La coupe de la ligue de Slam ! Non, pas de football, mais un véritable championnat de poésie. Pour la troisième année consécutive, l’événement s’est déroulé à Rennes du 27 au 29 mai dans l’antre du théâtre du Vieux Saint-Étienne. Enfin le slameur vint ?

 

Coupe ligue SlamLes joyeux présentateurs de la finale individuelle de cette coupe de la ligue Slam de France n’ont pas cessé de rendre un hommage sincère à Marc Smith. Mais qui est-il ? Rien de moins que le créateur de la Slam Poetry, en français « chelem de poésie », plus couramment connu sous le nom de slam. En 1986, ce poète américain a l’idée d’organiser un tournoi de poésie au Green Mill, dans un quartier pauvre de Chicago. L’originalité ? Tout le monde peut participer, le jury est sélectionné lui-même dans le public. Le mouvement provoque un engouement rapidement mondial et constitue une réaction aux lectures traditionnelles de poésie, jugées trop élitistes et souvent ennuyeuses.

Coupe ligue SlamEn France, qui dit slam dit Grand Corps Malade, le slameur français le plus populaire. Ça tombe bien, l’artiste était présent samedi au Vieux Saint-Étienne pour un « show case », entendez un concert de présentation. Il est d’ailleurs membre d’honneur de la ligue Slam de France, association fondée en 2008. Pour la troisième année consécutive, la coupe est organisée à Rennes et pilotée par l’association locale Slam Connexion. Malgré des difficultés financières, dues notamment à une baisse de subventions, Slam Connexion a réussi cette année à investir le théâtre du Vieux Saint-Étienne pour l’événement, mais aussi d’autres espaces comme Au coin des Mondes ou l’Auberge de jeunesse de Rennes.

Coupe ligue SlamTrois jours et trois tournois, voilà la formule centrale de cet événement. Coupe juniors, de 12 à 18 ans, coupe en équipes (12 au total, venues des quatre coins de l’hexagone) et coupe individuelle. Cette dernière a réuni 36 poètes au départ et 12 finalistes le dimanche. Outre ces compétitions, la coupe proposait des scènes ouvertes V.I.P. (Very International Poet) sur le parvis du théâtre, des rencontres, des « jeux coopératifs et poétiques » et aussi… des attentats poétiques. Proche des « brigades d’intervention poétique » du Printemps des Poètes, cette action se déroulait par surprise au marché des Lices et, espérons-le, n’aura pas effrayé les autorités par sa rhétorique.

Coupe ligue SlamLa finale de la coupe individuelle s’est déroulée dans une ambiance participative et bon-enfant. L’un des présentateurs précise :

Venez comme vous êtes, sans déguisement, ce n’est pas du karaoké, ce n’est pas du théâtre, c’est du slam

Chaque finaliste doit respecter le temps imparti, c’est-à-dire 3 minutes, au risque d’être sanctionné par Chronoman, un super-héros spécialement venu pour l’occasion. Les juges, au nombre de 5, notent de 1 à 10 les candidats : le public, par une participation bruyante, peut cependant influencer leur choix. Les trois heureux gagnants ont reçu médailles et applaudissements. La première, Gaëlle, une slameuse de Reims, s’est également vu offrir une sorte de vase, sorte de calice ultime de la discipline qui circule de main en main au fil des compétitions. La gagnante a remporté une adhésion complète pour son texte à la fois absurde, drôle et tragique sur l’extermination des Juifs, Tziganes, malades mentaux, homosexuels et autres victimes de l’Allemagne nazie. Tous ont présenté des différences notables dans leur performance, différences d’ordre thématique, rythmique ou rhétorique.

Coupe ligue SlamNéanmoins, plusieurs éléments reviennent régulièrement. Qu’il soit intimiste ou politico-social, le sujet général prend le risque de demeurer simpliste parce qu’encadré par une prosodie et une poétique codifiées. Assonances, allitérations et métaphores filées en constituent la base par laquelle en parallèle d’intéressantes, voire émouvantes trouvailles, se déploient parfois un lyrisme conservateur et un certain nombrilisme qui tourne autour de l’acte d’écrire et de slamer… Il n’empêche que l’émotion opère et, par bonheur, le rire jaillit. Reste que certains spectateurs éprouveront une certaine gêne face à un quasi-appareil de désarmement critique : la participation de tous est sollicitée, mais la bienveillance et la bonhomie sont obligatoires. Les notes des juges ne descendent jamais en dessous de 8 (nombre qui provoque des huées). La ligue Slam de France revendique sa charte de valeurs : « l’égalité, l’ouverture, l’accessibilité, le respect, le partage, l’interactivité, les libertés d’expression et d’opinion ». Qu’elles sont donc loin les batailles d’Hernani…

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