Il poussait et tirait son corps blanc dans la mer, mais l’eau fuyait mollement devant lui et le frappait par derrière. L’eau lui sortait des yeux, du nez et des oreilles, toute la mer lui sortait du ventre. Il avait déjà vomi trois fois.Ainsi commence Furioso de Voldemar Lestienne, par l’effort désespéré d’un homme au bord de l’agonie. Il nageait en tournant le dos au soleil parce que c’était l’aube et parce que, cette année-là, la liberté était à l’Ouest.

Si je prends la peine de construire une chronique autour d’un roman facile et pas vraiment bien écrit, c’est avant tout parce que son histoire, celle d’un jeune homme audacieux de 17 ans arrivé en Angleterre par la mer afin de s’engager dans la Résistance, parce que son histoire se lit comme une aventure pour adultes en recherche d’un texte simple, sans fausse tragédie ni emphase doctrinaire. Avec son intrigue menée au rythme d’un septième de cavalerie, le format du texte est précurseur des best-sellers d’aujourd’hui, ceux écrits par des scribouilleurs qui se prennent pour Romain Gary alors qu’ils n’ont pas l’étoffe d’un Grégoire Delacourt !

Même s’il n’était pas dénué de talent, Voldemar Lestienne est toujours resté modeste face au succès, et ne s’est jamais tenu pour le parangon d’une littérature populaire. En quatre livres : Dellinger – 1958, Furioso – 1971, Fracosso – 1973, et l’Amant de poche – 1975, il aura réussi à partager la magie d’histoires simples et passionnantes, des aventures qui font plaisir, tout bonnement, rien de plus mais rien de moins, avant de s’éteindre le 18 décembre 1990 à l’âge de 59 ans. Quant à mon insistance à lui redonner vie, elle est une invitation à relire les romans populaires d’hier, largement aussi bien menés que ceux d’aujourd’hui, en tout cas mieux écrits malgré leurs défauts qui, avec le temps, passent pour des effets de style.
# # #
