Le jugement dernier de Stéphane Haumant commence comme un thriller classique avec des bombes qui explosent un peu partout dans le monde : Brésil, États-Unis, Japon, Inde… Ces bombes sont identifiées comme étant celles du « jugement dernier » : des engins dernier cri (ça tombe bien !) mis au point dans le plus grand secret et dont la portée et la force n’ont pas de commune mesure avec les bombes classiques.

Le jugement dernier – Stéphane HaumantLes gouvernements paniquent, tentent de maintenir la chape du secret et du non-dit, tout le monde pense savoir et tout le monde patauge. Pourtant, chacun de leur côté tout d’abord, puis de concert, un policier américain et un journaliste français vont débobiner le fil du mystère et se lancer à la poursuite des poseurs de bombes (qui n’ont pas revendiqué leurs attentats, ces coquins !). Mais ils ne pourront pas un instant imaginer qu’ils vont devoir remonter aux cathares et à leurs mystères et qu’ils font face à un complot vieux de neuf siècles !

Ça commençait plutôt pas mal, avec du mystère, des personnages principaux pas trop désagréables et du suspense. Et puis voilà que la sauce Da Vinci Code est venue à la rescousse, avec un soupçon d’hérésie, quelques cathares en colère, des renégats et des vilains venus des siècles précédents, et un Codex Lucis plein de messages cachés au commun des mortels… Bref, ça part en grand n’importe quoi au bout d’une centaine de pages et les invraisemblances, clichés, poncifs et autres bêtises s’amoncellent sous la plume de l’auteur, au demeurant plutôt agréable à lire.

Ça commence à m’énerver sérieusement de lire ces romans inspirés de lectures précédentes et qui reprennent les mêmes ficelles et mystères sous prétexte que le lecteur (lambda) aime ça et en redemande. On ajoute un peu de peste noire, des têtes coupées à la Révolution, une bonne guerre, on secoue sans oublier de rajouter quelques cathares et hop, c’est prêt. Mais le cathare, c’est comme le sel, il en faut, mais point trop… et là, je dirais que c’est un peu indigeste.

Alix Bayart

Le jugement dernier, Stéphane Haumant, J éditions,  20.90 €, 10 mai 2013, 380p.

Extrait

Paris (France) – Dimanche 2 février, 10 heures GMT.

La fin du monde était un jour comme les autres. Un dimanche. Le jour du Seigneur. Mais Donatien et Héloïse Chantôme ne croyaient pas en Dieu. Ils se prélassèrent au lit jusque tard dans la matinée et prirent leur petit déjeuner sous la couette : café brûlant et tartines beurrées au miel. Octave, leur fils, avala goulûment son biberon de lait au chocolat, puis se rendormit contre sa mère. C’était l’hiver et il faisait froid. Donatien s’offrit une longue douche brûlante. Il soufflait bruyamment dans la salle de bain embuée. Héloïse passa sa robe de chambre et s’installa derrière son ordinateur. Elle confirma l’hôtel des vacances. Une semaine au soleil dans une réserve du Kenya. Le petit Octave rêvait de voir en vrai les grands animaux de la savane.
Héloïse n’avait pas envie de cuisiner et ils sortirent acheter des souris d’agneau, chez le traiteur du coin. Après le repas, Donatien brancha son terminal électronique, pour jeter un oeil aux nouvelles. Il se connecta sur le site du Journ@l, le quotidien pour lequel il travaillait depuis dix ans. C’était un réflexe conditionné. Même un dimanche. Il ne pouvait s’empêcher de surveiller la marche du monde, trois ou quatre fois par jour, et il détestait être pris en défaut. C’était comme un besoin physique. Une addiction. Il voulait savoir. Savoir le premier, pour informer les autres. Sa curiosité était toujours en éveil.
Donatien alluma donc son journal électronique et fit défiler les titres. L’actualité était sans relief : deux grandes banques annonçaient leur fusion, le président de la république fédérale d’Espagne était compromis dans une affaire de corruption et une chanteuse à la mode annonçait sa retraite au terme d’une carrière météoritique.
L’après-midi, les Chantôme partirent jouer au parc. Ils firent une petite partie de football, mais l’air était si tranchant et la terre si dure qu’ils renoncèrent vite. Ils décidèrent de rentrer à la maison, pour prendre le goûter. Octave connaissait par coeur le chemin du retour et il pédalait devant, sur son petit vélo bleu. Il s’arrêtait systématiquement quand il y avait une rue à traverser, pour attendre ses parents, comme il en avait la consigne. Donatien et Héloïse suivaient, en se donnant la main.
Dans l’ascenseur, le journaliste s’aperçut que son bureau l’avait appelé à plusieurs reprises. Il ne s’était rendu compte de rien car, le dimanche, il mettait toujours son téléphone en mode silencieux, pour ne pas être dérangé. Il rappela le Journ@l. On lui passa Norman Pereira, le rédacteur en chef :
– Vous avez cherché à me joindre ? demanda Donatien.
– Oui. Tu n’as pas vu les nouvelles ?
– Non.
– Il faut que tu rappliques immédiatement I
– Pourquoi ?
– Il vient d’y avoir une explosion au Brésil ! Donatien eut envie d’ajouter : «Et alors ?»
Les attentats aveugles étaient courants. Norman Pereira poursuivit, surexcité :
– Ça a l’air d’être un truc énorme ! On parle déjà de cinq cents morts. Je vais avoir besoin de quelqu’un pour épauler César Tutoia, le correspondant local. Il faut que tu partes, ce soir.
– C’est que…
– Quoi ?
– Dans trois jours, je suis en vacances.
– En vacances ?
– C’est noté sur le tableau de service. Je te l’avais dit, je suis absent à partir de mercredi. Tu ne t’en souviens pas ?
– Non, grommela le rédacteur en chef. Et merde I Alors il faut que je trouve quelqu’un d’autre ?
– Je crois bien.
– Et merde ! lança l’autre en raccrochant aussitôt.
– Qu’est-ce qui se passe ? demanda Héloïse.
– Il y a eu une explosion au Brésil ! expliqua Donatien en se connectant à son journal électronique. Ça a l’air énorme.
Effectivement, l’explosion qui ne faisait qu’une brève au début de l’après-midi était «montée» en une.

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