Composé de huit nouvelles, Viet Thanh Nguyen nous fait voyager au coeur des migrations entre Vietnam et États-Unis dans son dernier roman Les Réfugiés.

 

Les réfugiés

Huit nouvelles choc que nous offre cet écrivain remarquable natif du Vietnam et qui compte, avec ses aïeuls, parmi les réfugiés auxquels il fait référence de manière subtile et détournée. Huit nouvelles dans lesquelles il nous narre les aventures tantôt d’Américains rentrés du Vietnam, chargés d’émotions, de gloire en trompe-l’oeil ou de souvenirs douloureux comme exotiques ; tantôt de Vietnamiens, soit restés là-bas, dans l’ancien Saïgon devenu aujourd’hui Hô Chi Minh, non par choix, mais par nécessité, sinon par la volonté féroce des communistes qui y mènent toujours un régime autoritaire, soit immigrés aux USA.

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Hô-Chi-Minh-Ville, bâtiment du comité populaire. Photo par Jean-Pierre Dalbéra.

Des scènes quotidiennes, des histoires singulières qui permettent de croiser ces deux cultures totalement opposées et parfois si semblables dans leurs excès. Les USA d’une part, enferrés dans un capitalisme débridé qui sacrifient chaque jour quantité de vies au seul profit de l’argent, un pays des plus provocateurs dans son hégémonie et sa propension permanente à l’ingérence dans les politiques des autres pays du monde ; d’autre part, un Vietnam attachant s’il respectait les droits de l’homme et s’ouvrait au monde, et pas seulement en matière de commerce mais aussi d’éducation et d’échanges. Et même si les choses évoluent, elles peinent encore un peu trop au goût des propres Vietnamiens qui vivent sur place. Le communisme n’a rien d’une sinécure, cela se saurait et tant de gens ne souhaiteraient pas y échapper…

Mais existe-t-il un monde parfait ? Probablement pas. Rien ne justifie cependant que l’on fasse du passage si bref sur la Terre un enfer pour les uns comme les autres. Viet Thanh Nguyen conte donc avec un brio indéniable, dans une limpidité, une clarté saisissante, des vies de rien, mais surtout des vies de tout et de tous. Les personnages nous paraissent si familiers qu’on aimerait bientôt les rencontrer, qu’ils vivent en Occident comme en Orient. L’auteur s’amuse, en grimaçant, des traditions, des jeux érotiques, des relations amoureuses, des espoirs souvent défunts. Et quand il jongle avec les couleurs comme les parfums, les étoffes et les corps, on exulte.

Magnifique et raffiné, on en souhaiterait davantage…

Les RéfugiésViet Thanh Nguyen – Éditions Belfond – 216 pages. Traduit de l’américain par Clément Baude. Parution : août 2019. 20,00 €.

 

Viet Thanh Nguyen
Viet Thanh Nguyen. Photo par BeBe Jacob.

 

Viet Thanh Nguyen est né au Vietnam en 1971. Après la chute de Saïgon, il fuit le pays avec toute sa famille et rejoint les Etats-Unis. D’abord réfugiés dans un camp en Pennsylvanie, les Nguyen s’établissent en Californie.
Le Sympathisant (Belfond 2017 ; 10/18, 2018), son premier roman, s’impose dès sa sortie comme un immense succès critique et commercial, finaliste des plus grands prix littéraires et consacré par le prix Pulitzer, le prix du Meilleur livre étranger, et le Translation Prize. Diplômé de Berkley, Viet Thanh Nguyen est professeur à l’université South California, à Los Angeles.

Site de Viet Thanh Nguyen

Christophe Maris
Christophe Maris est journaliste et écrivain, agrégé de Lettres modernes. Il collabore à plusieurs émissions de TV et radio et conçoit des magazines pour l'enseignement où il a oeuvré une quinzaine d'années en qualité de professeur de lettres, d'histoire et de communication.

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