Après le neighborhood watching, une nouvelle démarche relative au respect de l’Etat de droit arrive en provenance des Etats-Unis : le citizen watching. Copwatch est né sur la côte Ouest à la fin des années 1990. Il est arrivé en France l’année dernière. Le site recense des fonctionnaires de police qui auraient outrepassé leurs pouvoirs. Un temps bloqué, il est de retour en ligne à une nouvelle adresse. Pour mémoire, le ministère de l’Intérieur avait obtenu sa fermeture en octobre.

Comme le phénix qui renaît de ses cendres, Copwatch revient sous une nouvelle adresse. L’identité ne fait aucun doute comme l’explique l’entrée en matière intitulée l’État censure, Copwatch renaît : « Le ministère de l’intérieur français a voulu nous interdire. Il a échoué. Aujourd’hui, c’est à nous de lui rendre la donne ».

Pour information, Copwatch France publiait des photos de policiers du bassin parisien et picard assortis d’informations personnelles. Pourquoi ? Le site accusait des fonctionnaires de bavures ou de dérapages volontaires et la place Beauveau de les couvrir. Comment ? Photos, vidéos et témoignages à l’appui. Le ministère de l’Intérieur avait dénoncé un fichage intolérable et des accusations mensongères. Copwatch a répondu en arguant de la nécessité d’une transparence, autrement dit, un fichage des fonctionnaires aux comportements indélicats, voire coupables.

Mais à partir de quand, dans un Etat de droit, la dénonciation fichée devient-elle délation diffamatoire ? Bref, la justice a été saisie : le 14 octobre 2011, les fournisseurs internet ont reçu l’ordre d’interdire l’accès au site Copwatch toutes pages confondues. Pour protester contre la décision du tribunal de Paris, des sites miroirs répliquant le contenu de Copwatch se sont vite mis en place sur la toile. Les hackers, dans l’esprit d’anonymous, ont contribué à cette prolongation du site sous de nouveaux avatars. La Place Beauveau devrait engager une nouvelle action en référé. En attendant, les copwatchers participeront à la manifestation du samedi 28 janvier 2012 en faveur de la liberté d’Internet. Il est sûr qu’ils auront en main appareils photo et caméras…

En attendant, c’est toute la question de la limite de la transparence et de la justification du fichage qui se pose, en particulier, avec les nouveaux outils informatiques. La transparence est-elle un idéal vers lequel les sociétés démocratiques doivent tendre ? Presque tout le monde s’accorde à dire oui. Mais pour certains, cette tension est uniquement théorique, notamment législative. En pratique, un certain flou dans certaines marges serait nécessaire à la progression vers la transparence (en particulier, pour les services secrets et la lutte contre le terrorisme). Sur le terrain, deux écoles s’affrontent dans le traitement de cette contradiction propres aux Etats de droit postmodernes. Manu militari versus manu anonymous…

Nicolas Roberti

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Nicolas Roberti
Nicolas Roberti est passionné par toutes les formes d'expression culturelle. Docteur de l'Ecole pratique des Hautes Etudes, il a créé en 2011 le magazine Unidivers dont il dirige la rédaction.

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