Petites Luxures : la caresse du trait ou dix ans d’érotisme minimaliste

petites luxures

En mai 2025, In Fine Éditions d’art publie Petites Luxures 10 ans !, un ouvrage magistral réunissant dix années de création de Simon Frankart, alias Petites Luxures. Ce somptueux volume de 304 pages scelle l’œuvre d’un artiste qui, à force de subtilité et d’élégance, a redéfini les contours contemporains de l’érotisme visuel. À travers son dessin minimaliste, Simon Frankart oppose à la saturation pornographique de notre époque une esthétique du murmure et du frôlement. Ce livre, recueil d’instants suspendus et de lignes frémissantes, est bien plus qu’un simple artbook : c’est un manifeste silencieux d’une sensualité retrouvée.

Petites Luxures : une révolution feutrée

Lorsque Simon Frankart lance Petites Luxures sur Instagram (il compte aujourd’hui + de 1M d’abonnés), il ne cherche pas à choquer ni à provoquer. Il esquisse. Il insinue. En quelques traits d’encre noire, il invente un nouveau langage érotique : pudique sans être prude, explicite sans être cru. Le projet séduit immédiatement. Là où d’autres saturent les réseaux sociaux d’images voyeuristes, Frankart propose des bulles d’intimité. Le succès de Petites Luxures tient dans cette capacité rare à s’adresser au spectateur avec délicatesse. Chaque illustration semble chuchoter, laissant des espaces vides pour que le regard les habite, pour que le désir circule librement. Le choix du minimalisme n’est pas un simple effet de style : il devient la condition même de l’érotisme. Le corps n’est pas exposé ; il est évoqué, imaginé, désiré.

L’encre du désir

Le trait de Frankart est d’une pureté saisissante. Fine, souple, presque fragile, sa ligne possède une tension intérieure qui rappelle les œuvres de grands maîtres du minimalisme graphique, comme Sempé ou Cocteau. Chaque courbe respire. Chaque espace blanc vibre. À travers ce vocabulaire réduit à l’essentiel, Simon Frankart fait surgir la sensualité des postures, la complicité des gestes, l’ivresse des frôlements. Jamais de lourdeur anatomique ; rarement même un visage entier. L’érotisme naît d’un cou découvert, d’une main égarée, d’un soupir esquissé par une courbe. Dans Petites Luxures 10 ans, cette économie de moyens se déploie sur 304 pages avec une richesse émotionnelle étonnante : chaque dessin est un poème visuel, une invitation à compléter l’histoire avec ses propres souvenirs, ses propres désirs.

L’érotisme mémoire et récit

Au-delà de la représentation du désir, Petites Luxures explore les territoires de la mémoire. Cette démarche est particulièrement visible dans l’ouvrage En Premier Lieu (Gallimard, 2024), où Frankart illustre les témoignages de 50 hommes et femmes racontant leur « première fois ».

Dans cet entrelacement entre parole intime et dessin évocateur, Simon Frankart fait apparaître l’érotisme comme un phénomène avant tout narratif. Il n’est pas seulement dans l’instant du plaisir, mais dans la rémanence des lieux, des gestes, des émotions premières.

Simon Frankart
Simon Frankart

Ainsi, Petites Luxures dépasse la simple illustration pour devenir une sorte d’archéologie du désir : chaque trait exhume une sensation oubliée, une émotion enfouie. Le regard du spectateur n’est pas seulement convoqué ; sa mémoire aussi.

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Le jeu de mots comme cartel érotique

Les illustrations sont très souvent accompagnée d’une légende courte et doublement signifiante. Jeu de mots facile d’accès, il tisse pour autant un lien secret entre image et langage, entre regard et esprit. Le mot devient ici un clin d’œil complice au désir sous forme d’un sourire intérieur du spectateur. À travers cette mécanique du double-sens, Simon Frankart rappelle que l’érotisme véritable n’est pas un assaut frontal, mais une danse de l’esprit : un espace où l’imaginaire, l’humour et la sensualité se répondent en échos légers. Ces cartels textuels fonctionnent alors comme autant de petits pièges de tendresse tendus à celui qui regarde, l’invitant à lire entre les lignes comme on déshabille lentement un secret.

Le livre-objet écrin sensuel

La matérialité de Petites Luxures 10 ans participe pleinement de l’expérience sensorielle. Le format cossu (23 x 30 cm), la couverture de velours rouge, le grain du papier épais : tout dans cet ouvrage invite au toucher autant qu’à la contemplation. C’est un livre que l’on caresse presque autant que l’on feuillette. Chaque page, soigneusement mise en espace, permet aux dessins de respirer. L’absence de surcharge éditoriale (peu de textes, pas de fioritures inutiles) respecte l’esprit du projet : donner au silence, au blanc, au vide, leur pleine puissance érotique. Il s’agit aussi d’un objet de collection : certains packs proposés incluent un tirage A4 « mystère », prolongeant l’expérience d’une intimité unique entre l’artiste et le collectionneur.

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Petites Luxures, dialogue artistique contemporain

Dans un monde où l’image érotique est souvent brutalisée, consumée, où la nudité est surexploitée et vidée de sa charge poétique, Simon Frankart offre une alternative salutaire. Il réaffirme que l’érotisme est affaire de suggestion, d’attention, de lenteur. Par cette exigence esthétique, il rejoint une tradition ancienne : celle du shunga japonais, des esquisses libertines du XVIIIe siècle français, des aphorismes amoureux. Il rappelle aussi que l’acte érotique est d’abord un dialogue entre deux imaginaires. Son œuvre, à la fois populaire et profondément sophistiquée, s’inscrit ainsi dans une forme de résistance douce : contre la vulgarité des représentations rapides, contre l’effacement du mystère dans la communication numérique.

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Petites Luxures 10 ans n’est pas seulement un livre d’images ; c’est un manifeste pour une érotique de la finesse, une ode au pouvoir du trait, du silence et du désir partagé. Simon Frankart y poursuit avec une constance remarquable une quête rare : celle de capturer l’intensité du sensible dans l’épure du dessin. Dans ces pages, le lecteur ne trouve pas seulement des corps, mais des absences fécondes, des soupirs contenus, des désirs frémissants… … … 

Unidivers – Simon Frankart, pourquoi nommez votre travail : Luxure, petit précis d’élégance « pornographique » et non « érotique » ?

Simon Frankart – Ce projet ayant été improvisé sur un coup de tête, je ne peux désormais que « post-rationnaliser » les créations du début qui n’avaient pas du tout été théorisées ni même vues comme la partie d’un tout plus global. Comme vous le relevez en effet, le terme « pornographique » englobe beaucoup de points problématiques qui je l’espère sont à l’opposé des valeurs que je cherche à transmettre avec les dessins de Petites Luxures. Je pense qu’au départ j’avais utilisé ce terme assez extrême pour augmenter le contraste avec le mot « élégance ». A mon sens le mot « érotique » était trop léger pour ce que je cherchais à faire : montrer des scènes parfois très explicites de sexualité, mais en cherchant à les traîter de façon élégante et « innoffensive ». Là où la notion habituelle d’érotisme se contente de montrer un bout de cuisse ou le galbe d’un sein. Mais je préfère désormais l’expression « dessin d’intimité », car pour moi la notion d’intime permet de montrer des scènes très explicites, qui peuvent soudain devenir tendres car montrées du point de vue de la « vraie vie », des rapports entre de vraies personnes, loin de la mise en scène des plateaux de tournage.

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Unidivers – Il semble qu’il y a un lien subtil et profond entre votre travail et la conception de la pornographie telle que pensée par Witold Gombrowicz – notamment dans ses essais (Journal, Contre les poètes, Bakakaj), où il aborde le sexe sous l’angle de l’immaturité, du désir informe, et de l’impossibilité de représentation pleine, et où il déploie une critique de la pornographie frontale car le sexe est moins une « prise » qu’une danse hésitante, une comédie poignante de nos fragilités. Qu’en pensez-vous ?

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Simon Frankart – J’avoue que je ne connaissais pas les écrits de cet écrivain Polonais, mais je pense que ma recherche de non-théorisation de mes créations est justement un signe de mon envie de représenter le sexe sous le jour du désir naturel, instictif et non réfléchi. Je le rejoins totalement sur l’aspect de comédie, d’hésitation et de fragilité, car selon moi la sexualité nécessite de se mettre complètement à nu (au sens propre comme au figuré) face à l’autre.

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  • Titre complet : Petites Luxures 10 ans !
  • Auteur : Simon Frankart (alias Petites Luxures)
  • Éditeur : In Fine Éditions d’art
  • Date de parution : 14 mai 2025
  • Format : Relié
  • Nombre de pages : 304
  • Dimensions : 23 x 30 cm
  • ISBN : 978-2-38203-230-5
  • Prix public : 70,00 €

Édition spéciale

Une édition spéciale est également proposée par la boutique Un Jour Une Illustration, comprenant :​ Prix : 120,00 €​ Le livre Petites Luxures 10 ans Un tirage A4 mystère signé par l’artiste.

Eudoxie Trofimenko
Et par le pouvoir d’un mot Je recommence ma vie Je suis né pour te connaître Pour te nommer Liberté. Gloire à l'Ukraine ! Vive la France ! Vive l'Europe démocratique et humaniste !