Lorsque le narrateur débarque dans ce pays inconnu et découvre l’appartement d’Oskar, il est ravi de la bonne aubaine. Son ami lui a en effet demandé de s’installer chez lui en son absence pour prendre soin de ses deux chats ; deux arguments : c’est compliqué de les caser et que ledit ami pourrait ainsi échapper à son petit appartement londonien en prenant des vacances. Notre narrateur, dont nous ne connaîtrons jamais le nom, investi donc le territoire de son ami de fac et y découvre toutes les traces de sa vie : ses très nombreux livres et ses partitions puisqu’il est désormais un compositeur renommé, son gout de l’ordre et de l’immaculé dans sa cuisine moderne et fonctionnelle absolument rangée, son amour des espaces à travers la clarté de l’appartement, le piano bien sûr et surtout… le parquet. Un sublime parquet de chêne qui habite l’appartement d’une présence réelle. Un parquet parfait, sans défaut aucun, une véritable œuvre d’art.

Attention au parquet, Will Wiles

Le narrateur trouve en s’installant plusieurs notes de la main d’Oskar donnant quelques consignes sur le bon fonctionnement de l’appartement et sur la manière adéquate de nourrir les chats. Oscar est plus que maniaque, semble-t-il, ce qui ne l’étonne pas vraiment quand il se remémore leurs jeunes années et la cohabitation de l’époque où ils étaient étudiants. Mais l’appartement, à part le parquet, semble presque mort, inhabité, vide d’âme, totalement aseptisé.

Il va cependant tenter d’y prendre ses marques. Sauf que rien ne va se dérouler comme prévu. Une petite tâche sur le parquet et le voilà déjà paniqué, et ce n’est que le début d’une série catastrophe qui tourne vite au drame et au grand guignol.

Les notes d’Oskar sont en fait disséminées un peu partout dans l’appartement, comme si le musicien avait anticipé les catastrophes qui s’y déroulent et les avait toutes prévues. Il est vrai que le fait d’être dans une ville inconnue, de ne pas parler la langue, de perdre ses repères, est déstabilisant pour le locataire provisoire de l’appartement, mais il se trouve pris dans une spirale qui semble ne jamais vouloir prendre fin et l’action du roman, très lente au départ, bascule dans l’absurde et le loufoque, avec une tension de plus en plus pesante comme si nous nous trouvions dans un thriller.

Le parquet serait-il maudit, ou bien est-ce le narrateur qui accumule les catastrophes ?

C’est en tout cas un roman très original, assez étrange, qui met le point sur une amitié particulière dont on se demande comment elle a pu résister au temps étant donné les différences entre les deux personnages. Il pointe aussi l’importance que nous pouvons accorder aux biens matériels, lesquels prennent parfois plus de poids que les êtres qui nous entourent. L’ensemble est assez inégal avec des passages longuets et d’autres hilarants, mais c’est un premier roman et des plus prometteurs.

En conclusion : ne prêtez surtout pas votre maison ou votre appartement si vous tenez à vos affaires, mais n’hésitez pas à prêter ce roman.

Attention au parquet ! Will Wiles, traduit de l’anglais par Françoise Pertat, mars 2014, 304 pages, 21 €

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