Petit festival, grands invités. Au Festival Transversales Cinématographiques (partenaire Unidivers.fr) qui vient de s’achever, nous avons particulièrement aimé écouter Michael Lonsdale. Vieux monsieur tout courbé, langue bien acérée.

 

Né d’une famille franco-anglo-irlandaise, Michael Lonsdale a découvert le monde de la comédie au Maroc où il était « parti pour six mois en 1939 et y est resté 10 ans ». Il essayait de se glisser dans les salles de cinéma – interdites au moins de 18 ans – et prêtait sa voix à des feuilletons radiophoniques. Rentré à Paris, il souffre de grosses lacunes culturelles que deux personnes vont combler : son oncle Marcel Arland (écrivain à la NRF, élu à l’Académie française en 1968) et la professeure d’art dramatique Tania Balachova. L’idée de jouer s’est ancrée en lui sur cette révélation : « tu diras au public des choses que tu ne diras à personne d’autre ».

Cette proximité s’est confirmé avec une filmographie impressionnante où il a joué parfois le méchant (dans James Bond), souvent un flic (avec Deville, Grangier, Lautner, Mordillat notamment), régulièrement des grands de ce monde (Balzac avec Bénégui, Dom Luis avec Jacques Weber, sénateur avec Ruy Guerra, président de la République avec Joël Santoni, vice-consul avec Marguerite Duras, ministre avec Costa-Gavras, Louis XVI avec James Ivory, etc.).

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Michael Lonsdale au festival de Cannes 2010 lors de la présentation du film Des hommes et des dieux

Orson Welles a été le premier à confier un rôle de prêtre (dans Le procès) à cet homme profondément religieux qui s’est converti au catholicisme romain l’année de ses 22 ans. On le verra en évêque Barberini dans Galileo de Joseph Losey, en moine dans Au nom de la rose  de J.J. Annaud, en soutane chez Louis Malle, Arthur Joffé ou Milos Forman, et même en archange avec Balasko ! Il lui faudra attendre le rôle de Frère Luc dans Des hommes et des dieux de Xavier Beauvois pour recevoir un prix, le César du meilleur acteur dans un second rôle (on ne rit pas !). Qui a vu ce film bouleversant se souvient de la scène où une jolie ado algérienne confie au moine qu’elle va se marier bientôt avec un homme choisi par son père.

Elle : « Comment on sait qu’on est amoureux ? » Lui parle de désir, d’attirance, de cœur qui bat, d’un état de fait, d’espoir de bonheur. Elle : « t’as déjà été amoureux ? » Lui : « Oui, plusieurs fois, et puis un autre amour est arrivé, plus fort ». « Cette première scène a été complètement improvisée », raconte Lonsdale, visiblement « fier d’avoir incarné cet homme exceptionnel, médecin de formation ».

Autre belle rencontre, simple et pro : Steven Spielberg. Il se souvient de « l’atmosphère très sympa lors du tournage de Munich ». Sa vie au cinéma n’a pas été pour autant un long Jourdain tranquille. Il a détesté tourner avec Marcel Carné : « il est arrivé au sommet grâce à Prévert. Après, lente dégringolade, il est devenu insupportable, féroce. Il insultait les figurants et la comédienne Catherine Rouvel. Heureusement, il y avait Jacques Brel, gentil, formidable ». D’autres mauvais souvenirs ? « Autant-Lara, Jacques Clément… Paix à leurs cendres », conclut Lonsdale avant de lancer « on peut finir sur quelque chose de plus joyeux ? ».

Là, un étudiant le relance sur la religion. Michael Lonsdale évoque ses études sur Mahomet, Bouddha et demande : « Vous n’aimez pas Dieu ? Lui vous aime beaucoup et il vous conduit vers le bonheur, la générosité ». Logique quand on sait qu’il a mis en scène des spectacles sur Sœur Emmanuelle, Thérèse de Lisieux et saint François d’Assise… et qu’il est président d’honneur du Festival du Silence. Moins médiatique que le Festival de Cannes, et pourtant dans la même ville au même moment, celui-ci se tient à dix minutes de la Croisette : dans une des plus anciennes communautés monastiques d’Europe, à l’abbaye de Saint-Honorat, sur les iles de Lérins. Ite, cinema est !

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Marie-Christine Biet
Architecte de formation, Marie-Christine Biet a fait le tour du monde avant de revenir à Rennes où elle a travaillé à la radio, presse écrite et télé. Elle se consacre actuellement à l'écriture (presse et édition), à l'enseignement (culture générale à l'ESRA, journalisme à Rennes 2) et au conseil artistique. Elle a été présidente du Club de la Presse de Rennes.

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