L’exposition Les landes de Bretagne se déroule à l’Écomusée de Rennes du 25 novembre 2017 au 26 août 2018. Après ses grandes expositions sur le bocage et sur la forêt, l’Écomusée du pays de Rennes propose une nouvelle fois de partir à la découverte d’un paysage emblématique de la Bretagne : la lande. Là où beaucoup ne voient qu’uniformité et infertilité, l’exposition révèle d’extraordinaires richesses naturelles, humaines, agricoles, historiques…

ECOMUSÉE DE RENNES LES LANDES DE BRETAGNE EXPOSITION

L’exposition Landes de Bretagne, un patrimoine vivant invite le visiteur à rencontrer des paysages, une histoire humaine, un patrimoine naturel et culturel profondément ancré en Bretagne. Elle entend réveiller la sensibilité des citoyens à la sauvegarde de ces milieux, de ces paysages, de ce patrimoine culturel vivant et de la biodiversité qui en dépend. À travers un espace muséographique de 330 m2, l’exposition propose un parcours autour de quatre grands thèmes : la nature, l’agriculture, la culture et l’histoire de la disparition progressive des landes. L’exposition vise à apporter une connaissance intime des landes présentes dans les cinq départements de la Bretagne historique : Ille-et-Vilaine, Morbihan, Finistère, Côtes-d’Armor et Loire-Atlantique.

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Elle présente les particularités naturalistes ainsi que les données ethnologiques et historiques d’un système agricole emblématique de notre région. Elle s’attache à décrypter les liens qui unissent les landes à la société paysanne, pourquoi et comment le paysage breton a été sculpté par une agriculture qui a créé, entretenu puis détruit de grandes surfaces de landes. La diversité de ces espaces incultes, souvent pâturés, explique le maintien d’une petite agriculture bretonne jusqu’aux années 1960.

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L’exposition s’appuie sur une approche pluridisciplinaire permettant de croiser les regards tout au long du parcours entre sciences naturelles, histoire, ethnologie, représentations artistiques et citations littéraires.

À travers peintures, photographies et spécimens naturalisés, la biodiversité particulière des landes se découvre dans l’exposition : ici un loup, là un courlis, sur fond de bruyères, d’ajoncs et de genêts… Citations et œuvres d’artistes traduisent poétiquement l’aspect social et culturel des landes, théâtre de rassemblements pour les pardons, les foires et les jeux collectifs. Enfin, elle pose la question de l’avenir des landes après leur défrichement, intervenu au cours du 20e siècle, avec le « virage agricole » breton et la mécanisation.

Les landes de Bretagne s’invitent à l’Écomusée. Sauvages et grandioses, les terres de landes fascinent et intriguent à la fois. Paysages de végétation basse adaptée aux sols pauvres, apparus naturellement sur le littoral ou artificiellement à la suite des grands défrichements, les landes sont un des piliers de l’image de la Bretagne. Cette exposition est conçue comme un outil de découverte de la biodiversité des landes, de compréhension des paysages de la région et de connaissance du patrimoine culturel dans le but d’encourager leur sauvegarde. Le parcours de l’exposition propose une immersion totale dans l’univers des landes permettant au visiteur de déambuler à travers quatre grands thèmes : • La lande, un espace naturel • La lande, un espace agricole • La lande, un espace culturel • Les grands défrichements.

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La lande, un espace naturel
« J’aime et j’admire ce paysage désolé des monts d’Arrée, ces ondulations basses qui courent en si belles et si tristes lignes sous le ciel de Bretagne, ces pointes méchantes des rochers, ce marais sinistre qui parle de l’éternité et
de la fatalité des choses, du lent travail de pourrissement et de recommencement de l’humble végétal. » Gustave Geffroy (1855-1926), La Bretagne, 1905
Les landes sont un milieu pauvre… appauvri par les hommes. Elles se sont formées sur des sols et des sous-sols où manquent des éléments nutritifs essentiels. Paradoxe de la pauvreté : ce milieu est riche en espèces animales et végétales très originales, car adapté à la pauvreté et même aux usages qu’en font les hommes. L’agriculture traditionnelle a contribué à maintenir la pauvreté des landes par la fauche et le surpâturage, parfois même, en enlevant une partie du sol pour le brûler.

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Une végétation et une faune originale
Les ajoncs et les bruyères composent avec quelques graminées les paysages de landes, sur le littoral comme à l’intérieur des terres. Les ajoncs s’associent à des bactéries regroupées en amas sur leurs racines (c’est une caractéristique des légumineuses). Ces bactéries capturent de l’azote contenu dans l’air et le transforment en nitrates assimilables par l’ajonc. On peut aussi remarquer que les ajoncs n’ont pas de feuilles, mais des épines, ce qui caractérise un taux de croissance relativement faible et une bonne défense contre beaucoup d’herbivores. Les bruyères, quant à elles, s’associent à des champignons dont l’appareil végétatif pénètre leurs racines. Elles disposent ainsi d’un capteur efficace du rare phosphore disponible. Ce sont des plantes de faible taille au feuillage pérenne peu développé qui exigent peu de nutriments. Leurs petites feuilles coriaces et à haute teneur en tanins sont peu attractives pour les herbivores.

Une foule de petites bêtes discrètes trouve refuge dans ces espaces diversifiés. Prédateurs, proies, parasites, décomposeurs et recycleurs forment des chaînes complexes. De nombreux invertébrés sont étroitement associés à l’ajonc ou aux bruyères et se répartissent selon le degré d’humidité et l’âge des landes. On voit peu de papillons en se promenant dans les landes. Mais, après le crépuscule, ce sont plus de 120 espèces différentes de papillons de nuit qui peuvent être découvertes sur quelques dizaines d’hectares. Ce n’est pas un hasard : les landes sont généralement exemptes de toute pollution chimique ou lumineuse.

La lande, un espace agricole
« Les landes ne sont pas hors de l’exploitation du sol, telle que le Bas-Breton la comprend, elles sont plutôt à la base même de cette exploitation. (…) En fait la lande et le marais ne sont pas de nos jours des ennemis à vaincre à tout prix. » Camille Vallaux, (1870-1945), La Basse-Bretagne, 1905
La majorité des landes bretonnes tire son origine d’une action humaine très ancienne qui, si elle a connu des phases de régression, s’est poursuivie jusqu’à la fin du Moyen Âge. L’équilibre trouvé à partir du XIIIe siècle entre les espaces de culture, de forêt et de lieux incultes, mais pâturés perdura pratiquement jusqu’au milieu du XIXe siècle et parfois même au-delà. La société traditionnelle qui s’était forgée au fil de cette histoire n’a pas brutalement disparu et on peut encore de nos jours échanger avec des témoins de ses ultimes persistances.

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Un système robuste
Il faut se rendre compte que, dans les secteurs où les landes étaient étendues, les exploitations étaient majoritairement très petites et ne cultivaient guère plus que 1 à 2 hectares de terres « chaudes » (labourables) tandis qu’elles avaient accès à des surfaces trois à cinq fois plus importantes de terres « froides » (landes, terres « vaines et vagues »). Il faut donc se figurer un territoire complexe où la forêt linéaire des talus, les prairies, les champs, les landes, les marais, les vergers, les jardins, les tourbières, les villages s’entremêlaient de telle sorte qu’il en résultait un étonnant équilibre aux ressorts invisibles.

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On a longtemps traité les Bretons d’arriérés, car on ne comprenait pas la cohérence et l’efficacité de leur système agricole. Eux savaient qu’il était inutile de défricher des landes (les terres « froides ») si l’on ne disposait pas d’engrais abondants et que les landes étaient, justement, la source de la fertilité des cultures (les terres « chaudes »).

On coupait dans les landes la litière qui, mise dans les étables, produisait l’indispensable fumier. De plus, le bétail pouvait pâturer les landes ce qui compensait le manque de prairies. Enfin, on réalisait des cultures temporaires sur les bonnes landes (seigle, blé noir, ajonc). De manière générale, on ne laissait rien se perdre dans ce système agricole non productiviste visant le maintien d’un équilibre économique et social au long terme. L’exploitation des landes, les usages de l’ajonc associés à la culture généralisée du blé noir ont été les piliers d’un agrosystème particulièrement durable. Un promoteur de la modernisation de l’agriculture reconnaissait en 1829 la réussite du système traditionnel : « Ce sol ingrat, quoiqu’il n’y en ait que la plus faible partie de cultivée, suffit non seulement à presque tous les besoins de ses habitants, mais pourrait encore offrir au commerce l’immense super u qui lui reste (…) ». (Le Lycée Armoricain, N° 14). On peut d’ailleurs relever que, de fait, les historiens qui ont étudié les rendements en blé et seigle dans la France de 1830 ont classé la Bretagne dans le tiers de la France qui obtenait les meilleurs résultats.

Si la société traditionnelle bretonne nous a laissé des milliers de contes, de chansons, de récits, de dictons, de danses, c’est parce qu’elle ne vivait pas dans la misère et que le travail n’occupait pas toute la place. Un emploi du temps calé sur les rythmes naturels laissait une belle place à une riche vie culturelle et l’importance des travaux collectifs favorisait les échanges.

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La lande, un espace culturel
« L’ajonc rit près du chemin Tous les buissons des ravines Ont leur bouquet à la main » Victor Hugo, Les chansons des rues et des bois, 1865
Souvent situées aux limites des communes ou du territoire de chaque village, les landes n’étaient pas pour autant des frontières, mais des lieux de passage, de rencontre, de travail et de liberté. Pendant des millénaires, les hommes ont parcouru les landes, observé les plantes et les animaux et en ont tiré des éléments essentiels à leur existence : nourrir leur bétail, enrichir leurs cultures, cuire leurs aliments… De cette longue histoire sont nés des récits, des dictons, des légendes, des chants et même des danses. Éléments très présents dans les paysages bretons qui attirèrent les artistes, les photographes et les écrivains dès le milieu du XIXe siècle, les landes imprègnent de nombreuses œuvres, jusqu’aux bandes dessinées contemporaines.

Des lieux de rencontre et d’échange
Certaines landes, situées au centre de vastes territoires, étaient des lieux de pardons et de foires importants. Là où il y avait beaucoup de landes, on achetait des bêtes à la foire de printemps et on les revendait après les avoir engraissées à peu de frais dans les landes à la foire d’automne. Pendant toute la belle saison, les troupes d’enfants gardant le bétail se retrouvaient dans les landes et y élaboraient une culture originale au contact de la nature.
Travailler dans la société rurale traditionnelle n’était pas forcément un investissement total dans une tâche abrutissante. C’était souvent l’occasion de multiples échanges où les chansons, les récits, l’humour tenaient une place singulière. Le chant pouvait soutenir l’effort, le conte éviter l’ennui d’un tri répétitif, la légende ouvrir les yeux sur une organisation du monde qui donne du sens au travail. Comme elles offrent peu de points de repère, les landes sont des lieux propices aux phénomènes étranges et nul n’ignorait que les âmes des morts demeuraient dans les ajoncs.

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Des lieux d’émerveillement
Le développement du tourisme et l’amélioration des moyens de transport dès le milieu du XIXe siècle, la volonté des peintres de travailler sur le motif et les prix de pension peu élevés conduisent beaucoup de créateurs à venir en Bretagne, seuls ou en famille. Sans en avoir forcément eu l’intention, ils nous offrent de multiples informations sur les landes d’autrefois, mais ils nous amènent aussi à avoir un autre regard sur les landes d’aujourd’hui.

On pourrait réaliser un gros livre avec l’anthologie des œuvres littéraires évoquant les landes. Les écrivains, bretons ou pas, ont souvent tenté d’exprimer leur émotion devant le paradoxe d’un univers où pauvreté et beauté semblaient aller de pair.
Les landes jouent un rôle matriciel chez certains auteurs. Ainsi, en quelques lignes, François-René de Chateaubriand (1768-1848) en a fait le cadre magique de ses souvenirs d’enfance en Bretagne et le talisman qui l’accompagne : « les bruyères sont mon nid et mes moissons ; leur fleur d’indigence et de solitude est la seule qui ne soit pas fanée à la boutonnière de mon habit ».

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Les grands défrichements
« Jusqu’à la Roche-Bernard, des landes, des landes, des landes ! La hardiesse des rives de la Vilaine la rend pittoresque (…) et elle serait égale à quelque rivière que ce soit si ses bords étaient boisés ; mais ce ne sont que les déserts du reste du pays. » Arthur Young, (1741-1820), Voyages en France, 1792
Sous l’influence d’agronomes proposant de transformer les modes d’exploitation de la terre, les nouvelles classes dirigeantes s’engagèrent dès le début du XIXe siècle dans un vaste travail de réflexion, de constitution d’associations et d’expériences de « mise en valeur » des landes (culture et boisement). L’apparition d’engrais et d’amendements nouveaux (noir animal, guano, phosphates divers) leur permit de débloquer le système traditionnel. Une nette évolution dans la production des plantes fourragères annuelles (betterave, choux, colza) et la création de prairies à base de graminées (ray-grass) et de légumineuses (trèfle) permirent le développement de l’élevage bovin. Les outils, les techniques et les infrastructures connurent aussi une évolution considérable, bien illustrée par le développement des catalogues de matériel agricole.

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La privatisation des landes
Les pionniers de l’agronomie moderne avaient compris qu’ils devaient obtenir des déblocages législatifs et, parallèlement, faire évoluer les mentalités. Ils le rendent en introduisant à la fois un système de diffusion des savoirs, mais aussi une stigmatisation des paysans attachés à leur système productif et aux landes qui en étaient la base.
L’enseignement agricole a formé les nouvelles générations tandis que les comices agricoles et les foires-expositions ont développé un peu partout l’esprit d’émulation. Les programmes scolaires ont rapidement intégré des initiations aux nouvelles pratiques agricoles.

De multiples rapports, études et interventions ont conduit à ce que, à partir de 1850, de nouvelles lois imposent le partage des communs. Progressivement, des dizaines de milliers d’hectares sont devenus des propriétés privées. Beaucoup des paysans les plus pauvres sont partis vers les villes tandis que se constituaient de grandes exploitations.
Les défrichements de landes se sont ralentis dans la première moitié du XXe siècle. Les agriculteurs utilisaient encore largement ces espaces pour la litière et le pâturage et il restait environ 100 000 ha de landes en Bretagne en 1950.

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La motorisation de l’agriculture
La seconde révolution agronomique fut d’abord une révolution technique liée à la motorisation. Mais, comme la première révolution, elle était aussi une révolution culturelle. L’idéal de la modernisation a été porté par les nouvelles générations et les organisations telles que la Jeunesse agricole catholique (JAC). Dans une France encore marquée par le rationnement alimentaire qui se prolonge jusqu’en 1949 pour le pain, l’agriculteur devient le porteur d’une véritable mission d’intérêt général. Le pays bénéficiait des prêts du plan Marshall qui l’encourageaient à acquérir des engrais et du matériel américain. Chaque agriculteur pouvait ainsi disposer des moyens d’étendre son exploitation en défrichant des landes. Les moins bonnes pouvaient être boisées dans le cadre du plan national forestier.

Il a fallu en fait une centaine d’années pour qu’un nouveau système se mette en place. Les landes n’en sont pas moins restées jusque dans les années 1950 un élément important de l’agrosystème breton, en particulier en Basse Bretagne.

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FOCUS N° 1 La biodiversité : faune et flore des landes

Pour survivre dans un sol aussi hostile que de la « terre de bruyère » et supporter de multiples situations stressantes (saturation en eau ou sécheresse saisonnière, broutage, fauche, températures élevées ou basses), les plantes des landes ont développé des adaptations originales. Beaucoup présentent des feuilles plus ou moins persistantes, coriaces, à l’épiderme épaissi.

Au moins 45 espèces poussant dans les landes appartiennent à divers titres à la flore protégée. Cinq sont présentes sur les listes d’espèces protégées au plan national : l’asphodèle d’Arrondeau, la centaurée à feuilles de scille, la bruyère de saint Daboec (présente dans quelques communes de Loire-Atlantique), l’isoète épineux, le grémil couché. Toutes ont souffert de la régression des landes et il n’existe plus qu’une seule station du panicaut vivipare pour toute la France dans une lande pâturée à Belz (Morbihan). Mais les plantes caractéristiques de la lande sont, bien sûr, les ajoncs et les bruyères.

L’ajonc d’Europe est le plus commun, y compris sur les talus et dans les friches, surtout dans l’ouest de la Bretagne. Il donne de belles fleurs jaune d’or dès l’automne et surtout au printemps. L’ajonc de Le Gall est répandu en Bretagne occidentale. On peut voir ses fleurs jaune-orangé d’août à décembre. L’ajonc nain est répandu en Bretagne à l’est d’une ligne qui va de l’estuaire de la Rance au Faouët. Ses fleurs jaune citron paraissent de juillet à octobre.

La bruyère à quatre angles est typique des landes humides ou tourbeuses ; la bruyère ciliée marque les landes moyennement humides tandis que la bruyère cendrée s’épanouit dans les landes sèches et sur les talus. Dans les îles de BelleÎle et Groix, on trouve la bruyère vagabonde. Ajoutons une proche parente, la callune qui pousse facilement dans toutes les landes et dans les bois clairs.

La lande est le paradis des invertébrés : papillons, fourmis, criquets, sauterelles, abeilles sauvages, araignées (pour ne parler que des plus faciles à observer) bénéficient d’un des rares milieux qui ne reçoive jamais d’apports d’engrais ou de traitements phytosanitaires. Ces espèces sont les proies de nombreux petits prédateurs. Quelques passereaux sont particulièrement présents dans les landes : tarier pâtre, bruant jaune, fauvette pitchou, pipit farlouse. Plus spectaculaires, le courlis cendré, l’engoulevent d’Europe, le busard Saint-Martin et le busard cendré sont très localisés et pour certains, tel le courlis, très rares.

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Les oiseaux, symboles de la régression des landes
Quelques oiseaux sont particulièrement associés aux landes bretonnes où ils se procurent tout ou partie de leur nourriture et où certains nichent. Nombre d’entre eux ont vu leurs populations régresser dramatiquement au l du défrichement des landes, de leur enrésinement ou de leur enfrichement.
Le tarier pâtre porte, en breton les noms de straker, strakig ou bistrak, qu’on peut traduire par « craqueur », une allusion à son cri. Il était aussi appelé strepour-lann, l’étrépeur des landes, car on le voyait gratter le sol, comme les hommes qui arrachaient des mottes.
Le courlis cendré (coulieu en gallo) pond ses œufs directement sur le sol des landes fauchées ; il a donc besoin de la présence des agriculteurs. Il porte le nom de paotr-saout, le gardien de vache, car on le voit chercher sa nourriture près du bétail. Son chant sonore (d’où son nom semble tiré) anime encore les landes des monts d’Arrée au printemps, mais il ne reste, au mieux, qu’une vingtaine de couples, les derniers de tout l’ouest de la France.
L’engoulevent d’Europe niche dans les landes hautes et chasse la nuit les papillons et les insectes volants. Son chant étrange s’élève à la tombée du jour, sa ressemblance avec le bruit du rouet lui valait le nom de landière en Haute Bretagne ; en Basse Bretagne on le nommait labous-skrijer (oiseau-vibreur).
La fauvette pitchou (geaotaerig) se trouve dans tous les types de landes, littorales et intérieures, pourvu que le couvert végétal soit dense et comporte de beaux massifs d’ajoncs où elle se cache avec son nid.
Le busard cendré (migrateur) et le busard Saint-Martin (sédentaire) sont de légers rapaces qui nichent dans les landes hautes. Ils chassent de petites proies en parcourant leur territoire d’un vol chaloupé.
Le crave à bec rouge niche dans les grottes littorales du cap Sizun, de Belle-Île, Crozon et Ouessant. Il cherche sa nourriture sur les pelouses et landes littorales. La fréquentation touristique des hauts de falaise et l’enfrichement des landes le mettent en danger.

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FOCUS N°2 : Les landes sources d’inspiration pour les peintres

Les peintres, témoins de la beauté des landes
Les grands espaces des landes intérieures ont inspiré quelques œuvres importantes à des peintres de la seconde moitié du XIXe siècle (Ségé, Saintin, Luminais, Blin), mais c’est surtout sur le littoral que, par leur omniprésence, les landes inspirent presque tous les paysagistes (Monet, Moret, Rivière, Frelaut, Yvonne-Jean Ha en, etc.). Il est vrai aussi que, jusqu’au milieu du XXe siècle, les landes sont encore bien présentes un peu partout et qu’il est donc difficile de peindre la Bretagne sans qu’elles s’invitent sur la toile.

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Des landes omniprésentes
Les grands paysages de l’Argoat inspirent des peintres plutôt académiques et grâce à qui nous disposons de représentations très fidèles, même si, le plus souvent, les humains en sont absents. C’est particulièrement remarquable chez le Rennais François Blin (1827-1866) qui peint en 1856 Le matin dans la lande, souvenir de Monter l, une toile d’où se dégage une atmosphère mystérieuse. On peut apercevoir des chevaux et des vaches pâturant librement les landes dans la grande toile d’Alexandre Ségé (1808-1885) La Vallée de Ploukermeur, exposée en 1884. Le nom est inventé pour donner une identité bien bretonne au paysage, mais la représentation est particulièrement fidèle puisqu’on y reconnait sans peine le clocher du bourg de Scrignac (29) et, à l’horizon, les crêtes rocheuses du Cragou. On a ainsi une idée de l’étonnante mosaïque des landes d’avant la mécanisation. C’est le même Alexandre Ségé qui avait réalisé Les pins de Plédéliac en 1873 où des corneilles sont plus visibles que de petits personnages s’activant dans la lande.

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Les îles attirent nombre de peintres et le développement des transports maritimes favorise la découverte de ces espaces où les landes sauvages constituent une large part des paysages. Emmanuel Lansyer (1835-1893) débarque à Ouessant le 25 août et repart le 8 sept 1885 avec quinze toiles dans ses bagages. Arrivé le 12 septembre 1886 « pour 15 jours », Claude Monet (1840-1926) ne repartira de Belle-Île-en-Mer que le 25 novembre avec 69 toiles. Comme l’automne est plutôt « pourri », cela nous vaut des représentations tout à fait originales de la lande sous la pluie. Henri Moret (18561913), qui a mieux choisi la date de son séjour à Belle-Îleen-Mer, a peint, une dizaine d’années après Claude Monet, des toiles lumineuses et gaies. Les landes sont d’ailleurs bien présentes dans les œuvres qui témoignent de ses pérégrinations bretonnes. Henri Rivière (1864-1851) a été un artiste maîtrisant de multiples techniques et portant un regard toujours curieux sur la Bretagne qu’il aimait et où il est venu régulièrement à partir de 1885. Ses représentations de landes sont remarquables et en disent la beauté originale.
Lucien Pouëdras (né en 1937 à Languidic dans le Morbihan) témoigne méthodiquement de la place des landes dans la société paysanne dont il est issu. Il reprend en quelque sorte le travail engagé par Olivier Perrin (1761-1832) avec son ambitieuse Galerie armoricaine (qui nous o re les seules représentations connues d’un écobuage). Mais, à défaut de pouvoir travailler sur le motif comme son prédécesseur, il a entrepris dans les années 1970 de peindre de mémoire ce qu’il avait connu jusqu’au début des années 1950 dans le territoire où s’inscrivait la ferme de ses parents. Pratiquement un tiers de 370 toiles qu’il a peintes à ce jour évoquent les landes, d’une manière ou d’une autre. Les approches sont multiples et vont du gros plan sur l’ouvrier agricole coupant la litière au plan large sur l’infini puzzle des landes, des prairies, des champs, des talus, des bois, des tourbières, des chemins et des villages.

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FOCUS N° 3 : Les landes et la littérature
De nombreuses œuvres littéraires évoquent les landes. Ainsi, en quelques lignes, François-René de Chateaubriand (17681848) en a fait le cadre magique de ses souvenirs d’enfance en Bretagne : « les bruyères sont mon nid et mes moissons ; leur feur d’indigence et de solitude est la seule qui ne soit pas fanée à la boutonnière de mon habit ».

En fait, à l’heure d’écrire leurs mémoires, les écrivains bretons associent spontanément les landes à ce qui les a faits. Le plus explicite est Charles Le Quintrec (1926-2008), natif de Plescop dans le Morbihan : « Les landes les plus déshéritées m’ont fait une patrie d’enfance. Je n’en veux pas d’autres. J’ai tout tiré de cette terre-là, tout, depuis la lumière qui me rassure, jusqu’au ciel que je vois dans les yeux de mes amis. Je suis de la lande comme d’autres sont de la mer ».

Pour certains, tel Ernest Renan (1823-1892), les landes n’ont rien de vital, bien au contraire, puisqu’il évoque dans ses Souvenirs d’enfance et de jeunesse des chapelles « toujours solitaires, isolées dans des landes, au milieu des rochers ou dans des terrains vagues tout à fait déserts. Le vent courant sur les bruyères, gémissant dans les genêts, me causait de folles terreurs ». Dans Mon frère Yves, Pierre Loti (18501923) partage aussi cette vision toute négative de la lande :

« Au détour d’un rocher, la pluie cesse comme le vent et, du même coup, tout change d’aspect. Nous découvrons à perte de vue un grand pays plat, une lande aride, nue comme un désert : le vieux pays de Léon ». Le Rennais Paul Féval (1816-1887) trouve dans les landes un paysage propice au mystère et à l’inquiétude pour nombre de ses contes et romans. Son « éterpeur de landes » ne peut être que « d’assez méchante renommée » et on ne peut que se perdre dans « l’inextricable écheveau des sentiers que trace, à travers les hauts ajoncs des landes, l’insouciance du paysan morbihannais ».
Fort heureusement, au début du XXe siècle, des écrivains vont redonner ses lettres de noblesse à la lande. Plusieurs d’entre eux jouent sur le paradoxe de ces terres pauvres se couvrant d’or. Yves Le Febvre (1874-1959) a donné une place importante au paysage dans son roman Clauda Jégou paysan de l’Arrée (1936) ainsi que dans son recueil de nouvelles Sur la pente sauvage de l’Arez (1912) où il écrivait : « Les landes en eur laissaient pleuvoir toute une fortune uide sur leur pauvreté. Il y en avait partout, autour d’eux, et, dans le lointain, les « Kragou », avec leur ossature morne et rude semblaient la charrue qui avait labouré les vastes champs dorés de la montagne ».

LANDES

Exposition Les landes de Bretagne, Écomusée de Rennes, 25 novembre 2017-26 août 2018.

Horaires d’ouverture
Horaires d’hiver (du 1er octobre au 31 mars)
• Mardi à vendredi : de 9h à 12h et de 14h à 18h • Samedi : de 14h à 18h
• Dimanche : de 14h à 19h
• Fermé les lundis et jours fériés
Horaires d’été (du 1er avril au 30 septembre)
• Mardi à vendredi : de 9h à 18h (possibilité de pique-niquer sur place, au grand air ou à couvert).
NB : les salles d’exposition sont fermées entre 12h et 14h, mais la visite des bâtiments d’élevage et du parcours agricole est possible.
• Samedi : de 14h à 18h
• Dimanche : de 14h à 19h
• Fermé les lundis et jours fériés
Tarifs
Plein tarif 6 €
Tarif réduit  4 €
Groupes adultes (à partir de 10 personnes) 4 €
Visite complète du site (Musée, exposition temporaire, parc agronomique et bâtiments d’élevage)
Entrée gratuite pour les 0-18 ans.
Entrée gratuite pour les groupes scolaires accompagnés.
Les groupes scolaires et adultes sont accueillis sur rendez-vous.

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