Habitué des ondes et maître de la plume, Ronan Manuel nous livre Au Contoir du presbytère, calembredaines et fariboles aux pays des curés. Inhabituelles, légères et témoins d’un patrimoine aujourd’hui quasi disparu, ces histoires se racontent, s’écrivent et se lisent avec ce regard qu’on aime à porter sur les vestiges de notre enfance. Une odeur de souvenirs presque oubliés, nostalgie d’un passé qu’on n’a pourtant peut-être pas connu, un livre qui se déguste comme du bon vin, parfois seul, mais aussi en bonne compagnie !

au contoir du presbytère
Ronan Manuel

Pendant une vingtaine d’années, c’est au micro de Radio France que Ronan Manuel aura conté certaines des calembredaines et fariboles relatées dans Au Contoir du Presbytère. Et c’est au micro de Radio Rennes depuis janvier 2020 qu’il continue à enchanter les auditeurs de ces récits tirés de jadis et des contrées reculées de la Bretagne, autour de l’émission Bon Vieux Temps. Passionné d’histoire et d’ethnomusicologie, il co-réalise des documentaires sur les traditions populaires.

Mais BonVieuxTemps c’est aussi le nom de la maison d’éditions qu’il a créé avec pour désir d’y publier plusieurs ouvrages dédiés aux chroniques de terroir du pays de la Guerche-de-Bretagne et à la mémoire des traditions populaires. C’est chez cette maison d’éditions, distribuée par Palémon Éditions, qu’il publie Au Contoir du Presbytère, calembredaines et fariboles aux pays des curés, en septembre 2021.

au contoir du presbytère

L’envie de Ronan Manuel n’est pas tant l’attrait d’une gloire certaine, mais le plaisir et le désir de répondre à la demande des nombreux auditeurs de Radio France et Radio Rennes qui souhaitent réécouter ces contes et calembredaines entendus sur les ondes. L’auteur se tourne assez naturellement vers la thématique des contes de curés de campagne, attiré par ce patrimoine presque tombé dans l’oubli.

Et c’est avec un savoureux néologisme linguistique, « clin d’œil parce que, au presbytère comme ailleurs, cela reste le lien social… », que les contes prennent vie, « des histoires qui ne sont bien-sûr que pures vérités. Car je suis menteur autant que je suis voleur », déclare l’auteur.

Mais détrompez-vous, il ne s’agit nullement d’un simple capharnaüm de contes tirés de vieux bouquins poussiéreux ou collectés auprès de grands-mères. Des contes recueillis il y en a trois ou quatre, et le reste ? Des souvenirs d’enfance, des galéjades de chauffeurs de taxi, des histoires racontées au coin du feu, les comptoirs des bistrots, véritable source de propos frivoles, ou bien encore des anecdotes de la presse de début du siècle, du temps où internet n’existait pas et n’aurait pu faire la gloire de ces incidents savoureux. Le tout remanié à la sauce Ronan Manuel, pleine de verve et de propos extravagants.

Et c’est ainsi que s’ouvre Au Contoir du presbytère. Le héros du premier récit ? Rien qu’un bonhomme Michelin gonflé à l’hydrogène, un fameux Bibendum coincé aux cimes d’un arbre, terrorisant les bons chrétiens et férus d’autres diableries. Une histoire courte sauvée in extremis par l’exorcisme proprement appliqué par monsieur le curé de Guipavas.

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Ronan-Jim Sévellec, Les cailloux de Séraphine

Et le récit se poursuit au fil des pages rythmé d’une écriture musicale où les mots se choquent et s’entrechoquent et se répondent tels les servants et les fidèles dans le chœur d’une église. Calembredaines, fariboles et autres propos frivoles ou plaisanteries futiles s’enchaînent et se déchaînent pour une lecture plaisante. « Comme j’aime la musicalité des mots et des phrases je me suis esquinté, mais ce fut un plaisir) à faire en sorte que les phrases swinguent un tant soit peu, qu’on ait envie de lire ces textes à voix haute. »

«  Il faut lire son recueil à haute voix, tant ses phrases ont une légèreté musicale très jazzie, à la fois rythmée et rimée », commentait à propos Jean Bothorel, Journaliste, écrivain In Le Télégramme.

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Ronan-Jim Sévellec, Le tour de lit

Les éléments de narrations : petites paroisses et braves gens, des curés comme on en fait des bons et des mauvais, quelques sacristains benêts ou rusés et dont l’audace ou la couardise font sourire franchement. Une aisance verbale et une plume acérée qui n’épargne ni marauds ni curés. Au total, 28 histoires, de taille relativement courte, puisent dans le bref pour créer du dynamisme. Car il ne faudrait point s’endormir, il ne s’agit pas de  » contines « , mais de récits plaisants qui rappellent les histoires de jadis et des campagnes où même le clergé transmettait par tradition orale, non pas la Bible (peu s’en faut) mais de petits fabliaux salaces :

« En ce temps où il n’est plus de bon ton d’être catholique, je trouvais intéressant de parler de curés sur un ton joyeux et badin, et certainement pas sacrilège ni offensant. Il est bon de rappeler que les réunions entre moines ou abbés, sans aller jusqu’à l’ambiance d’un corps de garde, n’étaient tout de même pas des discussions pudiques et coincées. Entre hommes, et certainement entre femmes, on se laisse toujours aller à la grivoiserie et la tradition, et les chansons populaires justement, nous montrent combien les gens de Dieu aimaient cela ! Je connais aujourd’hui des catholiques très fervents qui ont un bel humour paillard au fond de leur missel ! »

« La chandelle et la pucelle » et « L’abbé sans vanité », les deux histoires les plus courtes du recueil, attestent de la véracité des ces récits licencieux colportés par le milieu monacal. Ronan Manuel n’a rien inventé, mais remanié des écrits en vieux françois du XVIe et XVIIe siècles. Quant au contenu, le plaisir en est laissé au lecteur qui saura en apprécier la légèreté du ton.

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Perrine était servante

C’est sur ces notes légères et grivoises que le lecteur découvre les mésaventures de Gus Madec et de ses tomates, du tartuffe nommé Gaulin, la quête de l’abbé Savina et bien d’autres encore. De cadre chronologique il n’y en a pas. On se plairait à imaginer le récit au XIXe ou au XXe siècle, histoire des temps jadis miraculeusement ressuscitée sous la plume habile de l’auteur. C’est sans compter sur le plaisir malin que prend Ronan Manuel à jouer avec nos esprits. Que de surprise quand un déstabilisant mot sorti tout droit de la culture moderne surgit au beau milieu d’une histoire de curés et de grands-messes. « D’un texto rageur, Gus Madec convoquait donc aussitôt le bedeau dans l’heure. »

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Jim Sévellec, Le presbytère de Trébabu

Il ne faudrait pas oublier de mentionner les illustrations du livre aussi sobres qu’efficaces. Sur la première de couverture, le joli presbytère de Trébabu, œuvre du peintre Jim Sévellec, grand-père de notredit auteur, peinture accrochée au mur et attendant patiemment sa part dans cette affaire. Les illustrations des 28 récits sont quant à elles du fils de Jim Sévellec et parrain de Ronan Manuel : Ronan-Jim Sévellec. Pourquoi puiser ailleurs quand on possède un tel patrimoine familial pour illustrer ces fariboles ?

Ronan Manuel compte publier au printemps les Mémoires d’un jardinier, écrite cette fois-ci par un personnage célèbre des habitants de Guerche-de-Bretagne, un vieux propriétaire d’une modeste boutique de jardinerie. Ses mémoires, écrites dans un style rythmé et original, ont conquis le journaliste qui les publiera aux éditions du BonVieuxTemps. De même, la publication des Mémoires d’un très célèbre sonneur de Bretagne est prévue ainsi qu’un essai de notre cher journaliste sur le mouvement folk dans la région parisienne. Sans oublier de mentionner Au contoir du zinc qui devrait peut-être voir le jour à la rentrée prochaine. Une maison d’éditions encore au stade de jeune pousse mais qui promet de ravir une nouvelle fois ses lecteurs de ses joyeusetés et boutades tout droit sorties des mémoires et traditions orales.

« Un régal. Un petit livre succulent. Des clins d’œil un peu partout, des phrases brassensophiles, de l’humour et de la tendre nostalgie, un plaisir de dérouler en harmonie des images porteuses du temps jadis. Ça se lit comme on prend un apéritif, c’est à dire qu’à la fin du verre on regrette déjà qu’il soit vide, et on a envie de rappeler le garçon,  » Garçon, un autre svp  » ! » Jean Marc Derouen, conteur, écrivain

Un nouveau tirage du livre s’effectue actuellement et Au Contoir du presbytère sera de nouveau disponible très bientôt. Si Ronan Manuel a couché ces histoires sur le papier c’est d’abord par plaisir, un plaisir partagé aujourd’hui avec 432 heureux acquéreurs et bientôt plus nous lui souhaitons !

Au Contoir du Presbytère, Calembredaines et fariboles aux pays des curés, de Ronan Manuel, Éditions BonVieuxTemps.

115 pages, illustrations de Ronan-Jim Sévellec

12€ en librairie.

Distribué par Palémon Editions.

Et par correspondance à 15 euros (frais de port compris) – commande à BonVieuxTemps Editions, 7, La Blanchère 35240 Retiers

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