Les Bretonnes dans la Résistance ? 10 à 15 % des résistants qui luttèrent contre l’occupation allemande de la Bretagne entre 1940 et 1945 furent des femmes. Peu connues, ces « oubliées de l’histoire » ont pourtant joué un rôle déterminant dans la Résistance. Unidivers vous propose un retour sur 10 femmes résistantes qui ont marqué, souvent avec discrétion, l’histoire de la Bretagne. L’histoire de la France libre.

 

Dès 1940, la Bretagne fourmille de résistants actifs, pour une raison très simple : sa position géographique et maritime fait d’elle une région stratégique. Ses occupants doivent redoubler de surveillance, mais ses alliés se réjouissent des possibilités de résistance qu’elle offre. Les réseaux de renseignements se multiplient, notamment autour des bases, des chantiers navals, de la construction du mur de l’Atlantique ou encore des mouvements de troupes. La région regorge de filières d’évasion et constitue une entrée inespérée sur le territoire français. Des Bretonnes, voire des familles entières — mères, filles,  sœurs — s’engagent dans la résistance à travers de nombreux  postes clés.

Des femmes dans les réseaux de résistance

Bretonnes Résistance
Huguette Gallais

Huguette Gallais n’hésite pas, en 1940, à rentrer en résistance lorsque son père crée un des premiers réseaux de lutte en Bretagne : le réseau Gallais à Fougères. Il prévoit de stocker des armes, d’aider à passer en zone libre ou en Angleterre, d’héberger des officiers de l’intelligence Service ou des agents de renseignements de Londres, de ravitailler ainsi que d’organiser des retours de parachutistes vers l’Angleterre… Face à l’ampleur de la tâche, Huguette, élève infirmière âgée seulement de 20 ans, propose son aide : organisation de passages en zone libre, envoi de courrier de Sénégalais prisonniers à Saint-Brice-en-Coglès (ou Coglès) vers leur famille ou, encore, expéditions pour cacher des armes. Mais en 1941, le réseau est dénoncé et Huguette sera déportée dans les camps d’extermination de Ravensbrück et Mauthausen, en même temps que sa mère Renée qui était l’intermédiaire entre les membres du réseau. Huguette est morte le 18 janvier 2016, elle fut la dernière survivante du réseau Gallais.

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Marie-Jeanne Le Bozec

Ce sont des familles entières qui ont contribué à la Résistance française en Bretagne. La famille Renault en est l’exemple même. Gilbert, plus connu sous le nom de Colonel Rémy, fonde le réseau de renseignement Confrérie Notre-Dame (appelé par la suite CND-Castille) en 1940. Il y emploie presque toutes ses sœurs : Maisie, Isabelle, Jacqueline, Hélène et Madeleine ainsi que sa mère : Marie Decker. La première, Maisie, devient même secrétaire du réseau, triant les informations pour les remettre aux radios chargées des liaisons avec Londres. Le réseau est infiltré en 1942. Maisie et Isabelle sont arrêtées et torturées par la Gestapo. Elles ne délivrent cependant aucune information en ce qui concerne le CND-Castille. Elles sont alors déportées. La mère et les autres sœurs du Colonel Rémy sont aussi arrêtées. Le réseau a pu survivre grâce à leur silence. Il a continué à employer de nombreuses femmes (environ 19%) à de nombreux postes. Par exemple, Marie-Jeanne Le Bozec, dite Yvon, fut aussi secrétaire du réseau. Cette dernière, au retour de sa déportation à Ravensbrück, sera entre 1958 à 1967, la secrétaire particulière du Général De Gaulle.

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Suzanne Wilborts

Des femmes sont aussi à l’origine de la création de réseaux de résistance comme Suzanne Wilborts. Cette Parisienne s’installe, avant l’occupation, sur l’île de Bréhat avec sa famille. Elle crée « la bande à Sidonie » d’après son nom de résistante « Sidonie ». Elle y réunit sa famille, dont sa jeune fille, Yvonne, ainsi que bien d’autres volontaires. Le premier objectif est d’organiser un réseau d’évasion vers l’Angleterre. Le mouvement se rattache peu à peu à Georges France 31, un réseau de renseignement en lien avec l’Intelligence Service. Sa fille, sous le nom de Marie-José (prénom qu’elle gardera par la suite), était étudiante en médecine. Elle participe à des missions de renseignements. Les deux femmes sont arrêtées puis déportées. En 1996, Marie-José deviendra la présidente de la fondation de la mémoire des déportées. La liste des Bretonnes engagées dans les réseaux est encore très longue.

Des rôles multiples

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Agnès de la Barre

Comme Marie-Thérèse Le Calvez de Plouha et sa mère, Léonie, dans le réseau Shelburn, de nombreuses femmes participent au recueil des aviateurs alliés. Marie Lavenant est fille de fermiers. Elle décide d’entrer dans un circuit grâce à une amie, aussi résistante : Agnès de La Barre de Nanteuil. Elle se rend à bicyclette à la gare de Vannes avec son amie pour aider les agents débarqués. Elle est devenue par la suite agente de liaison et de renseignement. Elle a notamment participé aux combats de la libération en assurant la liaison entre les parachutistes et le maquis. Le général de Gaulle a récompensé son courage avec la Croix de Guerre.

Les agents de liaison et de renseignements sont essentiels pour les résistants. Agnès de La Barre de Nanteuil fut l’agent de liaison entre le capitaine de frégate Paul Chenailler (le Colonel Morice), commandant de l’Armée secrète du Morbihan et le général Audibert, chef de la résistance de l’Ouest. À la postérité, certaines sont devenues des martyrs aux yeux des collecteurs de mémoires, comme Simone Le Port, agent de liaison dans le groupe de résistance dirigé par son mari, Julien. Elle héberge des résistants dans sa ferme isolée dans le Morbihan. Elle est dénoncée et les Allemands brûlent la ferme. Torturée, elle ne dit rien, se sacrifiant ainsi pour son mari. Elle est déportée à Ravensbrück.

Certaines ont de multiples missions. La ferme de la Nouette en Sérent accueille de nombreux résistants locaux. Peu à peu, elle se transforme en base de réception d’armes et de renforts parachutés au moment du débarquement. Les filles des fermiers de la Nouette en Sérent, Anna et Geneviève, assurent des liaisons, envoient des messages, préviennent les groupes de parachutistes de dangers. D’autres jeunes filles font office de dactylos, d’infirmières, ou encore confectionnent des brassards, des drapeaux, des fanions…

Des destins hors-normes

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Yvonne Beauvais

L’histoire d’Yvonne Beauvais est surprenante. Née en 1901 en Mayenne à Cossé-en-Champagne, elle postule au couvent de Malestroit. Elle devient la mère supérieure du couvent des Augustines en 1935 jusqu’en 1951. Elle dessine les plans d’une nouvelle clinique. Cette dernière se transforme en hôpital militaire lors de la guerre. Elle y héberge secrètement des résistants et des combattants étrangers. Elle les soigne, les cache ou les évacue. En 1943, elle est arrêtée par la Gestapo. Et là : mystère ! Elle s’évade miraculeusement. La religieuse aura le droit à une Légion d’honneur par la suite (mais ne révélera jamais comment elle s’est échappée !).

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Maisie Renault

Une autre femme connaît un destin extraordinaire : Jeanne Bohec. Née en 1919 à Plestin-Les-Grèves (Côtes du nord, Côtes-d’Armor aujourd’hui), elle apprend d’abord les mathématiques à l’Université Catholique d’Angers. Elle se fait ensuite embaucher en tant qu’aide-chimiste à Brest où l’on y fabrique des munitions. Alors que la Bretagne est occupée le 18 juin 1940, Jeanne entend l’appel du général de Gaulle. La jeune patriote décide de rejoindre la résistance à Londres, contre l’avis de ses parents. Elle dut aussi se battre en Angleterre pour participer aux actions de résistance dans l’univers machiste de l’époque. Elle finit par suivre un stage pour apprendre à faire du sabotage, à faire du parachutisme ou encore à effectuer des liaisons pour ne pas être repérée par des services de répression allemand et français. Elle fut l’une des 5 femmes françaises libres à être parachutée en France. L’essentiel de sa mission se déroula en Bretagne : elle forma les résistants du maquis, notamment ceux de la région de Saint Marcel, au sabotage et au maniement des explosifs. Cependant elle ne put jamais participer aux combats. Elle eut la chance d’échapper aux arrestations.

Il y a encore tant de femmes dont le destin durant l’occupation nous est inconnu. Peu à peu, les historiens, les associations d’anciens résistants tentent d’en reconstituer la mémoire. L’histoire de la Bretagne et de la France. La mémoire de la France libre.  Notre mémoire.

10 Bretonnes dans la Résistance durant la Seconde Guerre Mondiale en Bretagne a notamment pour sources :

À propos de la résistance en Bretagne
À propos des résistants en Bretagne
À propos de quelques résistantes du Morbihan
Lien vers un fichier PDF présentant le réseau Gallais et ses membres

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Laure Besnier
Laure Besnier est étudiante en sciences humaines à l'Université Rennes 2 et en stage de journalisme à Unidivers.

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