La sécheresse a fait prendre conscience à la population que chaque cours d’eau est précieux en Bretagne. Mais le développement de la méthanisation afin de produire du gaz à partir des déchets de l’agriculture mais aussi de plantes, menace les ressources naturelles. Pourquoi ? Splann ! révèle un certain nombre de dysfonctionnements.

La Bretagne se couvre de dômes verts. Peu nombreux il y a dix ans, 186 méthaniseurs parsèment aujourd’hui la campagne. Cent de plus d’ici un an. Capables de transformer des matières organiques en gaz, les méthaniseurs font partie de la stratégie française pour accroître sa production d’énergies renouvelables. De fréquents accidents rappellent que cette technologie n’est cependant pas sans risque pour l’environnement. Et toutes les interrogations ne sont pas levées en matière sanitaire. Incités par l’État et les banques à investir dans la méthanisation, des agriculteurs sautent le pas. Quitte à transgresser quelques règles. D’autant plus facilement que sans les garde-fous nécessaires, la voie est laissée libre à son essor. Au risque peut-être de se faire damer le pion par les énergéticiens, lobby encore plus puissant que celui de l’agro-alimentaire.

La méthanisation bretonne en plein boom

Première région d’élevage, la Bretagne déborde de déjections animales qu’agriculteurs et industriels de l’énergie entendent convertir en gaz et en revenus. Contrairement à d’autres régions, ce sont les éleveurs et non les céréaliers qui y importent la méthanisation. Sans même compter la Loire-Atlantique, la Bretagne pointait début 2022 au 2e rang national en nombre d’installations (199), derrière la région Grand Est (274) et devant les Hauts-de-France (134) puis la Normandie (120). Une installation française sur sept se situait dans la région.

Des unités nombreuses mais plus petites que la moyenne, puisque la Bretagne n’émargeait « qu’au » septième rang en termes de capacité de traitement. Si la méthanisation à la ferme est largement dominante, des projets de plus grande ampleur devraient bousculer la situation, comme nous l’expliquons dans le volet économique de cette enquête.

Doté du deuxième cheptel bovin de France, l’Ille-et-Vilaine devient une terre de méthanisation dont Iffendic (4 500 habitants), situé entre Rennes et Paimpont, pourrait se proclamer capitale. Comme le montre notre carte interactive, le Léon (au nord de Brest) et le Penthièvre (autour de Lamballe) ne sont pas en reste. À tel point qu’on pourrait élégamment superposer cette carte à celle de la densité des vaches laitières.

 Problème n° 1 :
 Des dérogations systématiques 

La quasi-totalité des méthaniseurs déroge à d’importantes normes sanitaires. Et les (très rares) contrôles font état de graves manquements à la sécurité dans ces installations. Pourtant, le risque de disséminations de maladies et de pathogènes, encore peu connu, devrait inciter à la prudence

  • 85 %, des installations contrôlées en Bretagne en 2020 n’avaient pas réalisé les aménagements nécessaires.

 Problème n° 2 : 
Concurrence avec 
l’alimentation 

La sécheresse et la guerre en Ukraine font craindre des difficultés pour la sécurité alimentaire… Et la méthanisation complique la situation : les méthaniseurs, gourmands en apports végétaux tels que le maïs, font concurrence aux éleveurs qui doivent nourrir leurs bêtes, et engloutissent des stocks d’aliments qui auraient pu être destinés aux humains. De plus en plus de champs sont désormais dédiés à la production énergétique, quitte à contourner la réglementation. 

  • 1/3 des méthaniseurs bretons doublent de volume dans les cinq premières années.

 Problème n° 3 : 
Total, Engie… les industriels  
s’emparent des revenus

La plus-value de la méthanisation est en train d’échapper aux agriculteurs. Seuls les plus gros parviennent à tenir tête aux multinationales de l’énergie, qui accroissent leur pouvoir sur l’agriculture, au sein même des fermes… et sur les campagnes. La protection du bocage va donc de plus en plus dépendre des priorités des multinationales de l’énergie comme Total ou Engie.

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