L’opéra de rennes n’avait jamais vu cela ! De fait, la visite du « Nishtiman du Kurdistan » a attiré un nombre important des membres de la communauté kurde. Sans doute un peu impressionnés par la majesté de l’endroit, ils se sont très rapidement approprié les lieux ; ils ont assisté au spectacle, très détendus, voire amusés du succès remporté par la musique de leur pays natal. Ce fut pour eux l’occasion de recevoir l’hommage amical du public français, en mémoire de Memet Isiklar un de leur compatriote, très connu localement, tombé sous les balles de l’Etat islamique il  y a quelques jours.

 

Nishtiman kurdistanParler de succès est peu dire. Le public totalement conquis a manifesté avec enthousiasme sa satisfaction. Et franchement, elle est méritée ! Ces musiciens ont submergés les Rennais de l’incroyable énergie de leur spectacle et par la puissance évocatrice de leurs lignes mélodiques. Mais petit rappel géographique préliminaire…

le Kurdistan, s’il est une nation, n’est pas à proprement parler un pays. Il s’étend sur l’Iran, l’Irak, la Syrie et enfin la Turquie. Cela n’empêche pas un fort sentiment d’identité qui se traduit par une musique variée, fruit de la rencontre des traditions de quatre influences musicales kurdes. C’est donc un pari que représente le groupe Nishtiman, puisqu’il rassemble des représentants de ces différentes influences. La surprise, c’est de trouver en leur sein Leila Renault, contrebassiste française et Robin Vassy, percussionniste de la même origine.

Sans doute pour ne pas écorcher nos très occidentales oreilles, c’est très progressivement que Sohrab Pournazeri va apprivoiser l’auditoire par une mélodie étrange qui semble nous raconter une histoire triste. Elle est jouée sur un luth à long manche, le tambûr avec la dextérité d’un guitariste de flamenco. Il est peu à peu rejoint par Hussein Zahawy, qui ne se révèle pas moins adroit et démontre toutes les nuances possibles d’un instrument à percussions. Calme au départ, cet air va monter en puissance, il parait avoir pour destination de faire entrer en transes. L’incroyable virtuosité des deux exécutants est époustouflante et prépare avec adresse l’arrivée des autres membres du groupe.

La chanteuse Sara Eghlimi apportera la note féminine qui manquait jusqu’alors et sa voix tranchera avec les solides organes mâles présents sans complexes dans cette musique populaire. L’entrée la plus remarquée sera sans doute celle de Ertan Tekin, colosse Turc de près de 2 mètres de haut, large d’épaule, barbu et chauve autant qu’il est possible et qui s’avérera être un virtuose de la zorna (instrument à vent dont le son rappelle la bombarde)….et du balaban ou duduk (instrument à vent d’origine arménienne à anche double). Il jouera seul l’introduction du quatrième morceau ; le son grave et empreint de mystère qu’il extrait de sa flute installera un climat puissamment poétique soutenu par une discrète basse continue.

C’est avec un nouvel instrument à corde peu habituel que Sohrab Pournazeri va continuer à exercer sur le public son influence hypnotique. Le « Kamânche » fort de 4 cordes métalliques est d’origine Iranienne, même si l’on retrouve des instruments de ce type dans de nombreuses cultures, comme l’erhu en Chine, il est bien spécifique et sa sonorité aigrelette n’est pas sans rappeler celle de la vielle.

Nishtiman kurdistanLa dimension festive, la nécessité de créer du lien sont omniprésentes dans la musique Kurde. Les voix d’hommes et de femmes dialoguent dans un premier temps puis chantent à l’unisson avant de se séparer à nouveau. « Depuis des airs de danse très ruraux, jusqu’au souvenir des confréries soufies, en passant par l’évocation des fêtes, si importantes dans la tradition Kurde, c’est une grande humanité qui s’exprime dans cette musique dynamique et riche en couleurs ».

Le cycle « Divas du monde » proposé par l’opéra de Rennes vient de remporter un nouveau succès. Preuve est faite que le public breton, souvent prudent, n’en est pas moins curieux et prompt à s’enthousiasmer quand l’occasion de faire de stupéfiantes découvertes lui est donnée. C’est l’occasion de vous convier les mardi 7 et mercredi 8 avril à venir écouter Annie Ebrel, chanteuse Bretonne s’exprimant dans sa langue natale et qui nous offrira son spectacle « Le chant des soupirs ».

SOHRAB POURNAZERI, COMPOSITION, TANBUR, KAMANCHE, VOIX
HUSSEIN ZAHAWY, DIRECTION ARTISTIQUE, PERCUSSIONS
SARA EGHLIMI, VOIX
GORAN KAMIL, OUD
ERTAN TEKIN, ZORN, BALABAN, DUDUCK
ROBIN VASSY, PERCUSSIONS
LEILA RENAULT, CONTREBASSE

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Thierry Martin
thierry.martin [@] unidivers .fr

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