À l’apogée de son talent, la romancière britannique Maggie O’Farrell publie un cri de vie : I am, I am, I am (éditions Belfond). Un livre d’une profonde humanité !

I am Maggie O'Farrell

Attention précision : ce livre n’est ni un roman, ni véritablement un essai, c’est avant tout un recueil de textes plumetés au fil des années, au fil de la vie, des rencontres, des joies comme des épreuves. Et c’est d’une justesse qui marque et qui en appelle à nos propres mémoires, que l’on soit femme ou homme, parce qu’universelle tout autant qu’intemporelle.  Et ce, au-delà des sujets abordés par l’auteure, qui ne manque ni d’à-propos, ni d’audace, ni de sensibilité, ni de talent.

À travers différents tableaux, Maggie O’Farrell revisite l’enfance, l’évolution du corps, les relations à la mère comme celles la liant à ses enfants. Dans des chapitres qui s’enchaînent et parfois se déchaînent, le corps comme l’esprit s’expriment tant dans ses attentes que dans ses joies comme dans ses peines. Rien n’est exclu : les émotions, les angoisses, la souffrance, la force de la maladie qui ronge et qui grignote, qui handicape tout espoir de guérison parfois. Et le corps nous apprend que l’on peut vivre avec, quoi qu’on en dise, parce que la force de vivre aboutit souvent à une forme de résolution sinon de sagesse.

De nombreuses phrases décrivent avec précision et subtilité toute l’énergie que l’on met dans l’amour de son, de ses enfant(s), malgré les affres de l’existence. Au-delà des afflictions qui touchent nos gosses, on les aime tels qu’ils sont parce que les sentiments sont plus forts. Et ce, malgré les peurs, le regard des autres…

La plume, telle une caméra, visite ainsi le cou, la colonne vertébrale, la tête, les poumons, le cerveau, le cœur… Ainsi, l’auteure donne la parole au corps qui exprime tous ses ressentis. C’est souvent étonnant, en tout cas c’est passionnant, ces photos (qui n’ont rien de clinique) dénotent d’une observation longue, patiente et très profonde.

Le chapitre consacré à la fille de la narratrice est une véritable leçon de tolérance et d’acceptation au-delà de toutes formes de jugement.

À l’issue de ce voyage intérieur, on peut imaginer que le lecteur, la lectrice ressortent sinon rassuré(s) sur le fonctionnement du « moi », plus informé(s) et surtout plus empathique(s) tant à son propre égard qu’à celui des autres.

Maggie O’Farrell, I am, I am, I am, traduit de l’Anglais (Ir) par Sarah Tardy, Paris, Éditions Belfond, 246 pages. Parution : mars 2019. Prix : 21,00 €.

Maggie O'farrell

Née en 1972 en Irlande du Nord, Maggie O’Farrell a grandi au pays de Galles et en Écosse. Après des études littéraires à Cambridge, elle devient journaliste. À la suite du succès de son premier roman, Quand tu es parti (Belfond, 2000 rééd. 2017 ; 10/18, 2003), elle abandonne sa carrière de rédactrice en chef des pages littéraires de The Independant on Sunday pour se consacrer à l’écriture. Tous ses romans sont parus chez Belfond et repris chez 10/18 : La maîtresse de mon amant (2003), La Distance entre nous — lauréate du prix Somerset Maugham (2005), L’Étrange disparition d’Esme Lennox (2008), Cette main qui a pris la mienne — prix Costa 2010 du meilleur roman (2011) —, En cas de forte chaleur (2014) — sélectionné pour les Costa Book Awards et finaliste des National Book Awards britanniques 2014 – et Assez de bleu dans le ciel (2017).

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Christophe Maris
Christophe Maris est journaliste et écrivain, agrégé de Lettres modernes. Il collabore à plusieurs émissions de TV et radio et conçoit des magazines pour l'enseignement où il a oeuvré une quinzaine d'années en qualité de professeur de lettres, d'histoire et de communication.

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