Et de se tenir la main est la création que Mélanie Perrier présentera avec sa compagnie 2 Minimum au Triangle, cité de la danse le 15 mars 2023. Dans ce spectacle la chorégraphe explore ce geste si éminemment ordinaire et pourtant chargé de multiples significations et émotions. Laissez-vous prendre par la main et prenez conscience de toute la dimension d’un mouvement si simple… ou presque.

Et de se tenir la main
Et de se tenir la main © Manon Jaupitre

« Un projet relationnel de la danse », voilà comment Mélanie Perrier définit son travail chorégraphique avec sa compagnie 2 Minimum créée en 2011. La chorégraphe considère la scène « comme un territoire favorisant les relations à la fois entre les interprètes mais aussi avec le public ». Cette relation au public est très importante dans la mesure où il constitue la condition sine qua non de l’existence d’un spectacle. « Un spectacle se fait à l’adresse d’un public », affirme la chorégraphe. Et aussi évident que ce constat puisse paraître, il est pourtant primordial pour Mélanie Perrier qui se questionne sur la manière de « faire spectacle ensemble ». Comment impliquer le public et lui faire expérimenter un moment de partage, à la fois avec les interprètes et avec les autres membres du public, dans la mesure où le théâtre est un point de convergence. C’est un lieu de rendez-vous dans lequel la plupart des spectateurs et spectatrices ne se connaissent pas, mais partagent la même représentation. Cette expérience commune que Mélanie Perrier appelle la « valeur sociale du spectacle vivant » est un lien important qu’elle s’attache à mettre en valeur.

Et de se tenir la main
Mélanie Perrier © ASGrassin

Dans cet objectif, la chorégraphe a élaboré ce qu’elle appelle des « protocoles sensibles ». Une phase d’introduction au spectacle qui, en sollicitant les différents sens du public, doit le mettre en condition pour une meilleure réceptivité. « J’aime souligner le fait qu’un spectacle de danse vient toucher les corps avant de toucher les esprits ». Pour sa création Care (2017), Mélanie Perrier avait mis à disposition des transats pour que le public puisse s’adonner à « une sieste sonore » avant le début de la représentation. La chorégraphe souligne que cette mise en condition préalable est tout aussi importante pour les spectateurs qui viennent accompagnés. « C’est une occasion de se connaître autrement et de créer un lien qui sort du quotidien, comme des parents qui viennent avec leurs enfants par exemple ». Ainsi, dès le début de la pièce les rapports sont changés et le public peut vivre la représentation.

Mélanie Perrier porte donc toute son attention aux relations. Son œuvre revêt une dimension introspective et se traduit dans les corps des interprètes par une chorégraphie relativement épurée en termes de forme, mais profondément chargée en termes de signification. Par là, la chorégraphe prend le contrepied de certains de ses collègues contemporains en plaçant l’aspect esthétique de la danse au second plan. « Je me concentre moins sur le temps ou la forme du mouvement que les relations réelles que vont devoir créer les danseurs entre eux pour pouvoir faire advenir cette danse. » Mélanie Perrier se penche d’une certaine manière sur l’aspect introspectif de la danse. De cette manière, les spectacles sont davantage appréhendés comme un point de départ que comme une fin en soi. Chaque spectacle monté par la compagnie s’inscrit donc dans le dessin plus large de l’élaboration du « projet relationnel » évoqué par la chorégraphe. 

Et de se tenir la main ne fait pas exception. Il participe à mettre en lumière ce qui nous met en lien les uns des autres. À l’origine, l’idée du spectacle et son montage interviennent avant le Covid. Cet événement est venu modifier l’approche du projet dans la mesure où l’idée du touché et du contact n’était plus du tout appréhendée de la même manière. Mélanie Perrier remarque que les règles sanitaires de distanciation et d’isolation ont gravés les corps qui gardent en mémoire ces traumatismes. « L’acte de prendre la main de son voisin s’avère encore être compliqué et fait toujours l’objet d’un mouvement de réticence ». Cette nouvelle dimension s’ajoute à la volonté initiale de représenter deux hommes qui se tiennent la main pour apaiser la perception de ce geste par la société.

Et de se tenir la main
Et de se tenir la main © Manon Jaupitre

Pour créer Et de se tenir la main, Mélanie Perrier explique avoir effectué « une typologie des situations au cours desquelles on se tient la main afin de bâtir un imaginaire pluriel autour de ce geste ». Avec les danseurs, la chorégraphe a exploré ensuite les manières de traduire cette action en un langage. Comment la faire évoluer et la mettre en mouvement dans l’espace avec les outils de la danse : tenir plus ou moins longtemps, plus ou moins doucement, etc. La chorégraphe, après avoir sélectionné quelques moments filmés des répétitions, les a ensuite soumis à un comité de sept enfants, entre 6 et 9 ans, de la France entière afin de les faire parler autour de ce qu’ils voyaient. Le but était de jouer avec leur propos et leurs interprétations pour renverser et nourrir le processus de création.

L’expérience collective que tend à créer le spectacle s’étend jusque dans sa mise en musique. Un batteur joue en live et en dialogue avec la danse. Mélanie Perrier remet en question l’idée que la musique ne sert qu’à rythmer ou diriger la danse. Cette idée participe à déconstruire celle d’une verticalité des relations sur scène et mettre à jour les esthétiques de la danse contemporaine. C’est pourquoi la musique du spectacle a été composée en même temps que la danse a été créée. Les deux œuvres exercent une influence mutuelle sans qu’elles ne se suivent ni se calent sur des temps prédéfinis. Il s’agit d’un parti pris artistique important dans la mesure où la chorégraphe pense ses spectacles comme un tout, une expérience sensible complète. Les sens des spectateurs et des danseurs doivent être éveillés et sollicités au cours de la pièce, en commençant par troubler le regard… Mélanie Perrier utilise donc l’ensemble des techniques de scénographiques pour servir ce propos. Dans Quand j’ai vu mon ombre vaciller (2019) ou encore dans Lâche (2015), la chorégraphe s’attache à tisser de nouvelles relations avec la lumière pour solliciter l’imagination du spectateur.

Avec sa création Et de se tenir la main, Mélanie Perrier cherche à éveiller le spectateur sur la puissance des relations que nous expérimentons et à donner à voir ce qu’elles ont de fondamentales. La chorégraphe nous invite à de nouveau goûter à la simplicité de prendre la main de quelqu’un.

Et de se tenir la main (40min), Mélanie Perrier et sa Cie 2 Minimum, le mercredi 15 mars au Triangle, cité de la danse, boulevard de Yougoslavie.

Tarif Unique : 9€

Tarif Sortir!: 4€

Tarif Sortir! Enfant : 2€

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