Ancien maire de Langoëlan et premier adjoint depuis 2020, Yann Jondot et son fauteuil roulant sont les ambassadeurs de l’accessibilité. Ce combat, Yann Jondot le porte désormais à l’échelon national. Il est devenu l’ambassadeur des ambassadeurs puisqu’il coordonne les actions de jeunes gens qui, bénévoles en service civique, œuvrent en faveur de l’accessibilité auprès de différentes communes. Ils sont une trentaine pour le moment, mais leur nombre ne cesse de croître.

Yann Jondot a d’abord visité une à une les 250 communes du Morbihan qui est championne nationale de l’accessibilité. 232 d’entre elles ont signé la charte de l’accessibilité. À chaque fois au cours de la visite, il appose, en accord avec les maires et les élus locaux, un logo qui définit le niveau d’accessibilité de la commune. Quand, en 2018, Yann Jondot est nommé ambassadeur de l’accessibilité par le gouvernement, il débute la poursuite de sa campagne au-delà des limites du Morbihan.

Yann Jondot handicap
Yann Jondot

Et, après la Bretagne, sa démarche prend une dimension nationale ! “Actuellement 500 communes françaises ont été visitées. Les prochaines rencontres se tiendront dans la région Hauts de France, la Bourgogne, la Vendée”, annonce et se réjouit Yann Jondot.

Retour sur le parcours d’un homme hors du commun ou Yann Jondot et l’accident qui va changer son destin

Yann est né à Pontivy (Morbihan) le 14 mars 1968. Ses parents sont restaurateurs. En 1978, la famille de 6 enfants s’installe à Langoëlan. Destiné à reprendre le restaurant de ses parents ou à devenir sapeur-pompier professionnel, le destin de Yann va basculer ! 

Il est victime d’un accident de la route en 1990, alors que son ami circule à moto et qu’il est son passager. À 22 ans, il devient paraplégique et passe un an dans un lit d’hôpital à Rennes. Après une difficile acceptation de plusieurs mois, Yann rebondit avec une envie de vivre et suit une rééducation intensive au centre de rééducation de Kerpape à Ploemeur (Morbihan). Il va vivre désormais en fauteuil roulant, mais il est entouré par sa famille et ses amis, soutenu également par Nelly qui deviendra son épouse.

Au fil des années, Yann Jondot construit sa famille avec sa femme et leurs trois enfants. Chaque jour, il se lève à 6 heures pour faire sa musculation et accomplir ses 7 à 8 km, car son corps ne doit pas trahir ses objectifs ni sa motivation ! Il se lance dans une carrière de sportif de haut niveau en tennis de table. Il devient champion du Morbihan en tennis de table handisport fauteuil, à Questembert (56) en 2015. Il passe également son diplôme d’entraîneur à Guémené-sur-Scorff (56) et devient éducateur sportif. Il coach notamment des séances de sport pour les sapeurs-pompiers. Sa volonté, notamment celle d’aider les autres, ne va pas s’arrêter en si bon chemin !

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Une carrière politique

En 2014, il brille à la mairie de Langoëlan, sa commune de résidence. Il devient le seul maire de l’Ouest en fauteuil. Son mandat sans étiquette est caractérisé par sa proximité, son écoute, sa rigueur, sa transparence et sa bonne humeur auprès des habitants. “J’ai tout eu à découvrir. Maire est un métier, une compétition de chaque jour!” Il allie les dossiers courants avec des projets innovants pour l’aide aux handicapés, comme la construction de maisons adaptées à deux pas de la mairie. Question handicap, Yann sait de quoi il parle ! Il garde en tête toutes les personnes qui comme lui vivent avec un handicap, qui peut aller de la tétraplégie aux travailleurs dans l’agroalimentaire qui souffrent du dos. “Tout le monde est concerné !” Yann Jondot prêche la bonne parole sur le handicap dans les écoles, les associations, partout où il est convié !

Aux élections municipales de 2020, il ne se représente pas “J’ai laissé le mandat de maire, car je devais réaliser une action chaque jour”, commente Yann encore aujourd’hui, car tous n’ont pas compris, nous dit-il ! C’était son choix, celui de se consacrer pleinement à l’accessibilité pour les personnes en situation de handicap. Il est cependant 1er adjoint chargé des travaux, de la voirie et de l’urbanisme aux côtés du maire Jean-Claude le Metayer.

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L’ascension du Kilimandjaro

Un jour, le maire de Langoëlan se rend à la préfecture pour récupérer des papiers. Il se trouve dans l’incapacité de franchir les portes du bâtiment, car celui-ci n’est pas accessible aux personnes à mobilité réduite. Yann Jondot élabore alors le projet “un sommet pour une rampe » avec pour objectif de démontrer qu’il est plus facile pour une personne en fauteuil roulant de gravir le Kilimandjaro plutôt que de monter les marches de sa préfecture. 

Yann Jondot handicap

Avec cette démarche, il espère alerter les pouvoirs publics sur la problématique de l’accessibilité des personnes en situation de handicap. Son expédition commence en octobre 2017. Il réussit à gravir le Kilimandjaro accompagné et porté sur une joëlette par 6 équipiers aidés par des Tanzaniens. Son exploit fait écho, et passe du sommet de l’Afrique au sommet de l’État ! son périple est relayé par France 3, qui réalise de l’aventure de Yann, un film documentaire : « Objectif Kilimandjaro : du sommet de l’Afrique au sommet de l’État » 

Yann Jondot rend compte de son projet à Gérard Larcher, président du sénat, après avoir remercié les 3 sénateurs du Morbihan : Muriel Jourda, Joël Labbé et Jacques Le Nay.

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Yann Jondot rend compte de son projet à Gérard Larcher, président du sénat, après avoir remercié les 3 sénateurs Muriel Jourda, Joël Labbé et Jacques Le Nay.

La charte d’accessibilité

En décembre 2017, Yann Jondot est reçu par Gérard Larcher au Sénat. Il lui confie la mission d’expérimenter ses actions de « bon sens » dans son département, le Morbihan. Cette action sera aussi soutenue par les 3 sénateurs du département.

En janvier 2018, le maire de Langoëlan est reçu par la secrétaire d’État aux personnes handicapées, Sophie Cluzel, qui le nomme Ambassadeur des ambassadeurs de l’accessibilité en soutenant l’expérimentation des actions de bon sens. Le Morbihan devient territoire expérimental.

Avec Sophie Cruzel

A partir de janvier 2018 Yann parcourt l’ensemble des communes morbihannaises. À chaque fois, il se présente aux élus avec un fauteuil roulant supplémentaire de manière à leur proposer de le tester, en se mettant dans la peau d’une personne handicapée. Les élus volontaires se rendent ainsi compte des difficultés que peuvent rencontrer les personnes handicapées quand elles sont face à un trottoir, à des escaliers, ou lorsqu’elles doivent ouvrir une porte ou appuyer sur un interrupteur lorsque ceux-ci ne sont pas à bonne hauteur. Ils constatent alors l’importance d’ascenseurs, de rampes pour les personnes à mobilité réduite ou  tout simplement pour les personnes  âgées, etc.

Yann Jondot handicap
Avec Anne-Sophie Cluzel

Yann réalise des actions de très grande proximité et fait signer 232  chartes d’accessibilité sur le département.

Les communes et Établissements Publics de Coopération intercommunale (EPCI) de Bretagne s’engagent alors dans une démarche de mise en accessibilité de tous les équipements publics par des mesures et moyens simples et concrets qui restent peu onéreux pour les communes : tout aménagement lié aux handicaps tels que des bandes de guidage, un marquage au sol, un système d’aide à l’audition, une rampe d’accès amovible mise à disposition par la mairie en cas de besoin, la pose d’une rampe d’appui fixe pour gravir quelques marches, etc.  

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La Bretagne devient une région expérimentale avec un objectif de généralisation à tout le territoire national, ceci dans un souci d’économie et de bien vivre ensemble dans les communes dans le cadre événementiel ou ponctuel, par exemple pour l’accès aux chapelles, aux pontons…

Après le passage de l’ambassadeur de l’accessibilité dans sa commune, une autoévaluation par le maire permet de visualiser le niveau d’adaptation de la commune (ABC) par la pose d’autocollants aux différentes entrées de l’agglomération.

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Après le Kilimandjaro, la Guyane et la forêt amazonienne

Cinq ans après l’ascension de la montagne de Tanzanie, Yann s’attèle à la promotion métropole et se prépare pendant 6 mois à la préparation essentielle de sa prochaine expédition : l’Amazonie, de la frontière brésilienne à celle du Surinam. Dans un premier temps, il doit s’habituer au climat, à la température et au relief, mais aussi se mettre en condition physique avant l’épreuve. Chaque jour du dernier semestre de 2021, il avale en fauteuil les kilomètres dans la campagne morbihannaise, fait des haltères et adapte sa nourriture.

Yann Jondot handicap

Le 31 janvier, c’est le départ pour 2 semaines avec une expédition d’une quarantaine de personnes. Yann arrive dans le village de Saül entouré par 300 km de forêt au centre du département, à 170 km de Cayenne. À l’origine du projet Amazonie pour tous, les 150 habitants savent accueillir. L’entraide prévale et la démarche envers les personnes en situation de handicap est comprise et souhaitée.

 “ À Saint-Laurent-du-Maroni, nous sommes partis naviguer sur le fleuve Maroni en pirogue avec des enfants et adolescents atteints de différents handicaps : malvoyants, malentendants, autistes, porteurs de handicaps psychiques. J’ai volé au-dessus du fleuve pendant 5 heures au total ; c’était magique ! Ce fut pour moi un merveilleux booster qui me donne la force de continuer mon combat”, ajoute Yann, qui a aussi visité le projet de l’association Epnak : un centre d’accueil éducatif autour de la protection de l’enfance avec ses 30 salariés.

Yann Jondot handicap

L’ambassadeur a aussi assisté à l’opération réalisée autour des lunettes, où du personnel spécialisé en ophtalmologie s’est rendu sur place à Camopi. Il a offert à une centaine  d’Amérindiens (gênés sur leurs pirogues par le reflet du fleuve) des tests de vue, grâce à du matériel transporté ainsi que des lunettes confectionnées pour chacun.

Il en ressort que l’aventure en Amazonie parfois périlleuse n’en a été qu’une réalité humaine très belle” avait conclu Yann à son retour en Bretagne.

L’association Handi Help 56 : l’autre combat de Yann Jondot

L’association Handi Help 56, présidée par Gilles Mobré, est implantée à Ploërdut (Morbihan) à 7 km de Langoëlan. “Nous sommes 3 membres : Gilles l’ancien mécanicien en fauteuil lui aussi, Bruno et moi-même !”, explique Yann.

Cette association nettoie, entretient, remet en état les appareils destinés aux personnes en situation de handicap, chaque fois que cela est nécessaire avant de les offrir aux personnes nécessiteuses. 

Yann Jondot handicap

Yann alerte le public “Savez-vous que des centaines de fauteuils roulants, manuels et électriques sont jetés dans les déchetteries, partout dans notre pays, quand ils ne servent plus dans les familles ?” 

fauteuil handicap

Un fauteuil (comme celui ci-dessous) offert par l’association à Yolande est très onéreux. Son coût avoisine 8000 euros ! Beaucoup de personnes ne peuvent pas se l’offrir, à l’image de cette dame qui suite à de nombreuses opérations de la hanche a perdu l’usage de ses jambes. Elle ne touche qu’une petite retraite d’agricultrice ! C’est pour des actions comme celle-ci que Yann Jondot avance.

yann jondot

Infos pratiques :

Une nouvelle aventure commence : La création du Fonds de dotation

“Partout avec tous pour tous” Fonds de Dotation Yann Jondot Lorient.

La vraie compétition est celle de tous les jours. Nous devons effacer les obstacles pour les personnes handicapées, pour toutes celles dont la mobilité est réduite, pour les personnes âgées” : Yann Jondot.

Un livre édité

En mars 2020, le Morbihannais Jean-Claude Noguellou commence ses entretiens avec Yann. Il a pour objectif d’écrire son livre : Yann Jondot, il se voulait un destin.

Yann Jondot

En 186 pages, l’auteur dresse le portrait d’un homme avec ses failles, ses grandeurs, ses souffrances. Le livre n’est pas une réelle biographie, mais plutôt un échange avec Yann Jondot grâce à de nombreux témoignages. 

L’ancien commandant dans l’armée devenu journaliste décrit un personnage entier, hors normes dans tous les domaines : dans son courage, sa volonté parfois dans ses excès avec un besoin d’aller au bout des choses.

Le livre est paru aux éditions Logodenn, le 16 juillet 2021.

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Martine Gatti
Martine Gatti est une jeune retraitée correspondante de presse locale dans le pays de Ploërmel depuis bien des années.

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