Cap sur la demi-planète Illyanna avec la bande-dessinée Bubble Gôm Gôm. Créé il y a déjà une quinzaine d’années par l’auteur et dessinateur Cyb, ce manga sort pour la première fois en format papier en 2021. Embarquez avec les deux Yaouanks, Andragor et Shapa, pour des aventures entraînantes. Éclats de rire garantis.

Cyb, 48 ans, est un auteur originaire d’Ille-et-Vilaine. Il commence à dessiner très jeune et se lance dans le graphisme avant de créer sa première BD Cosmozone qu’il publie sur un blog. « Je dessine depuis tout petit et quelqu’un a dû me dire « ah pas mal du tout ». Une remarque banale qui peut marquer une vie j’imagine. Forcément à un moment je me suis dit que ce serait intéressant de faire de la BD et puis à cette époque-là, ça marchait assez fort », narre Cyb.

D’inspiration comic strip (bande dessinée de quelques cases disposées de manière horizontale), cette BD est une étape importante dans la carrière de l’auteur. Elle est l’occasion de récolter des retours sur son travail, mais aussi de s’initier aux logiciels informatiques. Également source de motivation pour le dessinateur, Cosmozone lui permet de participer à quelques festivals. « Cosmozone c’était pour m’obliger à faire au moins une ou deux histoires par semaine. J’ai fait cela pendant un à deux ans, puis je me suis retrouvé avec beaucoup de matière », raconte le dessinateur. « Avec d’autres blogueurs et des personnes qui voulaient transformer les BD du blog en version papier, j’ai alors participé à quelques festivals de bande dessinée ».

Dans un passé qu’il voit comme fort longtemps, Cyb, dont le nom est tiré du mot « cyborg », a réalisé également une BD sur le groupe de rock Pearl Jam et participé au projet associatif Alter1fo pour lequel il élabore quelques illustrations. Mais son chemin dans la BD ne se réalise pas d’une traite. « C’est arrivé par à-coups. À un moment on se retrouve confronté à certaines réalités ce qui fait qu’on met de côté certaines choses. » De son parcours, il garde également en tête de bons moments comme celui du Festival d’Angoulême. Alors qu’il est membre d’un fanzine au lycée, lui et son équipe sont nominés pour le festival. « Nous n’avons pas eu la palme, mais c’était un point de départ car certains membres de l’équipe ont fait des carrières. C’était une émulation très sympathique » confie-t-il.

L’aventure Bubble Gôm Gôm

Bubble Gôm Gôm, en voilà un titre original. Cyb explique l’avoir choisi en référence à l’enfance et aux machines de distribution de bonbons à la tirette de son époque :  « Il y avait des espèces de grands bonbons ronds, puis il y a l’idée de bulle. Tout ça se mélange pour donner ce titre ». Il fait également référence à la forme ronde des personnages, pas choisie au hasard et rappelant la forme de ces bonbons ronds : « Le fait qu’il n’y ait pas de corps est intéressant sur les plans inconscient et psychologique, car on a cette espèce de zone où le corps n’est pas encore développé. C’est une puberté sublimée par l’absence du corps, une peur de ce corps qui change à partir d’un certain âge donc on le gomme (gôm). Cela permet d’aller dans des délires assez marrants sans franchir une espèce de ligne à ne pas dépasser ».

« La forme des personnages est une puberté sublimée par l’absence du corps »

Cyb

Bubble Gôm Gôm raconte l’histoire d’Andragor, un jeune Yaouank qui rêve de devenir un grand guerrier. Persuadé d’être un grand génie du kung-fu, il part en quête d’aventures héroïques toujours accompagné de son fidèle ami Shapa. Les deux jeunes créatures sphériques appartenant aux Yaouanks, peuple pacifiste et sans histoire, vivront ensemble des péripéties loufoques et amusantes.

L’aventure Bubble Gôm Gôm commence il y a une quinzaine d’années. Les premières montures qui, à l’origine, ne sont pas vouées à être publiées, finissent par séduire l’éditeur marseillais Oktoprod. En 2014, ce dernier publie le manga en version numérique, mais c’est en 2021 que Bubble Gôm Gôm connaît sa première version papier.

Quelques années après la mise en ligne de la BD, Oktoprod doit en effet déposer le bilan. Cyb, qui se retrouve alors avec toutes ces pages, décide de les mettre de côté pour faire autre chose. C’est lorsqu’il se retrouve invité à une convention de manga qu’il décide de se pencher à nouveau sur Bubble Gôm Gôm afin de l’améliorer. « Je me suis retrouvé invité à une convention de manga avec pas grand-chose à proposer. Cela m’a donné l’occasion de reprendre cette histoire-là, de l’améliorer un peu et de la sortir d’une autre façon. »

L’idée lui vient d’un chenapan persuadé d’être le meilleur du monde. Selon le dessinateur, tout est possible avec un personnage tel que Andragor, comme rire de la comédie humaine, du monde et des égos. « C’est assez amusant de voir qu’il pense qu’il peut tout faire et à chaque épisode, il se casse la figure ». Conscient du potentiel comique du personnage, c’est autour d’Andragor qu’il construit le reste : « Une fois que j’ai fixé le personnage principal, qui va tout faire pour essayer de prouver sa valeur, j’en ai ajouté un second qui va tempérer et équilibrer le récit », déclare Cyb. « Nous avons deux caractères différents et tranchés pour que l’histoire fonctionne bien. » Il ne reste plus qu’à ajouter les monstres, les animaux et les paysages étranges à la recette afin de créer un monde merveilleux.

Bien que Cyb se soit amusé à créer un personnage individualiste à l’image de notre époque, il rappelle tout de même que l’idée de la BD n’est pas de tomber dans une critique sociale : « on est vraiment dans le divertissement et avec des personnages légers qui peuvent de temps en temps nous apprendre que si nous étions un peu plus réfléchis, nous pourrions construire quelque chose d’intéressant ».

Cultiver son âme d’enfant 

Plus jeune, l’auteur dévore les classiques de la BD tels que Astérix et Obélix, Les Tuniques bleues, Tintin : « J’adorais ça, et puis cela m’a permis de comprendre ce qu’était l’encre de Chine » dit-il. Ce n’est que plus tard qu’il se plonge dans la lecture de mangas avec les œuvres de Toriyama et son célèbre Dragon Ball, ou de Masami Kurumada avec Ring ni kakero ou Fūma no Kojirō. Aujourd’hui, il lit plutôt des Seinen, un type de manga ciblant les jeunes adultes de sexe masculin, comme 20th Century Boys ou Billy Bat de Naoki Urasawa : « J’aime beaucoup ce gars-là, il a un sens de la dramaturgie assez énorme », s’exprime-t-il.

Conscient que Bubble Gôm Gôm est davantage susceptible d’attirer la jeunesse, Cyb désire tout de même toucher un large public, y compris les adultes. Il avoue lui-même lire ce genre de BD : « Je pense qu’il faut se dire que l’on peut lire le manga à n’importe quel âge. Il y a des gens pour qui c’est fini, passé quinze ans tout est fini. Mais certains adultes, ceux qui sont encore en train de penser à Dragon Ball dans un coin de leur tête, ils peuvent lire ça sans problème ». 

Question inspiration, Cyb évoque ses lectures de Toriyama ou encore Sergent Keroro de Yoshizaki. Ce sont d’ailleurs de ces dernières qu’il pense s’être inspiré pour le découpage de Bubble Gôm Gôm pour lequel il s’est attaché à réaliser des chapitres courts pouvant fonctionner indépendamment les uns des autres : « Avant de savoir ce que l’on veut dire, il faut se dire qu’il y aura un découpage qui fait que ça fonctionne ». Le merveilleux, les blagues idiotes ou les simples idées qu’il se fait font également partie de la recette qui sert son inspiration. C’est d’ailleurs de cet héritage mangatesque que Cyb a décidé de garder certains codes. Alors que la couverture est ultra colorée, il choisit le noir et blanc pour le dessin et l’histoire. En réalité la question du noir et blanc ne s’est pas posée : « Mes inspirations principales viennent du manga qui est essentiellement en noir et blanc, c’est le B-A-BA. C’est simple, pratique et efficace. Du noir et du blanc comme dans les magazines de mangas qui sortaient aussi dans les années 70’s. C’est le code ».

Bubble Gôm Gôm : BD ou manga ?

Comme vous le souhaitez, car Bubble Gôm Gôm est une communion des deux, à l’image de la variété de références de l’auteur. « Pour créer Bubble Gôm Gôm, mes références ont été celles du manga à 70%. Le reste est issu des codes de la BD européenne », précise l’auteur. « C’est très compliqué du faire du manga avec des codes à 100% manga car certains en ont une autre signification. Pour moi BD, manga… tout se mélange. » À titre d’exemple, Cyb a choisi de ne pas faire commencer son livre de droite à gauche comme cela se fait traditionnellement pour les mangas.

La question de l’un ou de l’autre se pose d’autant plus lorsque l’on découvre la présence de noms et termes bretons au cours de l’histoire. Le dessinateur justifie cela par sa volonté de rendre l’histoire improbable : « Que viennent faire des noms bretons ici ? Cela rajoute une personnalité un peu hybride. »

Bubble Gôm Gôm risque de réserver de pittoresques surprises. Nous avons hâte de découvrir la suite des aventures des jeunes Yaouanks Andragor et Shapa dans le volume 2, dont la sortie est prévue pour 2022 !

Pour le volume 1, rendez-vous ici.

Bubble Gôm Gôm de Cyb. Date de parution : 09/10/2021. Kämbarka Éditions.

KÄMBARKA PRODUCTIONS

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