La web-série Rencontres du troisième clic, diffusée sur France TV, explore l’amour en ligne en Bretagne à travers les récits de douze personnes qui racontent leur expérience des applications de rencontre.
Dans un jeu de mots bien trouvé, le titre de cette web-série évoque le film Rencontres du troisième type (Steven Spielberg, 1977) — et, avec lui, l’étrangeté de ces inconnus qui n’en sont plus vraiment, tant ils ont bouleversé nos manières de nous parler et de nous choisir. En épisodes d’environ quatre minutes, douze personnes — Clémence, Clément, Noë, Pierre, Nicolas, et d’autres — se retrouvent face caméra. Elles répondent aux questions de la réalisatrice et journaliste Chloé Gwinner, cofondatrice de la revue La Vilaine et déjà à l’origine, en 2024, du documentaire Étienne Saglio, l’illusion du réel, consacré à la création du spectacle Vers les métamorphoses.
Meetic, Badoo ou Adopte un mec pour les plus historiques ; Tinder, Grindr, Hinge ou OkCupid pour les plus récents : les applications de rencontre sont désormais partout et ont profondément transformé nos façons de nous rencontrer. En 2025, on estime que près de 45 % des célibataires français utilisent régulièrement ces plateformes. Qu’il s’agisse de chercher une aventure d’une nuit ou une relation au long cours, une exclusivité ou une histoire plus libre, une discussion ou une vraie rencontre, des millions de Françaises et de Français s’y inscrivent, chacun pour ses raisons.
Le flirt en ligne est devenu une norme ; ceux qui n’ont jamais essayé ces applications forment presque une minorité. Dans Rencontres du troisième clic, la Bretonne Chloé Gwinner s’intéresse à ce nouveau régime d’interactions qui, au fil des années, a façonné un autre rapport à la drague et à la séduction. Sans fioritures, elle donne la parole à un panel de profils variés — âges, orientations, genres, parcours — et interroge, à hauteur d’humain, ce que nos écrans font à l’intime.
« Il y a un côté très narcissique. J’ai une appli pour quoi ? Pour rencontrer des gens, ou pour me rassurer sur le fait que je plais encore ? », Clément.
Filmé en format vertical — celui du téléphone, proche des Reels — et ponctué de petites animations, le dispositif laisse défiler des récits tantôt drôles, tantôt touchants, toujours portés par la sincérité des personnes interviewées. En quelques minutes, on traverse des questionnements sur l’amour, la sexualité, la peur de l’autre, le consentement, l’illusion du choix illimité, ou encore la déconstruction de certains schémas.
Les applications peuvent aussi être une porte d’entrée : pour des personnes d’un certain âge, pour celles qui vivent davantage dans la retenue, ou pour celles qui ont besoin d’un cadre pour oser le premier pas. Mais Rencontres du troisième clic soulève également la question de l’addiction au procédé, et de la difficulté — pour certains — à revenir ensuite à un mode de rencontre plus classique. Sans verser dans l’alarmisme, la série saisit la fin d’une époque, du moins pour une génération. « Je pécho que sur Tinder, c’est ma norme. Si je devais draguer en vrai, je ne sais pas comment je ferais… Je n’aurais plus de sex », confie Elsie, avec une franchise désarmante. Il est aussi question de la standardisation de certains échanges, sans que la série n’en fasse une vérité absolue : « Le premier message, ça va être “ça va”, le deuxième “tu fais quoi”, le troisième “actif ou passif” », résume Pierre, dans l’un des épisodes.
Le temps de quelques épisodes, on plonge ainsi dans les interrogations d’une époque, avec une tendresse réelle et une attention constante aux nuances. Une série courte, mais juste, qui écoute avant de juger.
Cela étant, le format très court et le ton volontairement doux peuvent laisseront certains spectateurs sur leur faim. Ceux qui attendent une enquête plus contradictoire, une mise en perspective sociologique ou davantage de rugosité dans le montage pourront trouver la série trop lisse — même si sa force demeure l’écoute et l’incarnation.
Disponible jusqu’au 23 octobre 2026 sur France TV
Une série en 12 épisodes pour France 3 Bretagne, Tébéo, TVRennes, KuB. Réalisée par Chloé Gwinner. Produite par Quatre et demi.