« L ‘Anarchie, plus Trois. » Entretien avec Jacques de Guillebon et Falk van Gaver, auteurs de L’anarchisme chrétien. 3e partie.

 

 Comment expliquez-vous que les appareils de direction socialiste, communiste et anarchiste soient dirigés très largement par des athées souvent antireligieux ? Et pourquoi leurs dirigeants se sont-ils efforcés depuis la Seconde Guerre mondiale de faire oublier l’origine chrétienne qui présidait à la pensée sociale ? 

jacques de guillebon, anarchisme chrétien, gaver, guillebon, falk von gaver, jacques de guillebon, christ, anarchie, nicolas roberti, Eglise, christianismeIl faudrait refaire toute l’histoire philosophique, politique et sociale des derniers siècles pour répondre à cette question ! Le fait est que la plupart des mouvements révolutionnaires européens, bourgeois, libéraux, démocratiques, radicaux, socialistes, communistes, anarchistes…, ont dirigé leurs coups contre l’Église et le christianisme, identifiés à la « contre-révolution », malgré le militantisme de nombreux chrétiens libéraux, démocrates, socialistes, etc., notamment en France. Pour ce qui est des courants socialistes, jacques de guillebon, anarchisme chrétien, gaver, guillebon, falk von gaver, jacques de guillebon, christ, anarchie, nicolas roberti, Eglise, christianismecommunistes, anarchistes, c’est la victoire du marxisme sur les « socialismes utopiques » et la marginalisation de ces derniers qui a largement contribué au monopole athée de la contestation sociale, mais cela se place dans la lignée d’un athéisme révolutionnaire dont le paradigme fondateur est la Révolution française, issue des Lumières. C’est dans ce néopélagianisme sécularisé des Lumières – faire le salut sur terre à la force de poignets – que réside la grande rupture. (Rupture abyssale entre le socialisme chrétien et le socialisme athée, entre la démocratie chrétienne et la démocratie libérale, etc.) Car, loin de se focaliser sur le seul athéisme des dirigeants de ce qu’il est convenu d’appeler l’extrême-gauche, il faut le replacer dans le grand courant de sécularisation accélérée dont nous vivons une phase avancée. Rappelons que le néo-monarchisme d’Action Française se voulait lui-même positiviste et rationaliste, avec des dirigeants agnostiques comme Maurras, non hostiles à la religion, certes, mais qui ne se soumettront pas lorsque l’Église leur demandera des précisions et des purifications en 1926 (et leur condamnation ne sera levée en 1939 qu’après leur soumission finale aux exigences de l’Église).

Oui, il faut le rappeler, la pensée sociale est d’origine chrétienne ! Ce sont ces centaines, ces milliers de chrétiens sociaux, dont Frédéric Ozanam est un exemple éminent mais loin d’être solitaire, qui ont, loin de l’étatisme, de l’industrialisme et du libéralisme, forgé une véritable doctrine sociale fondée avant tout sur une pratique sociale directe. Le christianisme, inspiré par de grands principes, est selon la logique du réalisme de l’Incarnation d’un grand pragmatisme dans leur application (ce que l’on peut nommer l’inculturation) : ce pragmatisme n’est pas une compromission ni un oubli des principes mais le réalisme de leur application. C’est cette pensée sociale, cette pratique sociale, étayée, appuyée par l’enseignement des papes depuis Léon XIII jusque Benoît XVI, qui dès le XIXe siècle obtient des réalisations concrètes en faveur des ouvriers, des pauvres, des femmes, des enfants broyés par la société industrielle.

Si les dirigeants socialistes, communistes, anarchistes ont voulu faire oublier que la pensée sociale était d’origine chrétienne, c’est pour lutter contre leur grande et unique rivale sur ce terrain-là : l’Église. C’est aussi que, prisonniers comme leurs jumeaux inversés libéraux de l’idéologie des Lumières, ils ont fait de l’évacuation de la transcendance – divine, ontologique, métaphysique, philosophique – le prélude nécessaire à l’émancipation de l’humanité.

Propos recueillis par Nicolas Roberti

Article précédentPlus de 2000 manifestants pour l’égalité « maintenant et pour tous » à Rennes
Article suivantRapprochement Le Mensuel – Le Télégramme, Une bonne nouvelle pour l’indépendance de la presse
Nicolas Roberti
Nicolas Roberti est passionné par toutes les formes d'expression culturelle. Docteur de l'Ecole pratique des Hautes Etudes, il a créé en 2011 le magazine Unidivers dont il dirige la rédaction.

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici