L’Opéra de Rennes, en partenariat avec le couvent des Jacobins, présente Carmen danse au centre des Congrès du 19 au 23 décembre 2022. La compagnie nationale d’Espagne éblouissante de talent émerveille les amateurs de danse.

C’est un somptueux cadeau de fin d’année que le nombreux public présent dans l’auditorium du couvent des Jacobins a reçu de la part d’un des fleurons de l’art ibérique. Les une heure et quarante minutes du spectacle présenté par la compagnie nationale de danse d’Espagne ont été époustouflantes de grâce et de beauté.

Carmen danse est un spectacle bien rodé. Créé en avril 2015 au théâtre de la Zarzuela (Madrid, Espagne), il est l’œuvre du chorégraphe suédois Johan Inger. Couronné du prix Benois de la danse en 2016, l’auteur récolte une des plus prestigieuses récompenses en matière de chorégraphie.

© Julien Mignot

Si vous vous attendez à un copier-coller de l’opéra de Georges Bizet qu’on aurait agrémenté de scènes de danse, vous risquez d’être déçu. La vision personnelle de Johan Inger agrémente le récit d’un personnage nouveau, un enfant, témoin involontaire des événements, obligé de constater les manifestations de la violence et de la jalousie. Le livret offert à chacun des spectateurs précise que le côté impersonnel du décor et des costumes abolit toute référence explicite à l’Espagne. C’est peut-être le seul bémol de la soirée car les robes à volants, comme certains éléments de la gestuelle – sans oublier le costume du torero rappelant furieusement le fameux « traje de luces » que porte un des danseurs – sont autant de rappels d’une certaine esthétique ibérique.

C’est de peu d’importance si l’on veut bien se rappeler que Carmen se déroule à Séville, le parti pris du metteur en scène ayant au moins l’avantage de nous éloigner d’une Espagne de pacotille et de nous situer dans une certaine intemporalité. Seconde remarque portée sur le livret : la musique de Bizet est revisitée par Rodion Shchedrin et Marc Alvarez… il n’en fallait pas moins pour froncer les sourcils, marque évidente d’un début de désapprobation. Revisiter Bizet, et puis quoi encore ! Mais en réalité, la partition de Carmen apparaît en filigrane et rappelle avec clarté les principaux tableaux de l’œuvre de Bizet. Les airs les plus célèbres apparaissent comme des leitmotivs et nous replacent dans l’intrigue, mais laissent rapidement la place à une musique plus adaptée à la danse. Cette construction contribue à la cohérence du spectacle et nous rassure totalement quant à l’usage qui est fait de la partition initiale. Il n’y a aucun irrespect, seulement de belles évocations.

À l’ouverture du rideau, en bon Français volontiers bougon, la quasi absence de décor nous invite une fois de plus à une certaine défiance. Mais là encore, pour notre plus grand plaisir, notre grogne sera battue en brèche. Les éléments modulaires, sortes de colonnes verticales à trois faces, sont utilisées de manière si ingénieuse, allant jusqu’à danser avec le ballet, que nous en restons bouche bée de ravissement.

© Julien Mignot

Le succès de cette belle soirée est cependant majoritairement dû au talent éclatant des danseurs de la compagnie nationale de danse d’Espagne. Issus pour beaucoup de la péninsule, ils arrivent aussi d’autres horizons : Corée, Italie, Cuba, quelques noms sonnent même furieusement français, mais peu importe. Ce qui les lie irrémédiablement, c’est cette passion pour la danse, cet indiscutable talent patiemment bâti à force d’heures de travail inlassablement répétées et qui leur font mériter notre admiration et notre reconnaissance. Dans le rôle de Carmen, Kayoko Everhart est magique, elle donne corps à un personnage complexe, tantôt fragile, tantôt dominant mais toujours fort. Elle est accompagnée d’Alessandro Riga, éblouissant de maîtrise, nous offrant un Don José d’une émouvante vérité. On aurait bien sûr envie de tous les citer pour les remercier à hauteur de leur offrande et ce serait largement mérité.

Il n’est pas injuste de considérer que nous avons eu beaucoup de chance. Arrivant de Cuba et attendue à Rome dans les jours qui suivent, la compagnie nationale de danse d’Espagne a réservé à Rennes les quelques dates de son passage en France. Sans vouloir être oiseau de mauvais augure, trouver une place libre risque d’être une tâche bien difficile. Il n’est pas interdit d’essayer et croyez-nous, le jeu en vaut la chandelle.

Infos pratiques

Carmen – du 19 au 23 décembre 2022 au couvent des Jacobins à Rennes. Horaires du spectacle : 20 h, durée : 1 h 30. À partir de 7 ans. De 4 à 36 €.

https://www.opera-rennes.fr/fr/evenement/carmen-compagnie-nationale-de-danse-despagne

Article précédentCalendrier de l’Avent 2022 spécial cinéma
Article suivantDinard. Dernier bain place de l’Ecluse samedi 31 décembre
Thierry Martin
thierry.martin [@] unidivers .fr

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici