Les Rencontres Paul Ricoeur se déroulent aux Champs Libres ces 17 et 18 novembre. Elles s’articulent autour du thème de la fragilité humaine. Olivier Mongin, philosophe, essayiste et ancien directeur de la revue Esprit, développera une conférence consacrée à la fragilité des institutions politiques vendredi 18 novembre à 14h00. Il actualisera quelques-uns des concepts du philosophe Paul Ricoeur afin d’analyser un contexte politique contemporain instable. Avant-goût.

La fragilité est constitutive de notre humanité, elle devient même un principe éthique qui fonde l’agir dans plusieurs domaines. Le fragile est la marque de notre condition humaine. Pour qualifier le fragile, Paul Ricœur le distingue du tragique qui évoque une situation où l’homme prend conscience d’un destin qui pèse sur sa vie et sur l’humanité. Confronté au tragique, nous ne pouvons rien faire, nous n’avons qu’à subir. Il n’en va pas de même de la vulnérabilité. La fragilité s’inscrit alors dans la pensée politique.

Paul Ricoeur
Paul Ricoeur (d. r.)

La philosophie politique est une thématique qui jalonne le travail de Ricoeur, « un fil conducteur de son travail », explique Olivier Mongin. À l’occasion des Rencontres Paul Ricoeur, l’ancien directeur de la revue Esprit aborde la fragilité des institutions politiques. Cette « fragilité » évoqué dans l’intitulé de la conférence s’inscrit dans un contexte. Ce contexte, Olivier Mongin le décline en trois versants.

Tout d’abord, « une remise en cause des institutions politiques dans leur ensemble » qui se traduit par « un désaveu du politique représentatif » et se cristallise en un fort taux d’abstention. Ensuite, notre « époque se voit marquée par les impératifs écologiques et par la guerre derrière laquelle la menace nucléaire est brandit par Poutine ». Enfin, « la Révolution numérique » achève de soulever des questions nouvelles, qu’elles soient éthiques ou politiques. Tous ces éléments sont interconnectés, constituent la toile de fond de la réflexion d’Olivier Mongin et révèlent en creux une fragilité institutionnelle.

Dans un contexte global fragile et incertain, le plus grand danger auquel pourrait s’exposer les sociétés serait celui de l’émergence d’un despote. Ricoeur témoigne en son temps de ce même risque « au moment de l’invasion de la Tchécoslovaquie par l’URSS, on était en 1956 et non pas en 2022 lors de l’invasion Russe en Ukraine ». Au regard de la possibilité d’une bascule autoritaire, Ricoeur met en avant un outil réflexif appelé « le paradoxe du politique » qui stipule que « le plus grand bien, c’est-à-dire la volonté de se rassembler et de vivre ensemble, peut être mis en cause par le plus grand mal. Ce plus grand mal est la domination d’un pouvoir qui essaierait de capter le vivre ensemble sur le mode de la guerre ». Rassembler les populations en créant une cohésion par la guerre.

Olivier Mongin
Olivier Mongin

« Selon Ricoeur, la politique n’est pas tant liée au fait d’avoir des opinions mais résulte de la capacité que nous avons d’argumenter ensemble c’est-à-dire avoir un langage commun qui nous permet d’être en désaccord. » – Olivier Mongin

A partir de là, il est possible de se poser la question de ce qu’est le pouvoir et de sa bonne mise en œuvre. Olivier Mongin rappelle que « Ricoeur réfléchit un pouvoir qui est porté par une communauté historique, un pouvoir démocratique dans son sens le plus strict : c’est-à-dire porté par la population et non pas par l’Etat lui-même ». Mais alors si ce pouvoir revient au peuple, quelles sont les forces autoritaires qui pourraient en résulter autre que la domination d’une force politique écrasante ?  Au coeur de cette interrogation, Olivier Mongin se convoque cette nécessité de mettre en place un dialogue, une discussion collective, un espace public qui permettrait de partager et confronter les opinions respectifs.

Olivier Mongin nous invite à suivre d’une manière lumineuse les pistes réflexives du philosophe Ricoeur qui trouvent une résonance toujours aussi pertinente dans une actualité instable où se profilent une nouvelle polarisation du monde entre démocratie libérale et dictature conservatrice.

Conférence : Fragilité des institutions politique, Olivier Mongin, vendredi 18 novembre 14H00 au Champs Libres

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