Depuis le mois d’octobre 2017, une conciergerie a ouvert dans le quartier du Blosne, au sud de Rennes. Portée par l’association le p’tit Blosneur, elle tente de récréer du lien social en proposant activités et échanges de services.

Au milieu du centre commercial Sainte-Elisabeth, à deux pas de l’hôpital sud de Rennes, la Conciergerie est un îlot atypique. Le rideau de fer désespérément fermé d’un espace commercial inoccupé fait face à sa devanture lumineuse et à sa cabane à dons, où sont déposés livres et revues en libre accès.

À l’intérieur, les murs clairs et la décoration colorée tranchent avec les passages vétustes du centre. Une dizaine de jeunes retraités s’y active dans la bonne humeur, bavardant et riant ensemble. Ils préparent un buffet à partir des invendus récupérés auprès de grandes surfaces ; une manière d’alerter sur le gaspillage alimentaire.

conciergerie

« L’idée de la conciergerie, c’était de recréer de l’entraide et du partage entre les habitants du quartier », explique Claire-Agnès Froment. À l’origine de cette initiative, elle est depuis salariée du P’tit Blosneur, l’association qui porte le projet. D’un geste, elle écarte tous les documents budgétaires et demandes de financements qui s’entassent sur sa table, pour expliquer le fonctionnement du lieu. L’ambition, explique-t-elle, « c’est se rendre tous les petits services du quotidien entre habitants. » Si une personne a besoin d’aide, elle pourra contacter la conciergerie, qui transmettra la demande à ses adhérents.

Certains demandent à ce qu’on leur prête un outil bien particulier, d’autres auraient besoin d’un peu de bricolage, pour monter un meuble ou pour fixer une bâche. En tout, trente de ces services ont pu être rendus depuis l’installation de la conciergerie dans ce centre, en octobre 2017. De mémoire, Claire-Agnès Froment en énumère une volée : « on a réparé des vélos, des imprimantes, taillé des arbres, réparé une cabine de jardin qui menaçait de s’effondrer, emmené une personne à la gare parce qu’elle s’était faite une entorse, on a gardé des chats… ».

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Mais la conciergerie veut aller plus loin encore que ces petits actes d’entraide. « L’idée du local, explique la salariée de l’association, c’est de créer des moments de convivialité, pour que les gens se rencontrent, parlent ensemble. »

Chaque jour de la semaine, la conciergerie reste ouverte, pour que tous puissent venir prendre un thé, un café, s’asseoir ou y discuter un moment. Les bénévoles de l’association viennent tenir des permanences pour accueillir ces habitants.

Alors que l’initiatrice du projet détaille ce fonctionnement, l’un de ces bénévoles, un médecin retraité, s’installe à la même table, avec son livre. Il propose un café, se sert lui-même, puis se plonge dans sa lecture, relevant de temps en temps la tête pour écouter la conversation et intervenir. « De plus en plus de salariés, de patients de l’hôpital sud, de services civiques viennent ici le midi pour manger », se félicite Claire-Agnès Froment. « Ils s’installent ici comme à la maison ! »

En plus de l’entraide entre habitants et de l’ouverture de ce lieu, le P’tit Blosneur veut multiplier les activités autour de la conciergerie. Repas partagés une fois par mois, échange de nourriture à travers un frigo troc, organisation d’ateliers sur le numérique ou de découverte de jeux de société, de sorties collectives, une fois par semaine. « On a organisé un marché d’hiver pour mettre en avant les professionnels du quartier, poursuit Claire-Agnès Froment, on va organiser un marché d’été pour mettre en avant les compétences des habitants. »

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Avant même que ce marché d’été ne soit organisé, d’autres projets doivent déjà se concrétiser. Des ateliers de bricolage, des collectes de déchets, un référencement des artisans du quartier, des collectes de déchets, des job dating, pour aider les habitants à trouver des emplois en s’échangeant leurs carnets d’adresses… « La conciergerie n’est qu’un des moyens possibles pour recréer du lien », assume Claire-Agnès Froment.

Quartier populaire du la capitale bretonne, le Blosne, où est implanté le local, souffre d’une image qui ne reflète pas la réalité, déplore-t-elle. Face à ces idées reçues, la salariée du P’tit Blosneur ambitionne de recréer du lien social et travailler, progressivement, sur le développement économique du quartier. « Nos activités remplissent tous les objectifs formulés par la politique de la ville », se félicite-t-elle.

À ce titre, l’association a reçu 4 000 euros de l’État en 2016, auxquels se sont ajoutés 10 000 euros du département. Des subventions qui ont aidé l’association à s’installer, mais qui ne permettent pas de financer la totalité de son fonctionnement. « On a besoin de 40 000 ou 50 000 euros par an pour fonctionner », explique Claire-Agnès Froment. Alors en plus de l’argent récolté à travers les activités de l’association, celle-ci vient demander des financements à des entreprises privées. « On continue les demandes, au quotidien », souligne-t-elle.

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Mais plus que l’argent, c’est l’engagement bénévole des habitants qui permet de faire vivre l’association. « Aujourd’hui, on a entre 130 et 140 adhérents », se félicite Claire-Agnès Froment. Une douzaine d’entre eux tiennent des permanences hebdomadaires, certains proposent des activités aux habitants du quartier. D’autres encore viennent proposer leurs services de manière ponctuelle, selon leurs disponibilités. Une jeune en service civique vient de son côté assister la salariée de l’association dans la gestion quotidienne de ces activités.

Malgré ces engagements, l’initiatrice du projet reconnaît qu’il n’y a pas autant de mixité sociale qu’elle le souhaiterait. Au Blosne, les tours d’immeubles marquent le paysage au cœur du quartier, tandis qu’à sa périphérie s’étalent de petites maisons. La conciergerie, elle, est située à l’intersection de ces deux mondes. Mais ses usagers sont en grande majorité issus de ces lotissements. « On a moins de possibilités de distribuer de prospectus à l’intérieur des tours », justifie Claire-Agnès Froment. Avant de préciser : « on rencontre les bailleurs sociaux, et on travaille avec le CDAS [Centre Départemental d’Action Sociale, ndlr] ».

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Ces rencontres sont autant d’occasions de développer de nouveaux projets d’entraide. « Au CDAS, une personne refuse de se faire hospitaliser pour ne pas abandonner ses chats : on pourrait les garder », suggère-t-elle. Et d’autres initiatives semblables se développent, portées parfois par les simples bénévoles de l’association. « Grâce à notre newsletter, quelqu’un nous a contactés pour proposer une aide administrative », se félicite la salariée de l’association. D’autres personnes encore proposent des partenariats avec diverses associations, pour organiser un point de récolte pour les vieilles chaussures et lunettes.

« On avance pas à pas, progressivement », constate Claire-Agnès Froment. Cela ne fait, après tout, que quelques mois que cette conciergerie aux murs colorés a ouvert. Mais déjà, beaucoup s’en sont emparés, des plus jeunes qui viennent chercher leurs livres dans la cabane à dons aux plus âgés qui, discrètement, croquent dans un de ces champignons prévus pour le buffet du soir.

Le pt’tit Blosneur, Centre commercial Ste Elisabeth, 15 avenue de Pologne, 35200 Rennes. Permanence : Lundi à vendredi : 9h-17h, Mercredi : 9h-12h.

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