Les relations entre Europe et France ne sont plus celles de l’époque de la construction. Depuis la fin du duo Kohl-Mitterrand, les dirigeants des nos deux pays n’ont eu de cesse d’oublier l’idéal européen de Jean Monnet au profit d’un paradoxal ‘Faites ce que je dis mais pas ce que je fais”.

monnetMonnet avait conçu une vision de l’Europe à l’américaine, c’est-à-dire fédérale avec libre-échangisme et partenariat privilégié avec les États-Unis face au bloc soviétique qui s’étendait dans les années 50. Objectif : unité des peuples et pacification du continent.

Depuis, le fédéralisme a sans cesse été repoussé. La construction européenne est devenue un édifice bancal et fragile. Elle n’a pas su évoluer avec les besoins d’un Nouveau monde. Et d’autant plus fragile lorsque les fondateurs ne tirent pas dans le même sens, autrement dit la France et l’Allemagne…

La visite de la chancelière Angela Merkel a encore montré un couple au bord du divorce. Qui ne parvient à trouver des accords sur le fonctionnement d’une Europe à l’arrêt. Certains regretteront qu’à l’époque de la chute du mur, l’Allemagne a oublié volontiers ses engagements budgétaires et de quelle manière elle a profité de plans et d’aides pour se reconstruire au sortir de la guerre, chose qu’elle refuse maintenant aux nouveaux arrivants. Du côté français, c’est un yoyo entre la vertu et le vice. Entre la rigueur budgétaire affichée et la réalité des chiffres. Entre l’Europe solution et l’Europe castratrice. Pourtant, avec Maastricht, la constitution européenne, le traité de Lisbonne, les gouvernements qui se sont succédé ont tenté de montrer les bienfaits de l’Europe aux Français. Alors que dans le même temps, chaque décision de l’Europe était critiquée, montrée du doigt comme la raison de tous les problèmes. Les résultats des référendums furent éloquents.

Une entente de façade
Une entente de façade

Dernier exemple en date, les déclarations du président de la Commission, José Manuel Barroso, au sujet du besoin de réforme en France. La sortie de ce dirigeant européen n’est pas anodine puisqu’il a été élu par les dirigeants européens, appuyé par le Parti Populaire Européen (qui inclus des membres de l’UMP et du nouveau centre) ainsi que par un accord avec l’ADLE (Modem et centre). Le PSE (parti socialiste européen) a refusé de s’opposer au candidat Barroso en 2009 et faute d’opposition (seuls les Verts étaient contre), le statu quo a prédominé malgré le bilan négatif de la commission. Aussi Barroso se sent légitime à donner des leçons de budget. D’autant que le président Hollande l’a appuyé récemment afin d’imposer des mesures en Grèce, en Italie ou au Portugal. Mais ce qui devrait s’appliquer aux prétendus mauvais élèves du sud ne peut s’appliquer à la vertueuse… Marianne . La crédibilité française en prend un coup dans la recherche de soutiens à venir.

La France miserait sur une politique d’usure et de compromis pour faire admettre une nouvelle gouvernance européenne à l’Allemagne qui la refuse. Mais plus concrètement, les peuples européens ne peuvent que constater que l’Europe n’est plus moteur mais frein. L’Europe continue d’être montrée du doigt, d’être le terrain de lobbyistes et de financiers. Bien rares les propositions qui émergent pour changer la donne.

Les différents sondages auprès des populations européennes confirment la déliquescence de la confiance en l’Europe. Certains craignent même une progression à deux chiffres des formations eurosceptiques. Faute de dirigeants européanistes attachés et promouvant une vision du bien commun européen et tant que durera une crise qui replie chacun sur ses intérêts nationaux, l’Europe ne trouvera pas sa place dans un monde où les pôles se déplacent vers l’Est, pays qui regardent l’Europe comme un… grand musée. La communication gouvernementale serait bien inspirée d’en tenir compte et de remettre le ministère des Relations européennes à sa juste place. Faute de quoi, l’Europe sera aux mains de ses adversaires dans quelques mois.

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Didier Acker
didier.ackermann {@] unidivers .fr

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