En acteur consommé Marc Feldman, l’administrateur général de l’OSB arrivait sur scène avec des airs de contritions qui n’auguraient rien de bon. Quelques secondes plus tard, consternation et étonnement s’abattaient sur le nombreux public qui s’était rendu à cette invitation pianistique. Alexandre Tharaud souffrant, avait du se rendre d’urgence à l’hôpital de Rennes (OOOHHH!, il était remplacé au pied levé par François Dumont, (AAAHHH!). Si en un instant tout paraissait rentré dans l’ordre, pour autant l’affaire n’était pas gagnée.

 

Grant Llewellyn, soucieux de rassurer son public, développait alors des trésors de charmes et se transformait en professeur, apportant à ses élèves d’intéressantes , voir de divertissantes informations. Etienne-Nicolas Méhul [1763-1817] ouvre le bal avec l’ouverture de son opéra « La chasse du jeune Henri ». Il nous entraîne dans une musique qui combine avec adresse énergie et légèreté. Ses mélodies contrastées et enlevées nous renvoient dans le monde de Gluck ou de Chérubini qui furent d’ailleurs ses contemporains.

Après cette excellente mise en bouche et afin de ne pas laisser son monde trop cogiter, notre chef provoque un peu d’étonnement en faisant exécuter en second morceau, le divertimento en ré majeur K136 de Mozart, mais, sans chef présent sur scène et musiciens debout, ainsi que cela se pratiquait à l’époque. Le résultat n’est pas déplaisant et le placement des violons de part et d’autre de la scène crée des effets stéréo avant l’heure. Lancée vigoureusement par Anatoli Karaev [violon] et Nicolaï Tsygankov [violon], la mélodie est reprise par l’ensemble des violons puis accompagnée des notes graves des altos et des violoncelles. On y retrouve tout l’art délicat, mais volontaire de Mozart. Il nous surprend par ses tournures italiennes et l’inspiration puisée dans d’autres divertimentos, ceux de Joseph Haydn [1732-1809].

C’est d’ailleurs Joseph Haydn et sa symphonie 104 en ré majeur « Londres », qui contribueront à maintenir le public en haleine. Entamée dans une élégante gravité, elle évoque immédiatement la danse, mais une de ces danses anciennes et compassées à l’occasion desquelles sont échangées de désuètes révérences. Il y a bien quelques tentatives de l’orchestre pour se faire entendre en proposant une pâte musicale ample et souriante, mais la danse reprend vite ses droits. À leur tour les bois semblent vouloir prendre la main, mais tout aussi vite rappelés à l’ordre ils obéissent à l’autoritaire injonction de la flûte.

C’est alors que François Dumont, est présenté par Grant Llewelyn, de la façon la plus originale qui nous ait été proposée depuis longtemps : « François Dumont est là depuis sept heures, mais je ne l’ai pas vu, c’est la soirée des “drama”. Ponctuée par un éclat de rire général, cette introduction n’en était pas moins très attendue, et c’est dans un silence reconnaissant que notre pianiste s’assied devant son instrument.

Quel choc ! Il ne lui aura pas fallu plus de quelques mesures pour faire oublier que c’était un autre que beaucoup étaient venus entendre. Monsieur Dumont nous a offert le plus gracieux et le plus élégant concerto Italien de Bach qu’on puisse souhaiter. Interprétant à la perfection le sautillant et rafraîchissant premier mouvement, il nous a mis à la torture par l’absolue beauté de sa vision du second mouvement, plein d’intériorité, où il semble que chaque note doive être détachée parce qu’elle a une importance essentielle.Le troisième mouvement joyeux et contrapuntique mettra fin à cette méditation, à ce voyage intérieur auquel nous étions conviés.

C’est un retour à Mozart qui nous est proposé avec la sonate K310 en la mineur. Écrite en un moment difficile pour le jeune musicien, elle est marquée par la mort de sa mère ce qui lui confère une tonalité particulière. Mais comme l’avait annoncé François Dumont, force nous est de constater qu’elle sonne de façon étonnamment beethovénienne. D’ailleurs, si une audition “à l’aveugle” avait été organisée, plus d’un, se piquant d’être mélomane s’y serait fait attraper.

Après le départ de notre pianiste, aussi précipité que son arrivée, c’est à une chasse avec Henry IV que nous convie Grant Llewellyn. Pour notre plus grand plaisir, ce sont les vents qui sont mis en évidence. Après l’appel du basson, ce sont les cors qui répondent, invitant les chasseurs à la curée, les mélodies se croisent et on ne peut s’empêcher de penser à la quatrième symphonie de Anton Bruckner qui reprend ses effets avec la même intensité. C’est à nouveau avec Joseph Haydn qu’il va falloir songer à se séparer. Dernière symphonie écrite par le prolixe musicien, elle porte le numéro 104. Elle nous est présentée comme l’heureux mariage de l’inspiration paysanne et de celle des palais. C’est une appréciation plutôt juste et cette musique heureuse et sans fard serait digne de figurer dans une des scènes du mariage de Figaro.

Cela aurait pu être une Bérézina, mais par la volonté des musiciens, de leur chef, de leur administrateur, nous avons vécu un très beau concert plein de rebondissements, de surprises et bien sûr d’émotion. Toutefois, si une personne devait être plus que les autres encensées, ce serait bien sûr François Dumont. Au-delà de l’excellence de son travail, digne de tous les éloges, il a répondu présent dans un vrai moment de difficulté, ce n’est pas qu’à Marc Feldmann qu’il a rendu service, c’est à toute une communauté musicale et à un public qu’il n’a pas voulu laisser tomber. Un grand merci est le moindre des mots que nous souhaitons lui adresser.

 

Carte blanche à Alexandre Tharaud, OSB, une soirée chez Beethoven, Essentiels #7

 

Programme et dates des Essentiels #8:

Wolfgang Amadeus Mozart
Concerto pour piano n°17 en sol majeur, K. 453

Wolfgang Amadeus Mozart
Concerto pour piano n°23 en la majeur, K. 488

Wolfgang Amadeus Mozart
Ch’io mi scordi di te – non temer, K. 505

JEUDI 25 FÉVRIER 2016
Mozart le Magnifique de 20h00 à 22h00
Rennes / Opéra

Après le concert, autour d’un cocktail, l’OSB vous propose d’échanger avec les artistes lors d’un moment privilégié. Offre réservée aux membres des cercles Symphonia et Concerto. Sur réservation, pour le 18 février 2016 au plus tard, auprès de relationspubliques@o-s-b.fr

VENDREDI 26 FÉVRIER 2016
Mozart le Magnifique de 20h00 à 22h00
Rennes / Opéra
SAMEDI 27 FÉVRIER 2016
Mozart le Magnifique de 20h30 à 22h30
Plancoët / Solenval

Thierry Martin
thierry.martin [@] unidivers .fr

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