Gwendoline va de succès en succès en toute désinvolture. Après des débuts confidentiels, le duo de musiciens fondé à Rennes prend d’assaut la scène française avec son premier album Après c’est gobelet !, réédité dans une nouvelle version en janvier 2022. Un univers cold wave poignant, une plume pleine d’humour capable d’hymnes générationnels, c’est la recette qui a su séduire déjà parmi les meilleurs festivals et PMU bretons, et bientôt du reste de la France !

gwendoline
Le duo Gwendoline est composé de Michaël Olivette (gauche) et Pierre Barrett (droite).

Gwendoline est le duo de Mickaël Olivette et Pierre Barrett. Les deux musiciens presque trentenaires se sont rencontrés à Rennes il y a une dizaine d’années, alors que le groupe de l’époque de Mickaël, Olympia Fields, recherche un chanteur. Après trois ans d’existence, le projet s’achève, mais les deux garçons ne se perdent pas de vue. Quelque temps après, « on s’est retrouvés sur plein de sujets, qu’ils soient politiques ou de la vie de tous les jours. On s’est dit qu’on allait en rigoler un peu en faisant des morceaux sans vraiment réfléchir », raconte Pierre. « On voulait parler de trucs plombants et essayer d’en rire. Des fois, il y a de la caricature, un mélange d’ironie, de cynisme, d’autodérision », poursuit-il.

« Le bar résume assez bien la société »

PIERRE BARRETT

« J’suis trop indépendant, ouais j’suis trop underground »

La blague débute fin 2015 avec un premier morceau, “Foie Gras”, puis d’autres aujourd’hui disparus des Internets. « On s’en souvient même plus », avoue Mickaël. « On avait composé des bouts de morceaux pour se marrer, sans projet défini. C’est seulement à l’été 2017 qu’on s’y est vraiment mis et qu’on a fait un album », poursuit Pierre. Produisant sur ordinateur, enregistrant seulement les guitares, la basse et les voix, ils balancent des phrases sur des boucles. En français, le texte est plus parlé que chanté, déclamé. Écrivant à deux, ils chantent “ces petits problèmes qui nous embourbent l’esprit”, des bouts d’histoire et de réflexion sur leur vie de jeunes rennais un peu paumés et trouvant une boussole dans les rades et le Ricard, y compris au moment de chercher l’inspiration pour écrire. À Rennes, les deux garçons, vivant désormais à Brest et Nantes, étaient familiers du Terminus et du Bar à mines, même s’ils ont aussi zoné aux alentours de feu le Kenland, place des Lices, principalement pour y chourer des verres.

« Pour le premier album, on est beaucoup allés au bar. Dans des bars qu’on aimait, mais aussi dans ceux qu’on n’aimait pas. Le bar résume assez bien la société, les gens parlent, il peut y avoir de toutes les classes en fonction d’où on va, les gens parlent sans langue de bois, se sentent capables de dire tout ce qu’ils veulent, soit à cause de l’alcool, soit parce qu’ils sont dans un lieu qui s’y prête, qu’ils ne sont pas au travail. Regarder les comportements les uns des autres, les uns vis-à-vis des autres, écouter les discussions de comptoir de gens alcoolisés, c’était une bonne source d’inspiration, il y a des choses vraies qui se disent, des bouts de phrase qui nous éclairent, » souligne Pierre Barrett.

Reflets de ces lieux et de la façon d’y communiquer, les textes de Gwendoline cultivent la spontanéité, l’automatisme, un côté brut des paroles où transparaît pourtant une sensibilité à l’écriture, un humour fin sous la provocation affichée. Et même s’ils clament “écrire du beau comme La Bruyère, j’en ai rien à foutre, avoir la plume de Baudelaire, j’en ai rien à foutre”, ils dessinent une poésie moderne qui donne une acception plus profonde et existentielle à la philosophie de comptoir.

Inspirés par l’écriture flegmatique du groupe de rap Tête de cerf, c’est pourtant leur goût pour la cold wave qui ressort musicalement dans Gwendoline. Un penchant fort pour des groupes russes comme YTPO et Motorama, pour les Turcs de She Past Away, ou en France pour La Grande Triple Alliance internationale de l’Est, collectif comptant des artistes comme Noir Boy George, Jessica93, Ventre de biche. Leur recette s’illustre dans cette formule heureuse : la schlag wave. « Ça résume bien notre démarche sur ce projet, et comment on se voit, notre côté à l’arrache », commente Pierre.

Et Gwendoline dans tout ça ? Ce nom qu’on prêterait peut-être davantage à une artiste de chanson française, voire bretonne, ou à une DJ, n’a pas vraiment d’explication. Il est passé par hasard à leur micro pendant la composition de “Du lundi au vendredi”, la première production du duo, au moment de nommer la protagoniste du morceau. Il est resté depuis.

« on pensait à une erreur »

Mickaël Olivette

Happy Hour

En 2017, le duo sort son premier album, Après c’est gobelet !, en autoproduction et en digital sur Bandcamp. Confidentiel mais brillant, plein d’une énergie contagieuse, l’album connaîtra plusieurs vies, jusqu’à apporter à Gwendoline leur succès actuel. Par les voies impénétrables du net, il fait son chemin jusqu’aux oreilles de Dead Wax Records, label indépendant espagnol spécialisé dans le dénichage de pépites cold wave, post punk et synthpop, qui l’édite pour la première fois en vinyle en 2020. « On était les premiers surpris, on pensait à une erreur », se remémore Mickaël. Il arrive alors aux oreilles de Jean-Louis Brossard, directeur des Trans Musicales de Rennes, qui les programme à l’édition en ligne du festival en 2020. Le duo y est à nouveau programmé en 2021, après une résidence mutualisée à l’Ubu, au Sew de Morlaix et à La Carène de Brest. Entre les Trans, Panoramas et Astropolis, Gwendoline séduit la Bretagne bonne vivante et mélomane, et bientôt le reste de la France.

Avec seulement une dizaine de dates, Gwendoline remporte déjà un succès critique qui conduit à la réédition dAprès c’est gobelet ! dans une version remastérisée en janvier 2022. La première édition, pressée à 200 exemplaires, avait rapidement été épuisée. C’est la troisième vie de cet album que défendra le duo en concert dans sa tournée à venir. Déjà 24 dates sont prévues cette année.

gwendoline
Festival Astropolis, fort de Penfeld, 10 juillet 2021. De gauche à droite : Maëlan Carquet, Romain Rival, Mickaël Olivette et Pierre Barrett. © David Boschet

En live, Mickaël et Pierre sont accompagnés de Maëlan Carquet à la guitare et Romain Rival au clavier. Eux, se contentent d’un micro. « On ne voulait pas prendre d’instrument, on se disait que ça serait plus drôle d’être avec nos micros à la main à se balader en racontant nos vies », précise Pierre. Leur déambulation sans but sur scène mime le désœuvrement évoqué par les paroles de Gwendoline. La résidence mutualisée leur a permis d’étoffer leur performance d’une dimension visuelle, avec la projection de créations graphiques, d’extraits de leurs clips, de montages d’images, ou des paroles, façon karaoké.

Gwendoline sera en concert à La Boule noire à Paris le 8 mars, pour une soirée organisée par Les Inrockuptibles, au festival Nouvelles Scènes à Niort le 17 et à l’Antipode de Rennes le 31 mars, en première partie de Mansfield TYA. Une association particulièrement bien trouvée et victime de son succès : la soirée affiche déjà complet. Mais pas de doute qu’on devrait entendre le spleen léger du duo dans nombre de festivals cet été ! Et pour patienter, Gwendoline sortait le morceau “Saint-Valentin (à Saint-Maclou)” pour marquer avec son humour la fête de l’amour.

Suivre Gwendoline sur Facebook

Ou Instagram

Écouter Gwendoline sur Bandcamp

Article précédentLES ACTUALITÉS LITTÉRAIRES DE MARS 2022
Article suivantLA GENÈSE DE LA GENÈSE, AU COMMENCEMENT ÉTAIT LE VERBE… OU L’ÉCRITURE
Jean Gueguen
J'aime ma littérature télévisée, ma musique électronique, et ma culture festive !

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici