C’est avec la création du spectacle d’art butô UTT en 1981 que la danseuse et chorégraphe Carlotta Ikeda sera reconnue et imposera son art en Europe. Le butô libre révèle la force et la pertinence d’une alchimie créatrice mêlant antiques croyances spirituelles et modernité. Des caractéristiques loin d’être épuisées comme l’a démontré la représentation récente de UTT à La Passerelle de Saint-Brieuc.

 

danse butô UTTSi Carlotta Ikeda n’est plus (la créatrice s’est éteinte à Bordeaux en 2014) son art est plus que jamais vivant. La transmission est assurée comme dans les plus vénérables traditions. La compagnie ARIADONE (exclusivement féminine), créée en 1974 avec Kô Murobushi (le chorégraphe du spectacle butô UTT), perpétue le travail créatif de celle qui fut l’une des pionnières à l’origine de la découverte de la danse butô en Europe. C’est à la danseuse Maï Ishiwata que Carlotta Ikeda a transmis le spectacle UTT. Pièce exigeante, pleine de tensions, de contorsions et de métamorphoses. Voyage initiatique en spirale, UTT évoque la vie de l’être, ses mutations, ses états multiples. La naissance et la mort sont représentées certes, mais également les renaissances possibles, l’animalité totémique, les tourments comme la grande paix.

butô UTTTout en contorsions, en soubresauts et tressaillements, la danseuse se fait mime. Avec une lenteur altière, elle égrène les mouvements syllabiques de ce langage brut et mystérieux. Appelé par certains « danse du corps obscur », le butô de Murobushi et Ikeda mérite bien cette étiquette. Introspection des strates les plus profondes de l’être, UTT en délivre l’essence en sculptant la matière en présence. Toute la matière, le corps de la danseuse bien sûr, mais son visage aussi ou, plutôt, son masque. Le maquillage blanc, élément codifié dans le butô, rappelle les masques du théâtre traditionnel japonais, nô ou kabuki ; seulement ici le masque, bien qu’impersonnel, s’anime.

butô UTTMimiques, grimaces simiesques, expressions appuyées jusqu’à l’absurde créées l’ambivalence, un écho contradictoire ou un renforcement des mouvements du corps. Mais surtout, UTT ne joue pas l’ascétisme minimaliste d’un certain butô qui confine à l’absurde. Et la sculpture de la matière étreint le spectacle dans son entier. Les lumières, d’une grande précision, sont magistralement composées. En sus, le dispositif scénique et la partition sonore (d’Osamu Goto) participent de la fascination onirique qu’opère ce toujours intriguant ballet symbolique. La transmission a du bon, car ce spectacle d’avant-garde, 36 ans après sa création, interroge, émeut et étonne toujours.

Spectacle d’art et de danse Butô UTT, création chorégraphique de Carlotta Ikeda, a été représenté le mardi 7 février 2017 à La Passerelle scène nationale de Saint-Brieuc

Prochaines représentations :
UTT à Châteauroux – le 9 février 2017 – Équinoxe, Scène Nationale
UTT à Pully – le 17 février 2017 – Octogone

DISTRIBUTION
Transmission : Carlotta Ikeda
Chorégraphie : Ko Murobushi
Danseuse : Maï Ishiwata
Collaboratrice artistique :Yumi Fujitani
Musique : Osamu Goto
Lumières : Eric Blosse ou José Victorien (en alternance)
(d’après une idée originale d’Éric Lousteau-Carrere)
Régie générale : Laurent Rieuf
Régie son : Kevin Grin
Diffusion : Audrey Chazelle
Photos : Frédéric Desmesure

Coproduction:
GLOB THÉÂTRE (Bordeaux)
2014 IDDAC (Agence Culturelle de la Gironde)
OARA (Office Artistique de la Région Aquitaine)
LE CUVIER – CDC D’AQUITAINE
ONDA (Office Nationale de Diffusion Artistique)

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Thierry Jolif
La culture est une guerre contre le nivellement universel que représente la mort (P. Florensky) Journaliste, essayiste, musicien, a entre autres collaboré avec Alan Stivell à l'ouvrage "Sur la route des plus belles légendes celtes" (Arthaud, 2013) thierry.jolif [@] unidivers .fr

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