A l’heure où la consommation prend une tournure obsessionnelle, essayons d’échapper aux forces de l’axe dépensier et de nous cultiver sur le sens des fêtes de fin d’année. Voilà Mon réveillon à deux balles (boisson non comprise) !

 

Nos ancêtres les gaulois balisaient un max quand ils voyaient les jours diminuer et pensaient donc : « si çà continue, le ciel va nous tomber sur la tête ». Alors ceux qui avaient lu Desproges décidèrent de « vivre heureux en attendant la mort », élevèrent des gros cailloux et firent la fête autour (on peut continuer à la faire sur le site mégalithique de la Roche aux Fées).

Les Perses de leur côté faisaient la java en rendant un culte à Mithra, qui se concluait par le sacrifice d’un taureau. Les Romains s’en inspirèrent et firent big teuf lors des Saturnales pour célébrer au solstice d’hiver la naissance du soleil invaincu. Les hommes et les femmes portaient des guirlandes autour du cou et s’offraient des cadeaux, les esclaves devenaient les maîtres et inversement. Le Sol Invictus correspondait à la naissance d’un jeune dieu solaire, censé surgir d’un rocher ou d’une grotte sous la forme d’un enfant nouveau-né. Vous suivez ? Alors on chante : « il est né, le divin enfant, jouez hautbois, etc… »

Les chrétiens auraient donc tout copié ! çà vous en bouche en coin, non ? çà vous bouche surtout l’estomac parce que, pour saluer l’avènement, on ingurgite, « à dose limite avant éclatement, suffisamment de victuailles hyper caloriques pour épuiser en un soir le budget mensuel d’un ménage moyen » d’après l’UNICEF. «L’équivalent en riz complet de l’ensemble foie gras-pâté en croûte-bûche au beurre englouti par chaque chrétien au cours du réveillon permettrait de sauver de la faim pendant un an un enfant du Tiers-Monde sur le point de crever le ventre caverneux, le squelette à fleur de peau, et le regard innommable de ses yeux brûlants levé vers rien sans que Dieu s’en émeuve, occupé qu’il est à compter les siens éructant dans la graisse de Noël et flatulant dans la soie floue de leurs caleçons communs, sans que leur cœur jamais ne s’ouvre que pour roter ». Hips !  (in Dictionnaire superflu à l‘usage de l’élite et des bien nantis).

Pour s’acheter une bonne conscience, on a décidé de sauver un enfant du tiers-monde en ne faisant pas ripaille. Mais pas question de supprimer une soirée de fête – des fois que les dieux nous tomberaient sur la tête! Avec une dizaine de potes, on relève le défi et on décide d’organiser un réveillon à 2€ par personne. Direction Noz, Netto, Leader Price, la fin de marché et les sous-bois (pour glaner dans les pas d’Agnès Varda)

Liste des courses

Entrée

– Velouté aux légumes du soleil  (0,99 € chez Noz)

– 5 kg de carottes  (0,99 € chez Leader Price). Avec 5 kg, vous friserez l’overdose, mais obtiendrez ce joli teint orangé genre « retour de Megève ».

Plat

– 1kg d’anneaux d’encornets (4,90 € chez Noz)

– 500 gr de polenta (0,75 € chez Noz)

– Salade de mâche (3 € au marché)

Dessert

–  Bûche au chocolat (3,50 € chez Nooz)

– Clémentines (2,50 € les 2 kg au marché)

Faites les comptes : çela ne dépasse pas 20 €. Donc 2€ par personne !

A table !

Précuisez les carottes, coupez les en morceaux que vous ferez glacer dans un mélange beurre-huile, avec quelques graines de cumin et des brins de romarin : c’est plus sain que des cacahuètes et parfait pour l’apéro.

Réchauffez le velouté et servez le dans des verrines – c’est plus festif !

Préparez la polenta, en y ajoutant des raisins secs (vous n’en avez plus ? Demandez-en au voisin qui vient souvent vous réclamer de la farine, des œufs ou des clopes)

Faites revenir le kg d’encornet dans une sauce flambée au Ricard (il vous en reste bien une gorgée)

Préparez la salade de mâche, en y ajoutant quelques tranches de pommes, des herbes ou des graines sauvages, ou – si vous n’êtes pas glaneur – quelques cerneaux de noix.

Si la bûche industrielle ne vous tente pas, essayez de faire une bûche-pudding avec du pain rassis (que votre gentil boulanger vous aura offert) ajouté à du lait chaud, du sucre, des œufs, des raisins gonflés dans du rhum et quelques épices. Au démoulage (d’un moule à cake), faites l’ « écorce » de votre bûche avec un mélange chocolat fondu-beurre (prix de revient : entre 4 et 5 €).

Que boit on ? Soit vous restez dans l’ascète attitude et vous accompagnez votre diner de tisanes chic aux herbes, aux fleurs ou aux épices. Ou vous suivez le main stream gaulois avec cervoise, hydromel et… jus de la treille.

Une réveillon trop de la balle, mais à deux balles. Vraiment !

 

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Marie-Christine Biet
Architecte de formation, Marie-Christine Biet a fait le tour du monde avant de revenir à Rennes où elle a travaillé à la radio, presse écrite et télé. Elle se consacre actuellement à l'écriture (presse et édition), à l'enseignement (culture générale à l'ESRA, journalisme à Rennes 2) et au conseil artistique. Elle a été présidente du Club de la Presse de Rennes.

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