Brocéliande ? Pas la forêt, un ensemble issu de l’Orchestre symphonique de Bretagne. Cet ensemble Brocéliande s’est transplanté la semaine dernière au Tambour pour une prestation pleine d’invitations aux voyages et centrées sur des compositeurs français. Guy Ropartz, Jean Cras, Vincent d’Indy furent les capitaines de ce périple réussi.

 

Si le Tambour de l’Université Rennes 2 n’est pas le plus grand auditorium de Rennes, il possède un précieux atout : son acoustique. C’est le cadre intime qu’avait choisi l’inhabituel quintet Brocéliande pour nous inviter à une croisière bretonne et ultramarine.

Inhabituel ? Par sa composition tout au plus. Si le trio de cordes formé par Nicolaï Tsygankov, Cyril Robert, et Stéphane Genay reste une base classique, la présence d’une flûte et d’une harpe est plus atypique ; mais, Stella Daouès et Delphine Benhamou justifieront pleinement leur présence. Cette formation de jeunes musiciens – pour un soir évadés de l’orchestre symphonique de Bretagne – va nous séduire d’un bout à l’autre de ce concert qui a été, bien malheureusement, peu ou mal annoncé.

ensemble brocéliandeGuy Ropartz ouvre le bal et nous indique immédiatement la route à suivre. «  Prélude, marine et chanson » – tout invite au voyage. C’est une musique à la fois pleine de poésie mais également de vigueur. C’est dans la Bretagne populaire qu’elle plonge ses racines ; on y entend parfois le rythme de danses joyeuses et dignes. C’est vrai dès le premier morceau et cette impression maritime, cette aspiration au lointain ne nous quittera plus. La suite opus 34 de Marcel Tournier nous conforte dans cette opinion, le début lent et mystérieux teinté de mélancolie évoque une autre « mer » bien connue, celle de Claude Debussy. Tel le ressac, la mélodie s’amplifie puis s’apaise ; nul instrument ne peut suggérer ce mouvement de va et viens mieux que la harpe. Le troisième mouvement offre l’occasion d’entendre Cyril Robert développer une envoûtante mélodie, empreinte de tristesse et que son alto, aux notes liquides et graves rend puissamment émouvante. Cette œuvre, que beaucoup découvrent (comme son auteur) unit gaieté à une certaine élégance à la Française. Elle se termine dans une note commune en forme d’éclat de rire.

Connaissez-vous Jean Cras ? Non content d’être un officier émérite de la « royale », d’avoir inventé une règle encore en usage qui permet de tracer la route d’un bateau, cet original incarne l’élégance. Ce marin, natif de Brest et qui ne se déplaçait jamais sans son piano, propose une musique sans fioritures, authentique et impressionniste. Alors même qu’il participe au blocus des côtes dalmates, il termine l’écriture de son unique opéra « Polyphème » à bord du contre-torpilleur Commandant Bory, dont il assure le commandement. C’est la musique d’un grand voyageur, pétri de culture judéo-chrétienne et infiniment respectueux des cultures qu’il rencontre, ne cédant jamais à la tentation d’un exotisme de pacotille. Ce sera pour nous l’occasion d’entendre le violoncelle, enfin seul, nous chuchoter une mélodie profonde et apaisée.

Pour Vincent d’Indy la « bretonnitude » est moins évidente. Si notre très aristocrate musicien est un peu à part, c’est au travers des influences musicales qu’il convient d’aller chercher un lien. En effet le fil conducteur de ce concert n’est pas seulement la mer ou la Bretagne, mais dans une lecture au second degré : l’influence de musiciens essentiels dans la constitution d’une école française au XIXe siècle. Il est équitable de citer Jules Massenet, César Franck, et, bien entendu, Henry Duparc qui furent les professeurs de Ropartz et Cras.

Un beau concert où les instrumentistes de l’OSB, habituellement anonymes au milieu de leur formation, se sont exprimés de manière individuelle et ont démontré leur talent. Aucun d’eux n’échappe aux louanges.

G. Ropartz, Prélude, Marine et Chanson
V. d’Indy, Suite en parties pour trio à cordes, flûte et harpe
M. Tournier, Quintette pour trio à cordes, flûte et harpe
J. Cras, Quintette pour trio à cordes, flûte et harpe

Ensemble Brocéliande de l’OSB
N. Tsygankov (violon) / C. Robert (alto) / S. Genay (violoncelle) / S. Daouès (flûte) / D. Benhamou (harpe)

Concert proposé par L’Orchestre Symphonique de Bretagne et le Musée de Pont-Aven s’associent de nouveau pour faire dialoguer compositeurs et peintres, à travers un programme mêlant la musique française ciselée du début du XXe siècle aux échos de cette terre d’élection de Gauguin, Sérusier ou Émile Bernard.

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Thierry Martin
thierry.martin [@] unidivers .fr

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