Trois jours de Trans. 1, 2, 3 :

Jeudi 1er décembre

C’est sous une pluie battante que débutent les Trans. De mauvais augure ? Trois magiciens se sont donné rendez-vous à la Cité pour ensorceler le temps. Bien que court, le set dark-intimiste de Group Rhoda (voir l’entretien) est salué par le public. A sa suite, la performance scénique assez mièvre de Michael Kiwanuka à la Cité déçoit et confirme que l’artiste est à écouter en salon. Enfin Bumpkin Island (voir l’entretien), cette jeune mais imposante formation issue de Loudéac, réussit le passage qui conduit de l’amorçage du succès à son développement. Le final au milieu du public est particulièrement apprécié.

Transition vers le Liberté avec en tête Zum Zum, Rakiah on the rocks, autrement le set d’El Magnifico (voire l’article). Avant cela, Vinnie Who, ado décomplexé marchant sur les pas de Mika est divertissant. Si ce n’est un bémol général : le son au Liberté manque franchement de puissance. Ce constat dessert toute la soirée. Donc également avec Lewis Floyd Henry : une figure tout droit sortie d’un film de Jarmush, genre dead man. La force de son solo de ne parvient pas à inverser la tendance ; ses interprétations ne suscitent qu’une moyenne adhésion. Ah, enfin, le magnifique ! Nouvelle déception : c’est sympa mais mou du genou, alors qu’il aurait fallu le contraire !

La suite de la soirée s’est déroulée a observé Vincent, guitariste de Bumpkin Island, lentement tombé dans une torpeur douce et heureuse au bar du carré en alternant conversations constructives et polémiques divertissantes avec les confrères-vedettes du Mensuel de Rennes et d’Ouest-France. Les indépendants, les syndiqués et les spirituels – un cocktail… roboratif !

Vendredi 2 décembre

Sachez tout de suite qu’Unidivers est allergique au parc Expo : c’est trop loin, grand, froid, c’est moche et le son moyen. Quand on a des valeurs, on s’y tient ! Bref, personne de l’équipe n’a voulu se perdre dans la bétaillère. Mais nos confrères du Mensuel de Rennes étant moins réticents, ils étaient au rendez-vous ; n’hésitez pas à consulter leurs pages.

A l’Ubu, le set de Shiko Shiko n’a guère laissé le public songeur. Ces Lillois japonisants opèrent un mélange de genres original et puissant. Sonore comme le corps nié de Mishima, gracieux comme du Kawabata, Masturbation (traduction de l’onomatopée japonaise qu’est leur nom) sublime du sexe baroque dans une improbable transmutation bruitiste. Complexe, mais accessible. Un groupe prometteur. Qui plus est, non dénué de dimension spirituelle (voir notre entretien).

Les Néerlandais de Moss ont mis le feu au 4bis. Un feu étrangement mélancolique. Silent Hill est un morceau animiste psychédélique d’une grande puissance évocatoire. Bref, 50 minutes qui ont ensorcelé les jeunes filles et… tout le monde. Gageons que leur nationalité ne desserve pas leur succès.

A la cité, Haight Ashbury a parfaitement fait ce que fait le couple néo 70’s : du revival flower power. Peut-être un soupçon trop formaté. Voyage écolo-psychédélique qui échappe à l’ornière de la touche vintage grâce à des arrangements pertinents. Avec des inspirations de Jefferson Airplane, des Beatles et Alanis Morissette, les médiations techniques viennent épauler la voix. Cela pourrait être la musique de Virgin Suicides à Ecolotown. Une pub pour la première Always recyclable ? 

Sallie Ford prend la suite avec son groupe, The Sound Outside. La chanteuse de Portland est comme la soeur d’un Tom Waits fraichement rasé. Si le coffre d’Amy Winehouse n’est pas là, ça fait tout de même du bien !

Séparation en deux groupes de l’équipe. Direction l’Aire libre à la demande de Saint Augustine pour rencontrer le directeur de Kutu Folk et écouter les travaux du label. Un gentil moment en compagnie d’un (petit) public totalement acquis. Le duo d’Evening hymns distille une folk de bonne qualité mais nombriliste. A la fin de la soirée, la dizaine de groupe que compte le label se retrouve pour offrir tous ensemble une joyeuse et foutraque performance, laquelle n’échappe pas à une certaine répétition. Répétitif et égocentré, deux adjectifs que certains prêtent au projet Kutu dans son ensemble en parallèle des bonnes valeurs revendiquées : éthique, artisanat et participation. En l’état, les incohérences d’une communication défaillante ne prêchent pas en faveur d’un développement autre que local.

Au Dejazey, Gabriel Sullivan enflamme une salle acquise à sa cause. On n’est pas tous fan (question de goût) de ce Calvin Russel aux accents de Caracas (voir l’article).

A la Place, Lou Lesage chavire les vieux rockers des Trans et les midinettes au look recherché. Un concert de pop sage (trop?) ponctué par la bouille craquante de la chanteuse (voir l’article).

 

Samedi 3 décembre

A l’heure du déjeuner, un entretien avec Sylvain Taillet au sujet des Trans et du marché du disque en général se déroule dans une ambiance de franche rigolarde (voir l’entretien).

L’après-midi, à l’Ubu, le haut perché Mein Sohn William dévoile aux spectateurs le fonctionnement de son atelier de création psychiatrique. Violence primitive et chamanisme à tous les étages (voir notre entretien).

Au 4bis, les délicieuses Suédoises de Giana Factory conquièrent le public en un tour de main. Main que plusieurs messieurs auraient aimé baiser.

A la cité, trois formations sont présentes pour le dernier concert des Trans 2011 dans cette salle mythique de Rennes (la politique de la municipalité rennaise à son égard reste peu claire). Epic Rain a livré un concert qui n’avait rien à voir avec ce qu’il faisait jusqu’ici. La profondeur mélancolique antérieure est abandonnée au profit d’un cabaret punk façon Tiger Lily. Déroutant. Ghostpoet a interprété un show un peu trop formaté. Backpak Jack a bien fini la soirée grâce à un hip-hop bien maîtrisé.

A La Place, Hyphen Hyphen méduse l’assistance qui en redemande (voir l’article)

Rien à ajouter. Ah si, il semble que les inconnus Wolf People ont surpris tout le monde et connu un véritable triomphe malgré l’heure tardive au Parc Expo. Retrouvez l’annonce de leur venue aux Trans par Unidivers au mois d’octobre (voir l’article).

Et pour voir les Trans en images, c’est ici.

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Nicolas Roberti
Nicolas Roberti est passionné par toutes les formes d'expression culturelle. Docteur de l'Ecole pratique des Hautes Etudes, il a créé en 2011 le magazine Unidivers dont il dirige la rédaction.

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