Deuxième étape : Esquibien, Cap Sizun, Finistère
Olivier Hodasava est un voyageur virtuel. Il arpente quotidiennement les artères du monde de Google Street View. Quand l’image saisie devient le réel ultime de la fiction commune… De cette expérience est né un premier livre, Éclats d’Amérique,paru au printemps 2014 aux éditions Inculte. Pour Unidivers, l’arpenteur – qui se fait un peu géomètre – avance à la façon d’un fildefériste sur une ligne (presque) imaginaire : le 48e parallèle Nord. La latitude sur laquelle est située la ville de Rennes.
Voyager, c’est bien utile, ça fait travailler l’imagination. Tout le reste n’est que déceptions et fatigues. Notre voyage à nous est entièrement imaginaire. Voilà sa force. Il va de la vie à la mort. Hommes, bêtes, villes et choses, tout est imaginé. C’est un roman, rien qu’une histoire fictive. Littré le dit, qui ne se trompe jamais. Et puis d’abord tout le monde peut en faire autant. Il suffit de fermer les yeux. C’est de l’autre côté de la vie. (Céline, Voyage au bout de la nuit)
C’est par Esquibien que le 48e parallèle Nord pénètre l’Europe. J’ai découvert cela il y a peu et bien sûr, sur le champ, j’ai eu envie d’aller voir. C’était un lundi matin d’avril. Les rues étaient à peu près désertes, mais à force de déambulations, j’ai tout de même fini par croiser la route de cyclotouristes en virée.

Ils étaient tout un groupe, essaimés en chapelet sur la rue principale (rue Surcouf ou Jean Bart, je ne sais plus). J’ai apprécié à sa juste mesure cette maigre (cette furtive) présence humaine. Ensuite ? Ensuite, j’ai erré. J’espérais secrètement, débarquant ici, qu’il se passe quelque chose d’exceptionnel. Mais très vite, il faut bien l’avouer, j’ai réalisé que cela n’arriverait jamais. Régulièrement, j’ai fermé les yeux pour mieux entendre : une pelleteuse à hauteur d’un pavillon en construction ; une tondeuse à gazon ; un chien aboyant rageusement on ne sait contre qui.


