Le chantier du futur Musée & École Giacometti a débuté en novembre 2025, autour de l’ancien bâtiment voyageurs de la gare des Invalides, dans le 7e arrondissement de Paris.
En 2028, la Fondation Giacometti ouvrira ici un lieu inédit en France par son format : un musée (collection permanente et expositions temporaires) doublé d’une école de création ouverte à tous, installés dans le bâtiment historique de l’ancienne gare (1900) et dans les sous-sols de l’esplanade.


Pour l’instant, l’ancienne gare se devine derrière de grands panneaux de chantier et des visuels annonçant le projet. À terme, l’ensemble doit déployer environ 6 000 m² : une collection patrimoniale de premier plan, des espaces d’expositions pluridisciplinaires et une École de création conçue comme un prolongement vivant de l’esprit d’atelier. La Fondation annonce aussi un lieu pensé pour durer au quotidien : cour végétalisée, librairie et cafés-restaurants, afin de faire de l’adresse une destination culturelle, mais aussi un point de vie.
Un musée entre exposition permanente et rendez-vous temporaires
Outre les expositions temporaires, le musée proposera un parcours permanent rassemblant plusieurs centaines d’œuvres d’Alberto Giacometti (1901-1966) : sculptures (plâtres et bronzes), peintures, dessins, ainsi que des ensembles et archives liés à l’atelier et aux recherches de l’artiste. L’architecture est annoncée comme généreuse en lumière naturelle et en respirations, afin d’offrir des conditions de présentation à la hauteur d’une œuvre où la présence se joue souvent à un fil : une silhouette, un visage, une distance.
Le projet s’inscrit aussi dans une histoire de lieu singulière. Édifiée pour l’Exposition universelle de 1900, la gare des Invalides a connu plusieurs vies avant de devenir un bâtiment largement fermé au public. Sa reconversion en musée réactive donc une question parisienne récurrente : comment redonner un usage collectif à un site patrimonial et stratégique, sans le figer en décor.
L’École de création : l’esprit d’atelier, du geste amateur au geste exigeant
L’École de création, associée au musée, s’adressera à tous. Elle promet une approche fondée sur l’expérimentation et l’esprit d’atelier, entre beaux-arts, arts appliqués et métiers d’art, pour une pratique aussi bien amatrice que professionnelle. Autrement dit : faire de Giacometti non seulement un nom à contempler, mais une œuvre à interroger par le faire, par le regard, par le dessin, par la matière.

Repères biographiques
Sculpteur, peintre et graveur, Alberto Giacometti naît le 10 octobre 1901 à Borgonovo, dans la vallée de la Bregaglia (Suisse), près de la frontière italienne. Son père, Giovanni Giacometti (1868-1933), peintre impressionniste, joue un rôle décisif : l’atelier familial est une école du regard, et le jeune Alberto y réalise très tôt dessins, estampes et gravures, au contact direct de la pratique.

Après une formation à Genève (École des beaux-arts puis École des arts et métiers), Giacometti multiplie les voyages d’étude. En 1921, l’Italie — et notamment Rome — le marque profondément : églises, musées, mosaïques, fresques, sculptures antiques nourrissent ses carnets. À Paris, où il s’installe au début des années 1920, il découvre aussi les avant-gardes (cubisme, arts extra-européens, modernités), qui élargissent son vocabulaire formel sans jamais remplacer son obsession centrale : la justesse d’une présence.
Entre 1930 et 1935, il participe au mouvement surréaliste. Cette période, loin d’être un simple épisode, laisse une trace durable dans sa manière de penser l’objet et l’image : formes à fonctionnement symbolique, assemblages, déplacements du réel, puissance de l’onirique. Après la rupture avec le groupe, Giacometti revient avec une intensité redoublée à la figure, au visage, à l’épreuve du modèle.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, il se replie en Suisse. À partir de 1944-1945, son travail bascule vers ce qui deviendra sa signature d’après-guerre : des figures de plus en plus minces, dressées, comme usées par l’air et le temps, mais paradoxalement indestructibles dans leur entêtement à tenir debout.


Son œuvre met en place un système d’échos entre l’humain et le monde : une tête comme une pierre, un buste comme une montagne, une figure comme un arbre. Mais ces analogies ne relèvent pas de l’illustration : elles disent plutôt la façon dont Giacometti « mesure » la réalité en la reconduisant à des intensités simples (verticalité, densité, distance, silence). Ses portraits, peints ou sculptés, ne cherchent pas l’effet psychologique : ils rendent une altérité irréductible, quelque chose qui se dérobe au moment même où l’on croit saisir.
Il pratique aussi l’estampe sous de multiples formes (bois, burin, eau-forte, aquatinte), et utilise largement la lithographie à partir de la fin des années 1940, prolongeant sur le papier cette vibration inquiète du trait qui caractérise ses dessins.

En 1958, il est sollicité pour imaginer un monument destiné à une place devant le siège new-yorkais de la Chase Manhattan Bank (projet développé jusqu’au début des années 1960). Là encore, l’artiste travaille l’espace à partir de plans et de maquettes, construisant mentalement une scène urbaine à la mesure de ses figures : l’immense et le fragile, le minéral et le vivant.
Alberto Giacometti meurt le 11 janvier 1966 à l’hôpital cantonal de Coire (Suisse), d’une péricardite à la suite d’une bronchite chronique. Il est enterré à Borgonovo, sa ville natale. Célébré de son vivant, il demeure aujourd’hui l’une des références majeures de la sculpture du XXe siècle, à la fois populaire et inépuisable pour l’histoire de l’art.
Infos pratiques
Gare des Invalides — 2, rue Robert-Esnault-Pelterie, 75007 Paris.

