Entretien avec Philippe Maujard alias DJ le clown à l’occasion de la parution de sa dernière vidéo mashup. Retrouvez-le 21 juin aux Ateliers du Vent à Rennes avant qu’il ne se produise au Mashup Film Festival au forum des images (forum de halles Paris) le 24 juin.

Pouvez-vous présenter à nos lecteurs le label Wild Wild Rennes et son actualité ?

Wild Wild Rennes est né à la suite d’un constat : les majors et les labels conventionnels ne prennent plus de risque artistique. Comme les outils informatiques, notamment le web, le permettent désormais, pourquoi ne pas faire le travail soi-même ? C’est ainsi que j’ai décidé de monter Wild Wild Rennes. J’ai voulu dans un premier temps « asseoir » le label dans cette image « Rock » de Rennes. Pour être référencé dans les moteurs de recherche, j’ai inclus le nom de la ville dans celui-ci.

,Wild Wild Rennes,Salut Martin,DJ le clown, mashup, UBIK, Disparus de Saint Agil, rennes culture, nicolas robertiDe plus, comme j’ai débuté ma carrière de musicien avec UBIK, dans ces années 80 qui firent les beaux jours de la cité rennaise, j’en connaissais à peu près tous les acteurs ; et je voulais retrouver un peu de cette magie et de cette énergie qui régnait à l’époque…

Votre 1ère compilation rencontre-t-elle le succès qu’elle mérite ?…

Elle est n°1…Sur Venus uniquement ! Mais c’est déjà pas mal ! Quant à notre planète, ce sera sans doute plus difficile, étant donné les difficultés croissantes que rencontre la profession du disque. C’est déjà très difficile de vendre le CD d’un artiste ; alors une compilation…
Mais j’étais bien conscient du contexte dès le départ. Il s’agissait avant tout de donner une idée générale des orientations artistiques du label Wild Wild Rennes. Éclectique – tel est l’adjectif qui pourrait sans doute le caractériser au mieux.

À titre plus personnel, vous venez de publier une nouvelle vidéo mashup de bootleg art. Quel en a été le déclencheur ?

DJ Le Clown (c’est mon nom de guerre dans le milieu du Mashup) a déjà publié une soixantaine de Vidéo Mashup ! Je me suis toujours intéressé au Remix et je me suis mis à faire du Mashup en 2006. J’y ai vite pris goût, mais comme je me suis toujours intéressé au cinéma, j’ai décidé de faire aussi du mashup vidéo pour accompagner mes mixes – tant qu’à être dans l’illégalité, autant y aller à fond ! Je risque 3 ans de prison et 300 000 euros d’amende pour cela ! C’est pourquoi j’ai décidé d’adopter le costume de bagnard avec lequel je joue sur scène.
Le collage en peinture ; c’est l’équivalent du Mashup vidéo, mais dans le milieu de la musique et du cinéma les mentalités sont moins propices à la tolérance, money oblige ! Et puis je considère que le cinéma est un langage, un alphabet commun, une sorte d’espéranto moderne qui appartient à tous. Alors je ne fais que me servir de ces phonèmes pour exprimer mon propos…
Cela ne m’empêche d’ailleurs pas de jouer dans des festivals de cinéma. Certaines de mes « victimes » sont même ravies de voir leurs œuvres revisitées !
Ce qui me plaît beaucoup également : faire redécouvrir certaines œuvres par le biais du Mashup. Comme « Salut Martin » qui détourne, pour une fois exclusivement, les Disparus de Saint Agil

Pourquoi avoir choisi Les disparus de Saint Agil réalisé par Christian Jacques en 1938 à partir du roman de Pierre Véry, une oeuvre remarquable, mais qui n’a pas nécessairement très bien vieilli ?

Pour moi, c’est un film culte ! Je trouve même qu’il est encore moderne. Les dialogues de Prévert y sont pour beaucoup, c’est certain. Ce film sent la guerre qui se profile à l’horizon…La peur de l’étranger incarné dans le film par Eric von Stroheim. De plus je suis fan de Michel Simon, un immense comédien. On retrouve en outre dans ce film des gens comme Mouloudji et Charles Aznavour… en culotte courte !
Je suis étonné moi-même par les réactions que ce Mashup suscite. Je pensais me « ramasser » en beauté avec un truc pareil, mais bien au contraire les réactions sont excellentes. Je constate que ce film est émotionnellement important pour de nombreuses personnes. J’ai fait un petit test sur mes enfants et ma fille l’a déjà regardé une dizaine de fois !
J’ai d’ailleurs toujours pensé que Gérard Jugnot s’en était un peu inspiré pour ses « Choristes » . Et puis, sa diffusion systématique en période de Noël dans les années 60 y est sans doute aussi pour quelque chose !
De plus, quand j’ai redécouvert la scène dans laquelle Robert Le Vigan explique à Michel Simon que « Les œuvres d’art ça ne sert à rien ! » c’était vraiment impossible pour DJ Le Clown de passer à côté d’un truc pareil !

Quelle signification recouvre pour vous le Chiche Capon, la répétition du signe de reconnaissance des collégiens ?

Pas grand-chose à vrai dire, juste un signe de reconnaissance, le coté société secrète…Un signe de reconnaissance !

Au-delà du détournement et du montage, au reste réussis, que souhaitez-vous suggérer aux spectateurs, notamment avec l’intervention et la superposition de la figure du squelette (laquelle fait écho au squelette Martin dans le film) ?

C’est le symbole de la mort. Il y a un petit côté initiatique dans ce film. C’est d’ailleurs pourquoi j’ai ajouté ces squelettes dansants…Le DJ est lui aussi un squelette ! Et il mène la dance. La mort c’est le grand show final ! Celui pour lequel on est censé se préparer toute notre vie…
C’est aussi une sorte d’adieu à l’enfance.  Et puis dans le film, on sent aussi la guerre qui n’allait pas tarder à éclater…Un an plus tard. C’est aussi la raison pour laquelle j’ai aussi utilisé la phrase « Et dire qu’il y a des gens qui s’obstine à croire qu’il n’y aura pas la guerre » ! Prévert, on le sait, était un grand ennemi de la guerre !

Dès lors, comment souhaitez-vous que le spectateur votre travail ?

En fait, je n’ai aucun a priori sur la manière dont le public est censé recevoir cette musique et les images qui l’ont inspiré. Je n’en attends rien de particulier. Sauf de susciter quelques sourires et peut-être de l’émotion. Une émotion que j’ai moi-même ressentie. La musique et le cinéma, l’art en général, ce n’est qu’une question de partage… Tout comme la vie n’est qu’une histoire de rencontres…

Propos recueillis par Nicolas Roberti


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Nicolas Roberti
Nicolas Roberti est passionné par toutes les formes d'expression culturelle. Docteur de l'Ecole pratique des Hautes Etudes, il a créé en 2011 le magazine Unidivers dont il dirige la rédaction.

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