Le documentaire Des Jeunes Gens Mödernes, Post punk, cold wave et culture növo en France, 1978-83, débarque à Rennes jeudi 5 février dans le cadre et un peu hors-cadre du festival Travelling. La projection au ciné TNB sera suivie, en toute logique, d’une soirée musicale un peu hors-norme…

 

Moderne ? Vous avez dit moderne… ?

En 2008, à la Galerie du Jour Agnès B se tenait une exposition consacrée à la scène musicale française du début des années 80. Elle a donné l’idée à Jean-François Sanz  (épaulé par de nombreux collaborateurs passionnés) de consacrer en 2011 un documentaire aux acteurs et témoins de cette mouvance bigarrée, au sein de laquelle les musiciens rennais se ménagèrent une place non négligeable. D’ailleurs, le Rennais Gilles Le Guen (musicien, DJ et fin connaisseur de cette période) a collaboré à l’élaboration du projet dès son origine.

27028512Dans un montage vif et rapide, mêlant avec bonheur images d’archives et entretiens contemporains, de nombreux acteurs de l’époque livrent leurs impressions, souvenirs, espoirs, illusions et désillusions de ce qui fut une mouvance, vague et indéfinissable, plus qu’un mouvement : « une armée de romantiques avec une esthétique de désillusions » selon Étienne Daho.

660696De Philippe Pascal (chanteur et parolier de Marquis de Sade puis de Marc Seberg) à Maurice G. Dantec (le romancier fut en effet clavier dans le groupe Artefact) en passant par Jacno (Stinky Toys, Eli et Jacno) ou Daniel Darc (Taxi Girl) les points de vue divergent, se confrontent. Les attentes, les enjeux n’étaient pas les mêmes. Radicalité, modernité, nihilisme assumé, pour le dépasser ou le contrecarrer, nouveau romantisme ou simple plaisir esthétique de la nouveauté… Un peu de tout cela à la fois.

Des Jeunes Gens modernesLa mosaïque Des Jeunes Gens Mödernes est chatoyante. Aussi décalée et surprenante que l’était l’art du groupe graphique Bazooka ou les looks décalés et décadents de Patrick Eudeline, Alain Pacadis ou Yves Adrien. Car la singularité de ce maelstrom culturel fut sans doute d’être le dernier à bénéficier de sa propre et synchronique mise en théorie par des critiques musicaux à la plume et au style assumé et déroutant.

Inquiétude et désuétude 

 

Le même week-end (8 et 9 septembre) auront donc lieu le Futurama 79 et la Fête de l’Humanité. C’est là toute la différence entre l’Angleterre et la France : d’une part un safari Sci-Fi novö sous le velours pourpre du Leeds Queen’s Hall; de l’autre une déambulation populiste et pataude dans les égouts de la Courneuve. « Si votre enfant est gai… c’est qu’il est communiste » : cette pirouette bazookienne m’évitera de pousser plus avant la comparaison Bernard Lavilliers / David Bowie. Yves Adrien, Novövision, Denoël, 2002 (1ère édition 1980), p. 123

Yves Adrien
Yves Adrien dans les années 70

Quoi qu’on en dise, le style est bien français. Et Patrick Eudeline a raison d’affirmer que la cold-wave fut, finalement, une métaphysique à la française. Certes, les influences majeures venaient d’ailleurs, mais elles frappèrent aux oreilles et aux autres sens d’une génération qui semblait prête à assumer la perspective d’une Europe culturelle réenchantée, revivifiée. « Prendre le XXe siècle sur ses épaules » comme l’écrit Dantec.

Des Jeunes Gens modernesEnfants attardés du punk qui n’exista qu’en un éclair – et pour à jamais se refaire et se renier –, se saoulant de mots, de notes et autres substances psychoactives, se mesurant à la réalité démesurée d’une technologie aussi euphorisante qu’inquiétante, ces artistes ont permis l’apparition en France de l’esprit d’indépendance de la scène musicale. D’un esprit mais également de son incarnation, lieux, structures, associations… Tout cela vaut largement un regard (moderne) dans le rétro !

Jeudi 5 février : Soirée Des Jeunes Gens Mödernes à Rennes :
Projection du documentaire, en présence des auteurs et de plusieurs des intervenants du film, au Ciné TNB (1 rue Saint-Hélier) dans le cadre du Festival Travelling à 19h30, en partenariat avec l’Association des Transmusicales de Rennes, suivie de questions/réponses avec le public de 21h à 21h30. Réservation :  (ouverture billetterie mercredi 4 février, 14h) : Clair Obscur

Soirée de concerts à l’Ubu-Club
1, rue Saint-Hélier à partir de 22h avec des live de PARIS, DANTZIG et VIOLENCE CONJUGALE + DJ set de Gilles Le Guen.et J-F Sanz.
Réservation : Ubu

Du 5 février au 6 mars // Exposition Des Jeunes Gens Mödernes :
En partenariat avec l’association BUG et en préfiguration du nouvel espace dédié à la photographie au sein de la Maison des associations / CRIJ Bretagne (6 cours des alliés) – vernissage le jeudi 5 février de 18h à 19h15.
Version allégée et réactualisée de l’exposition présentée à la Galerie du Jour Agnès B. en 2008, à l’origine du documentaire. Aves les œuvres de Philippe Adrian, Bazooka, Belle Journée en Perspective, Emanuel Bovet, Alain Dister, Catherine Faux, Haute Tension, Philippe Huard, Tony Iacoponelli, Jo Pinto Maia, Philippe Morillon, F.J. Ossang, Patrice Poch, Pierre René-Worms, Tino Tedaldi, Liliane Vittori.

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Thierry Jolif
La culture est une guerre contre le nivellement universel que représente la mort (P. Florensky) Journaliste, essayiste, musicien, a entre autres collaboré avec Alan Stivell à l'ouvrage "Sur la route des plus belles légendes celtes" (Arthaud, 2013) thierry.jolif [@] unidivers .fr

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