Le claveciniste Antoine Souchav’ présentera son projet solo « Yellow Magic Harpsichord » au festival des Tombées de la Nuit dimanche 4 juillet 2021, dans le cadre de la carte blanche donnée au festival Autres Mesures. Une occasion d’en apprendre plus sur les créations atypiques et musicales du claveciniste, au croisement de la musique ancienne et électronique. Rencontre.

Formé au conservatoire de Poitiers avec Dominique Ferrand, l’histoire musicale d’Antoine Souchav‘ commence par une transmission. Sa mère, mélomane et fan de musique classique, l’incite à prendre des cours de clavecin chez une amie. Qui aurait cru qu’il deviendrait son instrument de prédilection. « Mon intérêt pour l’instrument et la musique au clavecin est venu en le pratiquant. Les instruments à clavier donnent une vision à la fois très abstraite, intellectuelle et pratique pour composer la musique, la comprendre, la fabriquer et l’analyser », déclare le claveciniste.

antoine souchav
Antoine Souchav @ David Gallard

Antoine aurait pu choisir la voie classique, mais il en a été autrement. « Je me suis cultivé en empruntant des piles de disques pris au hasard dans les bacs de la médiathèque. » Nourrissant ses connaissances musicales d’un large éventail de genres musicaux, une musique hybride, croisement de la musique ancienne et électronique, est née de cette boulimie musicale. Son penchant pour la scène électronique, « particulièrement la techno à une période », a d’ailleurs influencé sa manière de jouer. « J’ai le souvenir de sensations, de sons et de modes de production. Ça a influencé ma musique dans les octaves répétées, les lignes de basses en octave, les accords assez percussifs ou les tonalités dansantes. »

Les chansons de David Bowie et les musicalités de Frank Zappa, qu’il écoute toujours, ont également accompagné ses débuts dans le mélange des musiques et l’exploration de la notion de décontextualisation. « L’environnement dans lequel j’ai baigné étant plus jeune m’a amené à écouter autre chose que de la musique classique. J’ai toujours écouté et pratiqué la musique classique, mais j’ai fait d’autres choses. Les deux mondes se croisent au bout d’un moment, de manière assez naturelle. » Depuis, Antoine ne cesse de croiser les genres pour un résultat toujours plus étonnant.

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Scarlatti Goes Electro, « de la musique baroque électronique »

En 2007, Antoine Souchav’ crée le duo Scarlatti Goes Electro avec Michel Bananes jr. Ce projet déjanté, « de musique baroque jouée avec des synthés », explore le 555 sonates de ce compositeur peu connu du grand public. « J’ai choisi Scarlatti naturellement, mais je me demande parfois si ce ne sont pas les sonates de Scarlatti qui m’ont choisi. »

Réalisant de véritables performances sur scène, perruques et costumes de circonstance, ce « groupe de niche esthétique » conçoit depuis plus de dix ans une musique décalée et rythmée accessible, mais précise. « Être dans une niche est une faiblesse, mais également une grande force. Le résultat sonore est original. » Elle-même fruit de plusieurs mélanges et collages sonores que Domonico Scarlatti a réuni sur papier, cette musique se prête bien au projet selon le musicien, et devient un outil prétexte à la composition, au détournement, au spectacle ou à la mise en scène. « Michel vient du jazz donc il apporte un autre éclairage aux sonates. Et il est plasticien, il a notamment réalisé certaines des pochettes d’album. Il compose autant que moi, mais a aussi une autre vision, complémentaire. »

L’énergie musicale décalée de ce premier projet laisse ensuite place à une douce poésie.

Yellow Magic Harpsichord, « de la musique électronique sur clavecin »

À l’inverse, le projet solo Yellow Magic Harpsichord consiste à jouer de la musique électronique sur clavecin. L’idée prend sa source dans les sonorités de Yellow Magic Orchestra, un trio de synthpop nippon légendaire au pays du Soleil levant, et les clichés qui entoure la musique japonaise en Occident. Après le compositeur, Antoine se tourne vers un nouveau groupe peu connu du grand public. « Les Européens possède des images sonores de la musique japonaise. De ce fait, elle nous est assez naturelle. »

Peu connus en France, Haruomi Hosono, Yukihiro Takahashi et Ryuichi Sakamoto sont considérés comme des demi-dieux au Japon. Que l’on aime ou pas, leur musique fait partie de l’inconscient culturel japonais. « Mes recherches m’ont amené à découvrir ce trio très connu quand on a une activité de recherche musicale », explique-t-il. « Les trois musiciens sont à l’origine d’énormément de styles de musique électronique, mais aussi dans la musique à l’image ou dans le cinéma. David Bowie et Ryuichi Sakamoto ont réalisé Merry Christmas Mister Lawrence. Dans un autre registre, les Daft Punk se sont clairement penchés sur la musique japonaise. » À l’écoute, l’influence de la musique japonaise se ressent dans les compositions du duo français plus que dans celles du chanteur anglais, plus subtiles.

Déjà très présente dans le travail du claveciniste, la musique nipponne, aux sonorités singulières, et caractéristique de la culture musicale au Japon, s’est imposée d’elle-même pour ce nouveau projet. Partant des clichés occidentaux, et s’amusant de la caricature, Yellow Magic Orchestra a créé une musique très électronique dont les tonalités ne sont pas sans rappeler le jeu vidéo. « Leur musique peut paraître raide, mais cache, selon moi, une immense grâce, une finesse et une préciosité autant dans les mélodies que dans le traitement des timbres. » Voulant extraire ce matériel et le transcrire avec un instrument à l’opposé, Antoine donne à entendre ce matériau musical de manière plus brute. « Le clavecin est un instrument acoustique en bois. Il est à l’opposé de tout ce déluge de matériel, de studio et de production. Contrairement au matériel du trio, c’est un instrument quasi archaïque dans son mode de production du son. Je trouvais intéressant de faire côtoyer ces deux mondes, soit disant opposés, mais au final pas tellement. »

« Je suis un obsédé de Maurice Ravel », s’amuse-t-il. « C’est un peu cliché mais tout est magnifique chez ce compositeur. J’ai énormément écouté Le Tombeau de Couperin, ce qui a forcément teinté ma musique. Je suis très loin d’être un de ses disciples, mais dans l’oreille, la pratique et la culture, Ravel m’a énormément inspiré. » Allant chercher du côté de la musique renaissance et néo-classique, le musicien explore plus loin la décontextualisation musicale, « en troublant les lignes de temps, mais aussi d’espace et de forme » et donne une tonalité cinématographique à ses compositions. « Je voulais une musique libre à écouter, pas trop chargée ou structurée, avec une certaine modestie des moyens et des formes dilatées. Mes morceaux sont de plus en plus tranquilles, aérés. J’avais tendance à jouer des morceaux assez vite, dans la technique, j’essaie autre chose maintenant. Ma musique convoque plus l’imagination. » Chacun se fait ainsi son tableau en développant des images mentales d’impression et des sensations visuelles propres à soi.

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L’idée d’un deuxième album court déjà dans l’esprit du claveciniste, même si elle n’est pour l’instant que flottante. « Le deuxième album sera de la musique moins pop dans le format, plus minimaliste, répétitive, suivre la carrière du trio original. Les premiers albums étaient très pop avant que les morceaux ne deviennent plus des productions de studio, de dance music. Le matériau mélodique était plus réduit avec un travail sur la boucle et la durée. »

Yellow Magic Harpichord, Antoine Souchav‘, Festival des Tombées de la Nuit

Dimanche 04 Juillet 2021 15:00 > 15:30 Hôtel Pasteur, Rennes

Dimanche 04 Juillet 2021 17:00 > 17:30 Hôtel Pasteur, Rennes

Gratuit • Sans réservation • Les portes ouvriront 30 minutes avant le début du spectacle. Tout public 60 places 

Lignes de Bus : Arrêt République • Vélo Star : Mairie, Musée Beaux-Arts Renseignements au 02 99 32 56 56

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