Voilà, c’est fait. Il s’est passé ce qu’Unidivers avait annoncé il y a trois semaines (voir notre article). PSA a enfin annoncé ce que tout le monde savait : la fermeture de l’usine d’Aulnay. Et la semaine a été un festival d’hypocrisie.

En première ligne, nous avons l’ancien gouvernement Fillon qui ne pouvait ignorer que l’annonce serait faite après les élections et son contenu, du moins dans les grandes lignes. En second lieu, nous avons la direction de PSA, PDG en tête (émargeant à 1,3M) qui clame haut et fort que c’est le coût du travail qui grève l’entreprise. Pas de chance, le leader européen produit ses modèles phares, Audi, Golf ou Passat, encore en Allemagne à un coût proche du nôtre (des études le prouvent lorsque l’on cumule tous les coûts), tout en ayant délocalisé dans l’est ses petits modèles. Ah, c’est vrai qu’Aulnay produisait, comme Poissy, un petit modèle (la C3) aussi mais que c’est surtout grâce à des produits consensuels (triste à mourir aussi dans un marché conservateur) et bien réalisés dans tous les détails avec un marketing adapté que VW est devenu leader incontesté. Le succès de la C5 jusqu’en Allemagne montre que PSA sait bien faire.

Mais nous avons aussi l’hypocrisie du syndicat majoritaire à Aulnay, la CGT, qui ne fait rien qu’envenimer la situation sociale depuis des années, poussant indirectement à choisir des usines plus calmes socialement. La culture de la négociation et la CGT, ça fait 2 et avec un patronat qui fait pareil, les dossiers n’avancent pas comme cela a été le cas depuis 10 ans. Et le salarié trinque… Mais niveau négociation, le ministre du redressement productif sait faire… dans l’esbroufe. Avec son compère Bartolone, nous avons droit à un grand numéro de « mais non, on savait pas », digne de l’UMP. Ils ne pouvaient ignorer ce qui était une évidence pour tous ceux qui travaillaient de près ou de loin à Aulnay. De loin car si on parle de 3500 Emplois, on oublie tous les prestataires, fournisseurs de pièces, maintenanciers, logisticiens, etc.. Toutes les sociétés extérieures qui gravitaient autour du site. Lorsqu’il s’agissait de revendre des usines de pièces (Dijon, Barre Thomas), le repreneur était un équipementier. Mais pour une usine terminale de cette taille, le problème est différent, sans parler de la spéculation immobilière du secteur.

Pendant ce temps, Toyota matraque son made in France (tiens, c’est aussi un petit modèle ! ) dans ses pubs pour redresser la barre. Renault fait oublier que Flins ou Sandouville sont en danger et que Tanger va alimenter en Dacia Lodgy toute l’Europe. En réalité, la crise fait évoluer le marché en le scindant de plus en plus en 2 catégories : Low Cost et Premium. Ce sont logiquement les généralistes qui n’ont pas su se positionner, qui trinquent en premier : Fiat-Chrysler, PSA, Opel. Les exceptions sont Ford dont la position reste encore fragile en Europe, Hyundai qui est en phase de conquête et VW qui a un positionnement bourgeois presque premium mais dont Seat peine à trouver sa place dans le groupe VAG.

Un repositionnement de cette nature est long et couteux. L’alliance de PSA avec GM, si elle profitait à quelques coûts (logistique, achat), n’a rien de productif coté produit (sinon dénoncer l’accord sur l’hybride avec BMW et peut être un jour celui avec Mitsubishi sur l’électrique) où GM ne peut aider qu’avec sa filiale Daewoo-Chevrolet, bien moins efficace dans le low cost que Hyundai Kia. Pire encore, le marché iranien, si florissant pour PSA, est abandonné pour de sombres raisons politiques (influence de la politique US? ) et on va apprendre aux Chinois à faire du premium. Finalement, l’alliance Renault Nissan Daimler paraît plus en phase avec ce futur marché, même si cela sera très complexe à gérer. Avec une baisse de 7,65% de l’action PSA, les marchés ont donné leur avis : en 5 ans, division par 4 pour l’action Renault, par 8 pour PSA, par 2 pour Fiat, Ford, GM et stabilité pour Toyota, Honda, Nissan, VW.  Une chose est sûre : il ne faut pas oublier que l’essentiel est le produit et que derrière la réussite d’un produit, il y a des humains.

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Nicolas Roberti
Nicolas Roberti est passionné par toutes les formes d'expression culturelle. Docteur de l'Ecole pratique des Hautes Etudes, il a créé en 2011 le magazine Unidivers dont il dirige la rédaction.

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