Les Rencontres Paul Ricœur débutent aux Champs libres aujourd’hui jeudi 17 novembre. Pendant deux jours, auteurs et philosophes vont se succéder afin d’exposer leurs travaux et questionnements autour de la thématique de la fragilité humaine. Parmi eux, Francis Wolff, professeur émérite de philosophie à l’École Normale Supérieure rue d’Ulm à Paris, nous parlera de l’humanité, de ses définitions et de sa perte de repères, vendredi 18 novembre. Plus que jamais dans l’air du temps, sa conférence s’intitule « Homme, ni Dieu ni bête ».

Francis Wolff
Francis Wolff

Comme Francis Wolff l’expliquera dans sa conférence « L’homme, ni Dieu ni bête », vendredi 17 novembre à 11 h, on constate une tendance globale à brouiller les limites qui définissent l’humanité.

Deux mouvements idéologiques populaires et récents tentent en effet de redéfinir l’humanisme traditionnel en repoussant ses limites. D’un côté, les mouvements posthumaniste et transhumaniste qui aspirent à faire de l’homme un « presque-Dieu » ; de l’autre, le mouvement antispéciste qui nie la spécificité humaine en plaçant l’homme au sein d’une seule et grande communauté des animaux. « Je vais montrer que les limites ont encore une signification, et que ceux qui les nient, les post- ou transhumanistes et les antispécistes, luttent et échouent à redéfinir l’humaniste traditionnel », déclare le philosophe.

Pour Francis Wolff, les moyens employés par ces mouvements – la médecine d’un côté et l’éthologie (étude du comportement animal) de l’autre – ne mettent pas en péril cette définition humaniste tant qu’ils se cantonnent à aider, à soigner ou encore à comprendre l’humain. 

Les progrès de la médecine sont louables s’ils ne mettent pas en péril l’humanisme. La frontière réside dans l’aspect humain : la médecine ne devrait pas servir à la création d’un être amélioré qui repousserait tous les critères d’humanité et de mortalité. 

Concernant la thèse antispéciste, l’auteur conteste le rapport qu’elle cherche à établir avec l’éthologie. En effet, les progrès actuels des neurosciences avancent l’idée que l’homme peut être perçu à travers son animalité, tel un fruit de l’évolution. « Mais ce n’est pas parce que nous avons changé de regard sur l’homme, et donc sur l’animal, que les différences seraient moins importantes qu’auparavant », explique-t-il.

Un syllogisme (raisonnement déductif) peu convaincant selon lui résume cette pensée : 

Idée 1 : La science d’aujourd’hui montre que l’homme est un animal comme les autres

Idée 2 : La science est un critère de vérité strictement humain, 

Conclusion : Donc l’homme ne peut être un animal comme un autre, car il dispose de cet instrument singulier et unique, qu’est la science. 

La science et la connaissance scientifique différencieraient l’homme de l’animal et ne pourraient donc pas prouver son animalité…

Cette conférence appelle à la prise de conscience nécessaire que l’humanité doit garder son caractère spécifique. En voulant brouiller ses définitions et en niant sa spécificité, on nie également sa responsabilité, ce qui est dangereux selon le philosophe. Si l’homme a le pouvoir de détruire la nature, il en est le gardien ; il a des responsabilités vis-à-vis d’elle. De plus, l’immortalité que vise l’humanité ne devrait pas être individuelle, mais collective. Une immortalité, donc, de l’espèce et non de l’individu. « Face à ces deux thèses, oui, je plaide pour la spécificité de l’humanité ! » conclut-il.

Ainsi, peut-être pourrait-on conclure qu’à l’échelle de l’humanité, « de grands pouvoirs impliquent de grandes responsabilités » ?

Paul Ricoeur Wolff

Conférence « l’Homme, ni dieu ni bête » de Francis Wolff, vendredi 18 novembre 2022, à 11 h, aux Champs Libres.

10, cours Alliés, 35 000 Rennes.

Entrée gratuite

Programme des Rencontres Paul Ricoeur

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