En ce mois de printemps, la littérature s’épanouit, elle aussi, grâce au retour des salons littéraires. L’Europe est l’invitée d’honneur du Salon Livre Paris, qui se tiendra du 15 au 18 mars à la Porte de Versailles. Quant aux amateurs de romans noirs, ils retrouveront la quinzième édition de Quais du Polar, du 29 au 31 mars à Lyon. Ces manifestations sont de grandes librairies où l’on peine parfois à faire des choix. Voici donc quelques conseils de lecture parmi les nouveautés littéraires du mois de mars.
Médecin, diplomate, écrivain, Jean-Christophe Rufin nous fait largement profiter de ses récits de voyage dans ses romans. Avec Les sept mariages d’Edgar et de Ludmilla (Gallimard, 28 mars 2019), l’auteur nous emmène de Russie jusqu’en Amérique, du Maroc à l’Afrique du Sud pour retracer les vies d’un aventurier charmeur et d’une cantatrice un peu folle pendant un demi-siècle palpitant, de l’après-guerre jusqu’aux années 2000. Ne pouvant vivre ni ensemble, ni séparés, les deux amants ont inventé une nouvelle façon de vivre leur amour. Un couple dont nous connaîtrons toutes les confidences.
Après Les loyautés (JC Lattès, janvier 2018), Delphine de Vigan poursuit son triptyque, qui explore les formes de reconnaissance qui nous lie les uns aux autres, avec Les gratitudes (JC Lattès, 6 mars 2019). En une journée, il nous arrive de dire plusieurs fois Merci, mais remercie-t-on jamais assez ceux qui nous aident vraiment. Michka est en train de perdre peu à peu l’usage de la parole. Autour d’elle, Marie, une jeune femme dont elle est très proche, et Jérôme, l’orthophoniste chargé de la suivre se retrouvent.
On connaît l’amuseur de Quotidien, mais Eric Metzger, de roman en roman, s’impose aussi sur la scène littéraire. La citadelle (L’arpenteur, 14 mars 2019) nous emmène sous le soleil de Calvi. Émile, un jeune Parisien part en vacances en Corse avec des amis. Il y rencontre la belle Andréa dont il refuse de tomber amoureux. Ce sont là les débuts d’Émile dans la vie. L’histoire d’une défaite autant que d’un succès, où il est question d’espoirs, de remords et d’envie.
Le Québécois Eric Plamondon a reçu un bel accueil avec son premier roman Taqawan. Il revient cette fois avec l’histoire intime et politique du peuple basque. Oyana (Quidam, mars 2019) est née au Pays basque et vieillit à Montréal. De là, elle écrit à l’homme de sa vie pour tenter d’expliquer ses choix. D’un style sobre et fluide, ce beau récit est celui du souvenir qui hante la mémoire, celui de la lutte du peuple basque.
Deuxième roman aussi pour l’Argentine Selva Almada qui s’affirme comme une des voix les plus intéressantes de la littérature hispano-américaine. Sous la grande roue (Métailié, 21 mars 2019) est une tragédie rurale qui mêle amour et violence. Pajarito Tamai et Marciano Miranda, deux amis d’enfance engrangent la haine depuis qu’un malentendu les a séparés. Le frère de Marciano ne fait qu’aggraver la situation dans ce village argentin déjà bien accablé par le soleil de plomb.
Pour la catégorie des romans noirs, j’ai choisi deux auteurs spécialistes de romans psychologiques qui excellent à raconter de belles histoires au cœur d’une nature sauvage et prégnante. Ils viennent ici avec des propositions bien plus sombres.
Animal (Denoël, 7 mars 2019) de Sandrine Collette est ce qui qualifie le regard de Lior, une Française partie chasser l’ours avec son mari dans les forêts au milieu des volcans de Kamtchatka. En pleine nature, guidée par un vieil homme peu disert, elle s’affronte au passé. Humain, animal, les rôles se brouillent et les idées préconçues tombent dans ce grand roman où la nature tient toute la place.
Ron Rash nous entraîne une fois de plus là où coule une rivière, en Caroline du Nord. Amoureux de la nature, sédentaires d’un petit village s’opposent aux ambitions d’un homme d’affaires. Le shérif Les, à trois semaines de la retraite, et Becky, poétesse obsédée par la protection de la nature mènent l’enquête pour défendre leur vision du monde dans Un silence brutal (Gallimard, 21 mars 2019).
Une couverture qui ne manquera pas de vous interpeller, La saison des ouragans (Grasset, 20 mars 2019) s’ouvre sur un meurtre, celui d’une sorcière d’un petit village mexicain. Au fil de ce roman, nous découvrons les événements qui ont mené à son assassinat. Grâce à cette intrigue policière à rebours, Fernanda Melchor dresse un formidable portrait du Mexique et de ses démons. Une histoire violente et brutale servie par une langue crue et musicale.
Séance de rattrapage avec les sorties en format Poche. Profitez-en pour découvrir l’excellente prose d’Emmanuel Dongala avec La sonate à Bridgetower (Babel, mars 2019). En 1789 débarque à Paris le violoniste prodige George Bridgetower, neuf ans, fils d’un nègre de la Barbade et d’une Polonaise. Sa carrière nous emmène dans toute l’Europe. Avec pour toile de fond la condition des noirs, ce roman d’apprentissage évoque les bouleversements politiques et sociaux et les transformations majeures du monde de la science et des idées dans l’Europe après le siècle des Lumières.
Je termine avec un roman noir qui obtint le Prix Landerneau en 2017. Seules les bêtes (Babel, 6 mars 2019) est un roman choral de Colin Niel. Suite à la disparition d’une femme sur un chemin de randonnée d’un plateau peu habité, les uns et les autres livrent leurs secrets dans un grand roman noir sur la solitude qui tourne à la folie.
