Pour sa première exposition en solo, Les forces heureuses, Céline Le Guillou considère l’espace d’exposition comme un tout organique où ses œuvres tiennent le rôle d’organes. Marquée par le potentiel du corps à devenir monstrueux ou différent, ses sculptures et ses peintures invitent ces forces naturelles à se manifester. Organisée à Brest, au centre d’art Passerelle dans le cadre des Chantiers, résidence destinée aux jeunes artistes bretons, l’exposition est visible jusqu’au 17 septembre 2022.

Les forces heureuses
Coupe anatomique d’une des sculptures de Céline Le Guillou.

Après avoir passé trois mois entre les murs du centre d’art contemporain Passerelle, Céline Le Guillou nous livre Les forces heureuses, sa première grande exposition personnelle. Ce qui a amené la jeune artiste à travailler la terre, c’est avant tout l’énergie spontanée de ce matériau. Réaction chimique ou volonté propre, sa pratique se teinte d’une sensibilité animiste. Si la matière souhaite s’épancher, se durcir ou se craqueler, le mouvement qui réside en elle lui donne un caractère. C’est cette rencontre avec le matériau qui anime les recherches de l’artiste. Étrangement, notre corps n’est pas si éloigné de cette physique. Cycles menstruels, grossesses, maladies ou malformations, des forces naturelles parfois taboues se saisissent de nos chairs pour les modeler indépendamment de notre volonté. Un rapprochement entre corps humain et céramique plus qu’évident.

Les forces heureuses
Le temps semble s’être arrêté pour certains corps, comme suspendus dans du formol.

Aussi dans cette exposition, Céline Le Guillou génère des formes s’approchant du vivant. Céramique et porcelaine s’enveloppent couche sur couche avant d’être tranchées en deux, révélant leurs entrailles. Très organique, sa sculpture fournit alors un répertoire de coupes anatomiques, de dissections, de prélèvements qui ne sont pas sans évoquer la céroplastie du XVIIIème siècle. Pratique élaborée par des médecins et des sculpteurs, elle permettait d’étudier la chirurgie non plus en se basant sur des cadavres, mais par le biais de moulage en cire, un savoir-faire aujourd’hui totalement perdu. Les pièces exposées pour Les forces heureuses partagent cette temporalité : celle du vivant conservé qui devient intemporelle, ne faisant plus partie de notre réalité mais nous y renvoyant forcément.

Les forces heureuses
Céline Le Guillou réalise également des peintures à l’huile, où la transparence des couches rejoue ses questionnements sur l’enveloppe charnelle.

D’habitude, l’espace muséal classique fait que chaque sculpture se retrouve sur son petit piédestal, bien mise en valeur. Mais depuis les années 70, les artistes prennent le contrepied de ces codes. Chez Céline Le Guillou, les frontières entre sujet et objet, vivant et inanimé sont poreuses, et il en va de même du couple socle et sculpture, où chaque notion peut s’intervertir. Il faut dire que lorsque l’œuvre devient trop précieuse, on prend plaisir à salir son raffinement ! Les socles deviennent des flaques de boue, des cages, des prisons qui s’en prennent violemment aux œuvres…

Les forces heureuses
Portrait de l’artiste !

En sus de son exposition Les forces heureuses, on pourra également retrouver le travail de l’artiste au Moulin de la Blies, le musée des techniques faïencières de Sarreguemines, en Lorraine. Elle y expose cet été au côté de trois autres artistes céramistes jusqu’au mois de janvier. Faisant partie de l’association La Perruque, Céline Le Guillou et ses amis aimeraient poursuivre un projet de réhabilitation d’une ancienne usine de charbon dans le Lot. En ayant rénové ses hangars, ils avaient pu l’hiver dernier y organiser une grande exposition, Traces éventuelles de graisse, mobilisant les anciens ouvriers de la fabrique. Cet hiver-ci, une nouvelle exposition pourrait avoir lieu. Le but serait d’y mener des ateliers de création avec les habitants de la région, tout en établissant une résidence pour artistes. En attendant, nous restons aux aguets sur le compte Instagram de l’artiste où de nouvelles informations pourraient filtrer.

INFORMATIONS PRATIQUES

L’exposition Les forces heureuses est visible du 17 juin au 17 septembre 2022 au centre d’art contemporain Passerelle, au 41 rue Charles Berthelot, Brest.

Ouvert le mardi de 14h à 20h, du mercredi au samedi de 14h à 18h30. Fermé les dimanches, lundis et jours fériés.

Plein tarif : 3 €

Entrée libre le premier mardi du mois 

Entrée gratuite pour les demandeurs d’emplois, les adhérents, les scolaires individuels, les étudiants, les membres de CEA et de l’AICA.

Tél : 02 98 43 34 95

Site internet

Compte instagram de l’artiste

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Benjamin Julienne
Métal expérimental, littérature russe, art contemporain, Yu-Gi-Oh!, chant bulgare et septième art tourbillonnent dans ma tête. J’écris principalement pour faire connaître les lieux d’exposition indépendants de Nantes.

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