Audrey Célestine, chercheuse en sciences sociales, dresse le portrait rapide d’une soixantaine de femmes, toutes engagées contre le racisme, la ségrégation ou en faveur de la défense des femmes. Certaines sont célèbres comme Rosa Parks, Joséphine Baker, Michelle Obama, Christiane Taubira. D’autres, telles Sojourner Truth ou Audre Lorde, beaucoup moins.

Vies de combat Audrey Célestine

Quatre chapitres temporels illustrent les débuts du mouvement et l’inspiration donnée au fil des temps jusqu’aux mouvements féministes actuels. De la fin du XIXe siècle à 1960, malgré le décret français d’abolition de l’esclavage en avril 1848 et une proclamation d’émancipation inscrite dans la Constitution des États-Unis en 1863, le racisme perdure.

Hariette Tubman
Le nouveau billet de 20 dollar avec le visage d’Hariette Tubman, prévu pour 2020, et qui devait coïncider avec le 100e anniversaire du droit de vote des femmes aux USA a été repoussé par le président Trump. Il devait remplacer l’actuel billet sur lequel figure le président controversé Andrew Jackson.

Harriet Tubman (1821-1913), appelée la « Moïse noire », crée le premier réseau clandestin qui sauvera des centaines de vies en guidant des esclaves vers la Pennsylvanie. Henrietta Wood (1818-1912), Sojourner Truth (1797-1883), seront les premières esclaves à porter plainte contre des Blancs. Journalistes, Paulette Nardal (1896-1985), Ida B.Wells (1862-1931), prennent la plume pour défendre les Noirs ou dénoncer les violences.

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  • IDA B WELLS
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Joséphine Baker, Billie Holiday, Sarah Vaughan utilisent leur art et leur notoriété. Rosa Parks devient le symbole d’une cause en 1955 en refusant de céder sa place dans un bus, mais c’est Claudette Colvin, une adolescente qui le fit pour la première fois neuf mois plus tôt.

« Notre liberté est menacée chaque fois qu’une personne est arrêtée et battue par la police à cause de la couleur de sa peau. » Rosa Parks.

SEGREGATION USA
Caroline du nord, mai 1940. Photo Jack Delano. https://www.loc.gov/rr/print/list/085_disc.html

En 1964, le droit rend illégal le principe de séparation et l’inégalité institutionnalisée entre Blancs et Noirs aux États-Unis, mais l’assassinat de réformateurs met le feu aux poudres. En Europe, c’est le début de la décolonisation. En moins de vingt ans, deux cent mille « domiens » s’installent dans l’Hexagone.

De 1960 à 1980, l’émergence du féminisme amorce un nouveau tournant culturel. Elles sont jeunes, talentueuses et noires. Journalistes, chanteuses, avocates, écrivaines, actrices, réalisatrices, elles usent de leur talent pour aider les pauvres à se faire une place, défendre le rêve qu’on leur a vendu, dénoncer l’oppression. Gerty Archimède, avocate guadeloupéenne, est la première femme noire à entrer à l’Assemblée nationale. Shirley Chisholm, est élue au Congrès des États-Unis en 1969.

SHIRLEY CHISHOLM
Shirley Chisholm (1924-2005)

Elles ouvrent les portes à celles qui oeuvreront pendant les deux décennies suivantes. De 1980 à 2000, si la ségrégation et la colonisation appartiennent au passé, de nombreuses femmes noires demeurent considérées aux États-Unis comme des « welfare queens » ( « reines des allocs ») ou des femmes agressives. En France, elles sont vues comme des femmes soumises et sexualisées. Mais si certaines courbent l’échine, d’autres se rebellent.

Toni Morisson
Toni Morisson (1931-2019)

Toni Morrison est l’exemple de cette génération. Ses romans se démarquent en évoquant pour la première fois le ressenti des hommes, femmes et enfants noirs. Elle sera la première écrivaine noire à obtenir le Prix Nobel de littérature en 1993. Maryse Condé recevra l’équivalent de ce prix en 2018. Poétesses, réalisatrices, comédiennes, elles utilisent leur art pour enfin parler d’eux-mêmes.

«  Avec ma caméra, je ne filme pas, je répare », Euzhan Palcy, réalisatrice de Rue Cases-Nègres.

Le XXIe siècle s’ouvre avec la loi française qui qualifie l’esclavage et la traite de crime contre l’humanité et l’installation d’un président noir à la Maison Blanche. Les réseaux sociaux aident à la propagation des mouvements #MeToo et #BlackLivesMatter. On découvre dans ce livre ses trois fondatrices. Les combattantes de notre siècle sont les héritières de cette longue marche des femmes.

Assa Traoré
Assa Traoré. Photo issue du compte twitter d’Olivier Besancenot.

« Si je peux prendre la parole publiquement et dire ce que je veux librement en tant que femme noire, c’est parce que de nombreuses femmes se sont battues auparavant. » Assa Traoré.

Mais devenir porte-parole expose au racisme et aux insultes. Christiane Taubira en est le symbole et Michelle Obama comprend vite qu’elle doit répondre au racisme en étant irréprochable. Dans leurs romans, Léonora Miano ou Chimamanda Ngozi Adichie osent proposer un autre monde, refuser l’histoire unique. Jocelyne Béroard, Beyonce, Rihanna défendent leur culture ou utilise leur image pour mener des actions politisées contre la discrimination.

Viola Davis
Viola Davis

Viola Davis est la première femme noire à obtenir un Emmy Award en 2015 et un Oscar en 2017 ! La nouvelle génération veut sortir des clichés de souffrance et d’autoflagellation. Elles se battent pour que chacun gagne l’estime de soi et la liberté. Audrey Célestine ne dresse pas un portrait complet de toutes ces femmes. Chaque lecteur pourra continuer ses recherches en s’inspirant de la bibliographie jointe en fin de volume. Mais ces rapides portraits mis bout à bout montrent combien le chemin est long et difficile.

Le parcours de ces femmes courageuses induisent inévitablement le trouble, l’émotion et l’indignation. Un livre nécessaire et inspirant. Audrey Célestine est enseignante et chercheuse en sciences sociales à l’Université de Lille, spécialiste des États-Unis et des populations noires en France. Elle intervient régulièrement dans les médias sur les questions d’actualités politiques en France, aux États-Unis et dans les « Outre-mer ».

Des vies de combat d’Audrey Célestine paru aux Éditions de l’Iconoclaste le 14 octobre 2020, 304 pages, Prix : 22 euros, ISBN : 9782378801632.

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Marie-Anne Sburlino
Lectrice boulimique et rédactrice de blog, je ne conçois pas un jour sans lecture. Au plaisir de partager mes découvertes.

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