Et si une micro-taxe automatique remplaçait tous les impôts actuels ? C’est en tout cas l’idée de Marc Chesney et Félix Bolliger. Ils ont lancé, avec un soutien grandissant, un manifeste pour promouvoir une micro-taxe sur tous les paiements électroniques. Le projet pourrait bien être soumis à référendum en Suisse.

Une initiative populaire

MICRO-TAXE suisse
Marc Chesney

« La Micro-taxe raccorde fiscalité et finance, le résultat en est que le total du trafic des paiements se révèle être la plus large assiette fiscale que l’on puisse concevoir ». Telle est l’une des propositions avancées sur le site Microtax. Proposition ? Autant parler de manifeste. L’idée d’une micro-taxe qui se substituerait à tous les impôts actuels vient d’un financier zurichois, Félix Bolliger.
Conduite par Marc Chesney, professeur de finance, cette initiative compte désormais son inventeur, ainsi que trois autres personnes : Oswald Sigg, l’ancien vice-chancelier de la Confédération, entre autres défenseur du revenu de base, Anton Gunzinger et Bernard Dupont. Pourquoi manifeste ? Parce que ces chercheurs insistent sur la valeur transformatrice de leur projet, notamment dans le domaine des sciences économiques.

Du reste, le titre de leur projet se nomme Reinvent the system. « L’aspect particulièrement problématique est que les sciences économiques ni questionnent, ni mettent en doute la perversion du capitalisme », peut-on lire quelques lignes plus loin. Manifeste, donc. Utopique ? Rien n’est moins certain. La démocratie suisse est dite semi-directe : elle intègre notamment le principe d’initiative populaire. Si la proposition de micro-taxe automatique réunit 100 000 signatures, elle sera alors soumise à une votation (c’est-à-dire un référendum).

 

Qu’est-ce que la micro-taxe ?

« Uniforme, efficace et juste », résument ses concepteurs. L’idée s’avère simple : taxer tous les paiements électroniques permettrait de remplacer tous les impôts actuels, la TVA comme l’impôt sur le revenu. On pourrait croire que ce projet s’apparente à la Taxe sur les Transactions Financières (TTF) française, ou encore la Taxe Tobin. Or, la micro-taxe automatique propose de taxer tous les paiements électroniques, pas seulement les transactions financières. Dans les faits, retirer de l’argent à une banque serait donc soumis à une taxation. Cette taxe est dite micro parce qu’elle entend, dans le programme de ces concepteurs, prélever seulement 0,2 % de l’échange. Tous les acteurs économiques seraient donc concernés, aussi bien les ménages que les entreprises. « Puisque la micro-taxe est perçue automatiquement par ordinateur, elle perd son caractère inquisitoire. Il s’agit d’un impôt sans idéologie. Il ne peut y avoir de concept plus simple et plus clair. La Micro-taxe est abondante, techniquement peu cher à gérer, et juste », précisent les chercheurs.

Marc Chesney et ses collaborateurs prennent l’exemple concret de la Suisse. L’ensemble des recettes fiscales de ce pays représente environ 170 000 milliards de francs suisses. Avec une micro-taxe de 0,2 %, cette initiative permettrait d’engranger 200 milliards de francs suisses. « Ce changement de régime fiscal implique cependant une nouvelle optique. En effet, la Micro-taxe ne vise ni sur le citoyen ou la personne morale, ni sur la consommation ou un comportement particulier, elle fiscalise un dénominateur commun, en l’occurrence la totalité des paiements de l’économie nationale », rajoutent les créateurs. Rien à voir, donc, avec la TTF ou la Taxe Tobin. Ou, sans doute, une tentative commune de réduire la volatilité des marchés financiers.

Mise en œuvre ?

MICRO-TAXE suisse
Marc Chesney et Félix Bolliger

Dans une entrevue accordée à Le Temps, Marc Chesney revient sur la mise en œuvre de ce projet. Il attaque frontalement ce qu’il appelle « l’aristocratie financière » : selon lui, « nous avons besoin – la Suisse, mais en général l’Europe aussi – de politiciens qui prennent leurs responsabilités et s’émancipent des lobbys de cette aristocratie financière ». Il considère également que la société doit s’émanciper et se réapproprier les termes obscurs que les spécialistes de cette aristocratie financière ont créés (par exemple, le trading à haute fréquence). Du reste, si la votation avait lieu, en 2019 ou 2020, une première expérimentation serait envisageable avec une taxation de 0,05 % au lieu de 0,2 %. Le professeur s’attend déjà à des critiques virulentes de la part des lobbys financiers.

Parmi ces critiques, on trouvera celle-ci : cette micro-taxe ferait perdre à la Suisse certaines activités. Par exemple, les activités de négoce à haute fréquence. Clairement, Marc Chesney semble s’en féliciter. La suppression des impôts faciliterait plutôt, selon lui, la création d’emplois et l’investissement. Autre point : débarrasser les contribuables et plus généralement l’administration de la lourdeur fiscale. « Le système fiscal se base sur une idéologie plus que centenaire, sa législation est d’une complexité absurde, inadaptée à une économie globalisée et digitalisée telle que nous la connaissons aujourd’hui », tranche le manifeste. Et la France ? Pourrait-elle, un jour, adopter elle aussi cette micro-taxe ? Dans une entrevue à BFM Business, Marc Chesney précise qu’il faudrait agir avec prudence et opter pour une taxation de l’ordre de 0,4 %.

Consulter le site de Microtax

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