Le collectif Les Ateliers du vent promeut depuis plus de vingt-cinq ans une pratique artistique libre, alternative et expérimentale. En 2006, il trouve refuge dans l’ancienne usine de moutarde Amora, au 59 rue Alexandre Duval à Rennes. Nourries de valeurs militantes, les propositions prennent chaque année différentes formes en accord avec un projet associatif où le partage et l’inter-connaissance, l’économie sociale et solidaire et l’ancrage dans le territoire sont le fil rouge.

Créés en 1996, les Ateliers du vent concrétisent les envies créatrices de cinq étudiants militants, artistes pluridisciplinaires réunis alors au sein de la Compagnie du vent. À l’origine, l’idée des fondateurs était de s’implanter dans un quartier, de proposer des spectacles, des ateliers de pratique artistique et de mener une vie de quartier sans attendre que tout vienne de la sphère politique. Une ligne de conduite que l’équipe conserve encore aujourd’hui et qui reste le fil rouge d’une programmation éclectique.

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Stéphane Guiral, alias Bouèb, coordinateur des ateliers du vent

L’aventure de cette association singulière dans le paysage rennais s’inscrit dans le mouvement des friches culturelles et des squats artistiques des années 1980-1990, appelés par les sciences humaines « les nouveaux territoires de l’art ». « À cette époque, le maire Edmond Hervé et son équipe rêvent plus ou moins secrètement de faire de Rennes un petit Berlin, une ville dynamique où les gens peuvent s’approprier les espaces et les associations devenir actrices de l’activité. Que tout ne soit pas pensé et dirigé par les politiques et les services », rappelle le coordinateur Bouèb, Stéphane Guiral de son vrai nom. « C’est ce qui s’est passé avec l’Élaboratoire et les Ateliers du Vent nés à la même période. »

Un premier temps dans une maison quelque peu délabrée dans le quartier Baud-Chardonnet, à proximité de l’Élabo, le collectif a, par la suite, investi un bâtiment plus grand dans le même quartier, avant de poser ses valises dans l’ancienne usine de moutarde Amora en 2006. L’équipe s’agrandit en même temps que la superficie des lieux qu’elle habite. « Le propriétaire de la maison a voulu récupérer son bien, l’association avait des loyers en retard. Ils squattaient, mais au même moment ils ont reçu des subventions de la ville de Rennes et du ministère de la Culture pour certaines actions comme des expositions ou de la création de spectacle », raconte Stéphane Guiral.

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Dans un esprit communautaire et indépendant, les Ateliers du vent tentaient, et tentent toujours, de promouvoir une liberté de création alternative, expérimentale et sociale. « Ça nous permet de faire des choses qu’on n’oserait pas faire si on pensait seulement à ce qui pourrait plaire ou mobiliser fortement les publics », précise Bouèb. De par une programmation pluridisciplinaire, ils réussissent à toucher une large palette de publics. Chaque activité s’inscrit dans le projet associatif des Ateliers, à commencer par l’aide à la création artistique qui favorise le partage et l’échange.

« on n’a pas beaucoup de moyens, surtout de l’amour et de l’eau fraîche. On offre juste ça, des espaces de liberté. »

Actuellement 36 associés, artistes et autres corps de métiers qui participent à une pratique artistique (physicien, paysagiste, etc.) sont accueillis et participent à la vie des Ateliers. En plus de sa pratique, chacun a sa tâche, sa mission dans l’année. La moitié d’entre eux, les « établis », possède les clés du château et un atelier, individuel ou partagé. L’autre moitié participe à des projets collectifs et dispose des espaces mutualisés comme l’atelier de construction ou le plateau pour des résidences de création ou des diffusions.

Afin de favoriser l’inter-connaissance et les croisements, le collectif a depuis quatre ans mis en place ce qu’il appelle un vivier. « Il y a ce qui est visible dans la programmation, l’accueil en résidence, mais il y a aussi des endroits comme le vivier où se font les partages. » Ce laboratoire pluridisciplinaire réunit dix associés pendant une semaine de recherche collective dans un espace partagé. Travaillant à leur pratique les uns à côté des autres, ils se sollicitent sur certains points, créant ainsi une effervescence artistique. « S’il fallait résumer, l’idée est de construire une culture commune avec une complicité durable, tout en se renouvelant petit à petit. »

L’association accompagne les associés, mais pas seulement. 300 artistes ont été accueillis en 2021 pour une quarantaine de créations.

Libres et ouverts à toute forme artistique, les associés et salariés, neuf à l’heure actuelle, se donnent une couleur pour la programmation de l’année. « Les propositions partent souvent de la pertinence artistique, de ce qu’on a envie de chercher avec nos pratiques artistiques. » Pour 2022, l’idée de passage, d’étrangeté et « de cette bizarrerie familière » a remporté les suffrages lors du séminaire de rentrée. Après la « mise au vert » en 2021, les thématiques se font le reflet d’un certain écho à l’actualité. Elles sont révélatrices également des valeurs de l’association.

Pour entrer dans les clous du budget, le collectif ne produit que quelques événements par an et laisse l’espace à disposition d’autres associations. Il dirige deux expositions par an et en accueille deux à quatre autres. La première production de la saison, Passages, vient de baisser le rideau. Suit la première exposition accueillie, Papier paradis, jusqu’au 16 octobre 2022, réalisée dans le cadre du festival Le Marché Noir dont le quartier général est justement les Ateliers du vent. À ce partenariat fidèle, s’ajoute tous les deux ans celui avec Teenage Kicks.

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© DR

Certains événements sont quant à eux posés plus d’un an à l’avance. C’est notamment le cas de l’exposition dans le cadre d’Exporama en juin ou juillet 2023, en partenariat avec la Capsule galerie, le Vivarium et le Bon Accueil. Ou encore, 30 ans de contrebande, prévue pour novembre 2023, qui traitera de 30 ans d’histoire de bandes dessinées alternatives en partenariat avec l’association Spéléographies. D’autres propositions sont précisées dans le trimestre, d’autres encore arrivent de manière plus spontanée, si la proposition est pertinente, si une date est disponible et si les moyens sont là. Cette marge de manœuvre qui permet une certaine liberté dans la programmation fait la magie du lieu.

Espace de rencontres culturelles, s’y déroulent également des ateliers de pratique artistique et des visites. Chaque deuxième mercredi du mois, Bouèb organise une visite de l’usine pour tout comprendre de l’aventure de ce lieu inscrit à la Coordination des lieux intermédiaires et indépendants (Clii).

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© DR – Dangereuses lectrices

Située entre le quartier populaire de Cleunay et le nouveau quartier de la Courrouze, l’association crée aussi son activité en lien avec le territoire sur lequel le lieu est implanté. L’extrême proximité avec le premier est un travail au quotidien et en lien avec l’association de quartier À l’assaut des containers.

À l’extérieur, trois containers achetés par les Ateliers, au moment de la transformation et de la mise aux normes du lieu en 2014, forment aujourd’hui un espace inter-associatif. « L’asso de quartier a les clés des containers pour sortir les tables et se faire un repas de quartier quand ils veulent. Elle est aussi partenaire d’événements. » L’association HF Bretagne avait par exemple organisé sa boom de fin d’année en juin dernier sur la place. « On est une vingtaine de structures dans le quartier et on essaie d’harmoniser les programmations, notamment en été, pour essayer de ne pas faire les temps forts en même temps, pour qu’on puisse participer aux événements des autres et pour réussir à faire circuler les publics. »

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Un projet artistique spécifique peut aussi permettre aux habitants du quartier de collaborer, comme avec la compagnie de scénographie vivante Quignon sur rue qui a travaillé sur une création in situ dans le quartier Cleunay pendant deux ans et demi. « C’est très favorable quand ça arrive parce que les personnes se sentent les bienvenues et accueillies. Elles se sentent chez elles. » L’autre manière est de construire ensemble des manifestations culturelles comme ce sera le cas avec le marché de noël pas pareil avec le Mur habité et réseau solidaire à la fin de l’année.

La cantine des Ateliers est quant à elle ouverte tous les midis, le bar tous les jeudis soirs, dans lequel il y a aussi des présentations artistiques. Sur le mur ouest de la cantine, une exposition est d’ailleurs à découvrir jusqu’au 28 octobre. Dans un cadre agréable, une ambiance… est une invitation à découvrir une partie de la collection personnelle de Grégory Kaz Delauré, œuvres encadrées par ses soins.

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© DR – Dangereuses lectrices

Collectif militant dès sa naissance, les Ateliers du vent tentent à travers leur programmation de contribuer aux transformations du monde. Féministe, en faveur de l’économie sociale et solidaire et pour la transition écologique, l’association souhaite que le champs de l’art, et de la culture en général, puisse participer aux transitions et urgences du monde. Dans cette optique, le mois d’octobre se clôturera avec l’accueil du festival Dangereuses lectrices du 20 au 23 octobre 2022. Après « le cœur et l’amour », ce sera autour du « cul » d’être abordé, thème autant intime que politique, majeur dans le féminisme.

« Il y a 15 ans, il y avait le voisinage et une communauté artistique. Aujourd’hui, il y a le voisinage et des communautés artistiques et culturelles. » Différents publics traversent ce lieu aux propositions hétéroclites jusqu’à finalement se mélanger au détour d’invitations lancées au même moment, comme ce fut le cas en septembre pour la braderie, « un événement tant festif, convivial qu’artistique ». Sans forcer la rencontre, les Ateliers laissent la liberté à ses associés et à ses publics de découvrir chaque année de nouveaux horizons, entre compagnonnages fidèles et nouveautés, et d’aller où le vent les portera.

Les Ateliers du Vent

59 rue Alexandre Duval
35000 Rennes
Accès : bus #9 arrêt Voltaire / Vélostar station Mabilais

contact@lesateliersduvent.org / T. 02 99 27 75 56

La Cantine des Ateliers

Du lundi au vendredi de 12h à 14h
Le jeudi de 18h à 21h en mode snack à la Buvette. Terrasse aux beaux jours !

Sur place ou à emporter.
Possibilité d’accueil de repas de groupes et d’entreprises.
Réservation conseillée : T. 02 30 96 42 77

La Buvette

Tous les jeudis de 18h30 à 23h
Scène ouverte aux tentatives et comptoir convivial.

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