Mélomane de la scène électronique, Fakear a été révélé au début des années 2010 en proposant des morceaux aux sonorités asiatiques. Depuis, il enchaîne les tournées internationales et envisage une nouvelle ère d’ici 2020. Unidivers a pu le rencontrer quelques heures avant son entrée sur la scène Excalibur du festival du Roi Arthur.

 

FAKEAR
Crédit Photo Elvenn Bgd Pic

Unidivers : Le Roi Arthur est un festival que tu connais ?

Fakear : C’est ma première fois ici. C’est toujours bien les festivals en Bretagne. Il y a la formule festival que l’on travaille un peu avant l’été et qui est un plus dynamique. Puis les concerts en salle que tu prends le temps de développer, où tu as une interaction avec le public. Tu peux créer des moments, alors qu’en festival tu dois tout envoyer en un temps imparti.

Unidivers : Tu y vas les mains dans les poches ou tu as une tracklist préparée aux petits oignons ?

Fakear : J’ai une tracklist définie pour tout l’été. Je pourrais improviser, j’aime jouer les morceaux et les choisir au fur et à mesure mais je ne peux plus le faire depuis un certain temps parce que j’ai une équipe technique derrière moi.

FAKEAR

Unidivers : Tu commences à être un habitué des festivals.

Fakear : Mon premier festival c’était Chauffer dans la Noirceur en Basse-Normandie, j’y ai joué à 11h du matin dans les toilettes du camping (rires). Cet été sinon j’ai fait plein de petits festivals. Art Sonic en Normandie et le Sziget à Budapest.

Unidivers : Tu sors moins de morceaux qu’avant, tu continues quand même de produire ?

Fakear : Je me suis lancé dans un projet en début de l’année où je voulais sortir un single par mois et en faire dix, mais je me suis arrêté au bout du troisième. J’ai changé d’avis en cours de route et je me suis relancé dans un album qui devrait sortir en février 2020. En ce moment, je suis en pleine phase de création. Je vais pas tarder à sortir les premiers singles.

Unidivers : On retrouvera toujours la patte Fakear dans ce nouvel album ?

Fakear : Non. J’en ai marre de l’identité de Fakear, j’ai envie de tout casser et de tout remettre à zéro. Il n’y a plus de petites voix asiatiques, ni ces ambiances là. Ça sera désormais un univers plus pointu de musique électronique, qui va se rapprocher de mes références, comme Bonobo et Jon Hopkins.

Unidivers : Pourquoi cette rupture ?

Fakear : En ce moment, en France, la musique électronique n’a pas la cote. Tout le monde se remet en question en se disant : « qu’est-ce qu’on va faire par la suite ? ». J’en ai parlé avec Møme et Superpoze et j’ai l’impression que les médias et les gens portent leur attention sur le hip-hop. À partir de là, il y a deux possibilités pour un producteur. Soit il va produire pour les rappeurs. Par exemple, Superpoze a produit presque tout le dernier album de Lomepal. Soit il va repartir vers l’underground, les clubs et la house. J’ai choisi cette voie, car le public des clubs est toujours fidèle. Aujourd’hui, en tant que producteur on a moins de pression, on peut un peu faire ce qu’on veut. La notoriété et le buzz tuent un artiste et ses créations. Je n’ai pas envie que mon album cartonne, que ça fonctionne bien et que je passe en radio, car c’est trop de pression. Les gens utilisent ton image pour n’importe quoi et tu te fais embrigader dans des choses que tu n’as même pas envie de faire. C’est comme dans le film Lost In Translation. Bill Murray interprète le rôle d’un acteur vieillissant, qui n’a plus trop de succès et que l’on invite dans des émissions où il doit faire le clown à la télévision au Japon. C’est un engrenage, la musique ne devient plus de l’art, mais du divertissement et je n’ai plus envie de faire ça.

Unidivers : Ta révélation au début des années 2010 n’a pas été trop rapide ?

Fakear : Oui et non car en même temps c’est stimulant d’avoir tous les spots braqués sur toi. Après j’étais très jeune, j’avais la vingtaine, tu t’interroges sur qui tu es en tant que jeune adulte dans la société et quand tu prends cette vague de notoriété dans la figure, ça peut te faire partir en vrille. Et c’est ce qui m’est arrivé. On échappe pas à la grosse tête lorsque l’on devient artiste. Mais tu réalises ensuite que c’est du vent, que les gens qui commencent à te côtoyer t’abandonnent assez vite quand tu as moins de succès.

Unidivers : Les instruments t’accompagneront toujours ?

Fakear : Pour l’album qui se prépare, je reviens aux instruments. J’essaye de me limiter dans la composition, d’utiliser un ou deux synthés, toujours les mêmes pour avoir une sonde. Je joue de la guitare, du saxophone, de la basse. J’essaye aussi de me perfectionner à la batterie et aux percussions. Je ne suis pas un très bon musicien dans tout. Je joue un peu de tout mais pas bien (rires).

Unidivers : Tu continues de collaborer avec Superpoze ?

Fakear : Avec Gabriel (Superpoze), on est super pote. On avait un groupe de rock ensemble quand on était au lycée. Après on a fait chacun nos projets. On a fait aussi de la radio ensemble. On s’est appris mutuellement des choses. Il y a eu autant de retrouvailles chaleureuses que de frictions. On ne ferait pas pour autant un feat, peut-être par fierté (rires). Je suis sûr que dans dix ou vingt ans on va se retrouver à faire de la musique cubaine, car on en aura rien à foutre.

Unidivers : Tu jettes toujours un œil à la scène caennaise ?

Fakear : J’ai habité pendant trois ans à côté de Lausanne en Suisse, je suis remonté à Paris l’été dernier. Ça fait longtemps que je ne suis pas revenu sur Caen. Le Cargö, la scène de Caen, n’est plus dans ses beaux jours, elle a fait monter Orelsan, Superpoze et moi. Aujourd’hui, j’ai l’impression que c’est un peu plus compliqué pour eux financièrement, ils ne sont pas trop aidés par la région.

Unidivers : Tu as pas mal voyagé. Cela t’inspire pour composer ?

Fakear : Grave. En tournée, tu fais un peu les quatre coins de la terre et il y a pas mal de choses hyper inspirantes. Au mois de février, je suis partis trois semaines au Chili pour la tournée, mais ça s’est transformé en colo de vacances avec des potes. Je suis revenu de là, je voulais faire un album de musique sud-américaine.

En attendant la sortie de son prochain album prévu en février 2020, Fakear se produira à Caderousse le 31 août, puis à Paris le 7 septembre. Vous pouvez retrouver les dates de sa tournée sur son site.

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Timothy Gaignoux
Timothy Gaignoux est journaliste spécialisé en culture musicale.

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