clients sont parfois trop définis. Ils ne s’intéressent pas à l’univers de l’illustrateur. J’ai eu plusieurs propositions, mais je n’ai collaboré qu’avec une, une carte blanche du magasine Paulette. Sortir de mon style ne m’intéresse pas.

J’ai eu l’occasion de réaliser des expositions seulement sur Paris et j’aimerais faire de même à Rennes. Beaucoup trop de personnes pensent que je suis Parisien. (rires)

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Unidivers – À côté de votre travail d’illustrateur et du bureau créatif Tire-fesses, vous avez créé un blog Vraiment Sympa avec votre copine Romane Guyamoard. Quel en est le concept ?

Benjamain Rolland – Ma copine est dans le milieu créatif aussi, on travaille souvent à quatre mains de manière générale. Vraiment-sympa consiste à présenter des commerçants et auto-entrepreneurs rennais. Chaque commerçant a son histoire et avec Romane, on était curieux d’en apprendre plus sur ce métier. Via ce blog, on essaie de coupler nos compétences en illustration et en social media. Il peut s’agir de commerces de toute taille. Acuitis par exemple est une boutique d’optique, située place des lices. C’est une franchise, mais leur histoire est assez percutante donc on est allés à leur rencontre. Sinon, nous avons rencontré des boutiques comme Monsieur, Hyloa, etc. Selon nous, c’est important de donner la parole aux personnes qui se cachent derrière ces commerces.

Fin septembre, nous organisons une exposition liée à cette thématique justement afin de créer des passerelles entre les différents métiers. Idéalement, ces expositions seront accompagnées de conférences tenues par des commerçants et des acteurs de la vie rennaise qui ont envie de s’exprimer.

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Romane Guyomard et Benjamin Rolland

Unidivers – Vous souvenez-vous de votre premier contrat en tant que freelance ?

Benjamin Rolland – C’était en tant que graphiste pour le groupe STD. J’étais en charge du logo du restaurant thailandais TuktukMum, à Rennes. Je n’avais pas terminé mes études (19-20 ans), mais ils ont choisi de me faire confiance. Ce projet m’a permis de me rendre compte que je pouvais vendre mon travail. Tout a évolué à partir de ce moment-là.

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Unidivers – Qu’en est-il de votre dernier projet ?

Benjamin Rolland – Samedi 20 juillet avec Romane, nous avons réalisé un collage sur un affichage associatif en face des Grands Gamins sur le Mail Mitterrand. Mais, on est tombé en rupture de colle à tapisserie… L’idée de base était vraiment de faire du collage, donc on a finalement été récupéré du scotch chez nous et improvisé du double face. (rires)

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Les passants se sont d’abord demandés pourquoi du double face, ils pensaient qu’il y avait un intérêt et que c’était volontaire. Certains sont venus à notre rencontre, d’autres se sont même moqués quand ils ont connu l’histoire (rires). Cette interaction avec les gens est importante et on aimerait la développer. Cependant, afficher dans Rennes est compliqué, car tu ne peux pas le faire où tu veux. Et comme on signe à notre nom… Ce n’est pas grave, mais au niveau de la procédure c’est autre chose.

J’aime bien le regard des personnes face à la création.

Il y a souvent ce besoin de rapprocher ce que l’on voit à un artiste ou un endroit qu’ils connaissent. Une des personnes a rapproché un cactus que l’on avait dessiné à un qui se trouve près de chez elle.

Unidivers – De nouveaux projets à l’horizon ?

Benjamin Rolland – En début d’année, j’ai travaillé sur le packaging d’une marque de cactus qui va sortir prochainement, mais le gros du travail sera sur l’exposition en septembre.

J’ai récemment réalisé une conférence pour Apple et une seconde pour Adobe. Cet échange et ce partage me plaisent énormément, j’aimerais en donner plus régulièrement. J’aime l’aspect motivation qui fait partie intégrante de cet échange. Les graphistes et artistes sont les premiers à ne pas oser se lancer, de peur de perdre la sécurité de l’emploi. Mais il est possible de commencer en parallèle avec son emploi. Il suffit juste de prendre du temps pour trouver des solutions. Après les conférences, des personnes me recontactent via les réseaux pour avoir un avis ou des conseils. Ce lien qui se crée est super intéressant.

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il est important de donner et de partager selon moi. J’ai eu la chance d’avoir des opportunités qui m’ont permises de prendre confiance et d’évoluer. Quand on donne sa chance à Une personne, elle fera son maximum pour satisfaire la demande.

Je me suis également donné comme objectif d’apprendre à modéliser en 3D en voyant le travail de l’artiste-modéliste Kaws. Jérémy, le directeur artistique de l’agence de communication Yam à Rennes, m’a donné des pistes, des astuces. Si j’étais resté dans mon coin et dans un réseau uniquement d’illustrateurs, je n’aurais pas eu cette opportunité là.

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Unidivers – Une dernière question. Selon vous, Instagram est-il un des facteurs qui a permis à la visibilité de votre travail ?

Benjamin Rolland – C’est même LE facteur. Il y a tellement d’illustrateurs que c’est important de ne pas rester dans son coin. Quand j’ai du envoyer mes première affiches, je ne savais pas comment faire : quel packaging, quel envoi par la poste, etc. J’ai envoyé des messages à d’autres illustrateurs qui m’ont conseillé. Le fait d’avoir posé cette question a créé un lien avec eux.

Ne serait-ce que pour l’égo aussi. J’ai passé tellement de temps à vouloir atteindre les 10 000 abonnés… Il existe une fonctionnalité sur Instagram qui permet d’intégrer un lien dans la story, ce qui n’est pas possible tant que les 10 000 abonnés ne sont pas atteints. C’est très utile quand tu fais de la vente en ligne par exemple. Maintenant je l’utilise différemment, je pense en terme de qualité plutôt que de quantité.

Unidivers – Je vous remercie Benjamin Rolland.

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